La coopération entre l’Algérie et les États-Unis dans l’agriculture progresse. On la doit notamment au dynamisme de l’ambassade américaine à Alger et aux entreprises algériennes.
Cette coopération date d’une quarantaine d’années lorsque la Sonatrach a mandaté une société américaine pour cultiver du blé à Gassi Touil. À ce titre, les entreprises américaines ont été les promoteurs de l’agriculture saharienne.
Témoin de la coopération entre les deux pays, les projets en matière d’élevage. Cette activité est particulièrement développée aux États-Unis, notamment dans d’immenses parcs d’engraissement de bovins de boucherie en plein air.
C’est dans ce cadre que le bureau des affaires agricoles l’ambassade des États-Unis à Alger et les Services vétérinaires américains (APHIS) ont organisé du 18 au 20 septembre une rencontre avec leurs homologues algériens dont le Centre national d’insémination artificielle et d’amélioration génétique (CNIAAG) d’Alger.
Food security is so vital. 🇩🇿 Minister of Agriculture and Rural Development, Mr. Mohamed Abdelhafid Henni and I discussed opportunities for collaboration and growth. #USinDZ pic.twitter.com/D20UAFJO1Y
— Ambassador Aubin (@USAmbtoAlgeria) September 17, 2023
Une rencontre qui, selon un communiqué de l’ambassade des États-Unis en Algérie, a « réuni des intervenants experts du secteur privé américain représentant divers domaines, des vétérinaires aux exportateurs de bovins vivants et aux généticiens, en passant par les experts en semence et en embryons bovins. »
Il ne s’agit pas pour l’Algérie d’importer des animaux vivants des États-Unis, mais des paillettes de semences de taureaux sélectionnés pour leur croissance rapide.
L’Algérie est un des premiers pays à accueillir ce type de rencontre ce qui fait dire à l’ambassadrice des États-Unis en Algérie, Elizabeth Moore Aubin : « Je suis fière que la technologie génétique américaine ait joué un rôle clé dans l’expansion de la production de la dinde et du poulet en Algérie au cours de la dernière décennie. Maintenant, nous avons hâte de voir des vaches qui naîtront en Algérie avec une génétique américaine. » Pour la partie algérienne, il s’agit d’arriver à fournir les énormes quantités de fourrages nécessaires à ces animaux d’exception.
On National Day of Encouragement, let us embrace the power of positivity and support one another in building a brighter future between our two nations. Together, we can overcome challenges and achieve greatness. 🇺🇸 🤝 🇩🇿 #NationalDayOfEncouragement #USinDZ pic.twitter.com/sPrL6aMgbK
— Ambassador Aubin (@USAmbtoAlgeria) September 12, 2023
La coopération entre l’Algérie et les États-Unis s’étend également à l’aquaculture. En juillet 2022, un accord a été signé entre la société Aqua continentale de Relizane et son partenaire Trans American Aquaculture pour la production de crevettes en Algérie. L’entreprise algérienne devrait bénéficier d’un transfert de technologie pour le développement d’un couvoir.
Le lien entre les États-Unis et l’agriculture en Algérie existe depuis de nombreuses années. Lorsqu’en novembre 1942 les troupes américaines débarquent en Algérie, les premiers soldats foulant le sol algérien se seraient exclamés « Algeria, new California », Algérie, la nouvelle Californie.
Lors d’une conférence de presse tenue à New-York en février 1963, l’agence AFP rapporte qu’Amar Ouzegane, ministre de l’agriculture et de la réforme agraire, avait indiqué que « les États-Unis avaient offert à l’Algérie une aide de 60 millions de dollars, destinée à la rénovation de l’agriculture algérienne et à l’achèvement des barrages ».
Les relations se sont poursuivies durant des années. Depuis son arrivée en février 2022 à Alger Elizabeth Moore Aubin fait preuve d’un dynamisme remarquable, notamment dans le domaine de l’agriculture. C’est le cas avec des déplacements au niveau d’une vingtaine de wilayas et sa récente rencontre avec le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Abdelhafid Henni.
Une rencontre qui, selon un communiqué du ministère, a permis d’aborder « les voies de consolidation des relations bilatérales, de la coopération, et du partenariat dans différents domaines, notamment dans le domaine agricole ».
Le ministre a eu l’occasion d’indiquer les domaines où la partie américaine pourrait apporter sa contribution « notamment l’investissement dans le domaine agricole, des cultures stratégiques et de la production céréalière, ainsi que dans l’amélioration génétique, en particulier en matière de production laitière et de production de viandes rouges ».
Sans oublier également « une plus grande contribution au développement dans les wilayas du sud », selon le même communiqué.
Parmi les wilayas visitées par l’ambassadrice américaine en Algérie, on compte Aïn Témouchent en avril dernier. Lors de cette visite, le wali M’hamed Moumene, a eu l’occasion de souligner les potentialités agricoles locales avec 200.000 hectares de surfaces agricoles.
À la mi-septembre, Elizabeth Moore Aubin s’est rendue dans la wilaya d’Aïn Defla et à cette occasion, elle a déclaré vouloir « apprendre plus sur l’agriculture pratiquée localement, et surtout à trouver des zones dans cette région où des groupes agroalimentaires américains pourraient travailler avec des entreprises algériennes ».
À Aïn Defla où est déjà implanté le groupe français Avril qui, en partenariat avec le groupe algérien SIM, produit des aliments pour le bétail.
Depuis plusieurs mois des entreprises américaines étudient les possibilités de partenariats en Algérie. En janvier 2022, le Conseil d’affaires algéro-américain (USABC) animé par Smail Chikhoune a organisé en collaboration avec l’ambassade d’Algérie à Washington, une visite baptisée « US Agriculture Road Show to Algeria 2022 ».
Sept entreprises américaines y ont participé et visité plusieurs wilayas. A cette occasion, les participants américains ont étudié les possibilités d’implanter de grandes fermes laitières et céréalières dans le grand sud algérien.
Ce sont des sociétés américaines qui ont lancé l’agriculture saharienne. Dans les années 1980, la Sonatrach a mandaté la firme américaine Hydrotechnic Corporation pour installer les premiers pivots d’irrigation pour la culture de blé à Hassi Messaoud, In-Aménas et Gassi Touil. Des pivots que modifieront plus tard des artisans d’El Oued faisant de cette région l’une des principales zones de production de la pomme de terre.
L’Algérie bénéficiera de la technique du forage pétrolier née au Texas dès 1901 et transposée à partir de 1949 au domaine agricole dans le Colorado avec irrigation par aspersion sur les premiers « crop circles » ou champs circulaires.
À la demande du ministre saoudien des Finances, les ingénieurs de l’Aramco développèrent dès 1943 l’utilisation des eaux souterraines en Arabie Saoudite en mobilisant un géologue de la compagnie puis plusieurs agronomes. Dès 1944, ce sont 1.400 hectares qui sont ainsi irrigués.
Lors de sa visite aux États-Unis en 1957, le roi Fayçal d’Arabie saoudite découvre les exploitations de l’Arizona et décide de développer le principe dans le royaume. Dès 1960 sont installés 51 pivots là ou le géant pétrolier saudien Aramco découvre l’un des plus grands gisements de pétrole du monde et une vaste nappe d’eau souterraine. Face à l’échec de sédentariser des nomades, l’exploitation est confiée à une entreprise américaine.
Mais face à l’épuisement rapide des nappes d’eau souterraines en 1992 le décret royal 335 marquera le déclin de la culture des céréales dans le désert saoudien.
La culture du blé par irrigation est en développement au sud de l’Algérie avec l’objectif d’arriver à un million d’hectares. Force est de constater que cette pratique, parfois controversée, aura permis cette année de produire à El Ménéa, Timimoun, Adrar ou au sud de Khenchela le blé qui a servi à approvisionner en semences les agriculteurs du nord du pays handicapés par une terrible sécheresse.
L’expertise américaine ne s’arrête pas à l’irrigation, elle couvre également la restauration des terres menacées de désertification. Une expérience qui pourrait être utilisée en Algérie dans le cadre de l’exploitation rationnelle des 20 millions d’hectares de zones steppiques.
Dans les années 30 les plaines de l’Oklahoma, du Kansas et du Texas sont dévastées par des tempêtes de sable, les Dust Bowl, qui ruinent 3 millions d’agriculteurs.
Ces plaines auparavant occupées par des bisons ont été labourées à partir de 1900 et deviennent la plus grande région agricole du pays. Mais avec la sécheresse de 1931 à 1937 les particules les plus fines qui font la fertilité de ces sols sont emportées par le vent.
À l’occasion de la politique du New Deal décrétée par le président Roosevelt, un programme de recrutement de chômeurs permet de l’exécution de travaux permettant de revitaliser la terre et d’adopter des techniques de protection des sols : plantation d’arbres, réduction des labours, culture en bandes selon les courbes de niveau…
Les services agricoles réussissent l’une des plus grandes opérations de protection des sols. Des techniques que tente de développer en Algérie le Haut-commissariat du Développement de la Steppe.
Les Etats-Unis s’avèrent être également des pionniers en matière de culture en sec. Dans la région du Pacific Northwest, où du blé est cultivé avec moins de 300 mm de pluie par an, les agriculteurs utilisent la variété Moro.
Une variété de blé ramenée de Turquie par les premiers immigrants. Cette variété présente la particularité de pouvoir germer même semée à 10 cm de profondeur. Une particularité qui fait qu’aujourd’hui les chercheurs américains et australiens se demandent si les blés à coléoptile long ne pourraient-ils pas à l’avenir changer la donne en matière de semis précoces. Réussir la culture de blé sur les 7 millions d’hectares des zones semi-arides sans possibilités d’irrigation, une question qui intéresse vivement de nombreux agriculteurs en Algérie.
En agriculture, les entreprises américaines détiennent un savoir-faire indéniable que ce soit en matière d’élevage, de production de blé, maïs, pistaches ou amandiers.
À chaque fois, le gigantisme des installations est impressionnant. Cependant, il s’agit le plus souvent d’un modèle qui laisse peu de place aux petites exploitations et qui parfois laisse peu de place à la préservation des ressources naturelles comme c’est le cas avec l’assèchement progressif du fleuve Colorado.