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Blé dans le Sahara : Tebboune exige des rendements élevés

Blé dans le Sahara : Tebboune exige des rendements élevés

Lors de son passage à la Foire de la production nationale d’Alger mardi 13 décembre, le président Abdelmadjid Tebboune s’est intéressé à la culture du blé sous pivot dans le Sahara.

Il a estimé que la rentabilité de cette culture ne pouvait être atteinte qu’à partir de rendements de 70 quintaux. Pour de nombreux investisseurs, les rendements plafonnent à 40 quintaux.

« Pour un exploitant des terres dans l’extrême sud, il dit avec fierté qu’il réalise un rendement de 50 quintaux à l’hectare. Mais ces 50 quintaux, c’est l’équivalent de 18 quintaux dans les Hauts-plateaux. Dans le sud, avec l’eau et le soleil, celui qui fait moins de 70 quintaux à l’hectare, il est en train de perdre son temps », a dit le président Tebboune à un agriculteur.

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De tels rendements sont décevants lorsqu’on considère le montant des investissements nécessaires à la culture de blé au Sahara.

Les investisseurs adoptent diverses stratégies pour compenser la faible rentabilité du blé : ils étaient les premiers en 2020 à réclamer des augmentations. Ils développent également la double culture.

À peine la récolte du blé terminée, ils se préparent à semer du maïs fourrage dont les balles enrubannées d’une tonne sont recherchées par les éleveurs. Certes, tous ceux ayant investi au sud ne restent pas à ce niveau. Cependant, la question interpelle.

Des dépenses multipliées par le désert

Installées sous climat aride, ces cultures nécessitent une irrigation continue. Dès le printemps, l’air sec et le vent créent un environnement défavorable. Seul l’apport continu d’eau permet aux plantes de résister. Une eau apportée par le fonctionnement continu de gigantesques pivots.

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Des engins dont les moteurs électriques nécessitent une consommation d’énergie considérable. À cela s’ajoute la consommation nécessaire au pompage de l’eau et à son injection sous pression dans les travées des pivots. Aussi, le premier poste de dépense vient des factures d’électricité à payer à la Sonelgaz.

À l’aridité vient s’ajouter les distances. Dans le cas d’Adrar, les distances par rapport au nord du pays se comptent en plusieurs centaines de kilomètres. Le transport du matériel et des engrais nécessite donc une logistique lourde et coûteuse. Il en est de même pour les récoltes qui doivent remonter vers le nord, là où se situent les consommateurs, les ports pour l’exportation et les principales usines de transformation des produits agroalimentaires.

Des sols ingrats

Outre l’aridité du climat dans le sud de l’Algérie, les sols sont souvent sableux et calcaires. L’eau et les engrais n’y sont donc pas retenus. Le calcaire bloque une partie des engrais et des oligo-éléments d’où un jaunissement spectaculaire des jeunes plants.

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À cela, s’ajoute le sel. Un sel en provenance de l’eau pompée en profondeur. Selon les nappes, ce niveau de sel dans l’eau est variable. Mais même à dose minime, la durée des arrosages est telle, qu’il finit par s’accumuler à la surface du sol qui prend alors une teinte blanchâtre caractéristique.

Dans les cas extrêmes, les sols irrigués sous pivots semblent être recouverts de neige. Seules des pluies régulières pourraient entraîner en profondeur ce sel. Mais dans ces contrées, avec des moyennes annuelles inférieures à 50 mm, la pluie reste plus un espoir qu’une réalité.

Face au poison que constitue le sel, la seule réponse trouvée par les investisseurs est de déplacer leurs pivots vers les parcelles voisines au sol vierge. Une opération qui doit parfois être renouvelée tous les 5 ans.

Une agriculture sans agriculteurs

L’agriculture saharienne diffère de l’agriculture oasienne. Celle-ci repose sur des savoirs ancestraux des populations des oasis. Dans le cas de l’agriculture sous pivots, il s’agit d’investisseurs venus de différentes régions de l’Algérie sans réelles connaissances agronomiques. Des investisseurs alléchés par les généreuses subventions publiques et qui s’engagent dans des paris incertains.

Nombreux sont ceux qui finissent par faire appel à des techniciens. S’agissant d’un domaine peu connu, même ceux-ci ont dû passer par une phase de tâtonnements.

Ainsi, lorsque le groupe public de BTP Cosider a installé ses premiers pivots au sud de la wilaya de Khenchela, les responsables du projet ont reconnu avoir essuyé les plâtres lors des premières années. Certaines parcelles donnaient des rendements d’à peine 20 quintaux.

Les agronomes à la rescousse des investisseurs

Face à la stagnation des rendements, l’Institut technique des grandes cultures (ITGC) a dépêché depuis Alger, des équipes d’ingénieurs.

À Ménéa, des essais ont été mis en place pour tester différentes variétés de blé. Des différences notables sont vite apparues entre les différents cultivars.

En parallèle, des conseils ont été prodigués à quelques investisseurs locaux. À l’issue de la récolte, l’un d’entre eux déclarait avoir atteint pour la première fois un rendement de 77 quintaux de blé par hectare.

Aujourd’hui, sous pivots, les investisseurs parlent des variétés de blé Oued Bared ou Maouna. Des variétés productives que leur ont fait connaître les ingénieurs de la station ITGC de Oued Smar (Alger). Étrangement, cet institut ne dispose pas de station au sud du pays.

Un capital d’expérience accumulé

L’expérience accumulée a permis de capitaliser un savoir-faire. Il est ainsi apparu que certains sols ne convenaient pas du tout à l’agriculture alors que d’autres s’avéraient plus fertiles.

Bien sûr, à condition d’être régulièrement arrosés. Face aux sols filtrants, certains ont compris qu’il fallait majorer les doses des engrais azotés mais surtout fractionner les apports. Sur ces sols vierges, des mauvaises herbes sont cependant apparues, apportées avec des semences de blé mal triées. L’emploi d’herbicides est devenu indispensable.

Objectif : 80 quintaux à l’hectare

C’est tout un apprentissage qui se met en place. Aujourd’hui, les semences ne proviennent plus du nord du pays. La CCLS d’Adrar possède sa propre station de tri de semences de blé. Des entreprises locales d’agro-fournitures proposent des programmes « clés en main » avec doses d’engrais et herbicides à utiliser tout au long du cycle de culture.

D’autres proposent des sondes permettant de mesurer l’humidité du sol et éviter de coûteux excès d’eau. Atteindre un rendement de 80 quintaux de blé à l’hectare suppose de semer dru et de forcer sur les doses d’azote.

À ce niveau, les variétés à tiges les plus longues ploient sous le poids des épis alourdis par l’eau des rampes d’irrigation. Elles versent lors des coups de sirocco, d’où des pertes à la récolte. La prochaine étape pourrait être d’ajouter, comme dans les champs du Bassin parisien, des « régulateurs de croissance » afin que les plants de blé dopés aux engrais arrivent à supporter le poids de leurs épis.

Surveiller le niveau des nappes

Les quantités d’eau des nappes souterraines du sud sont telles qu’elles sont estimées en milliards de m3. Cependant, au fil des années, les investisseurs et agriculteurs oasiens constatent un rabattement de ces nappes.

C’est le cas de Mohamed Hadjadj de Ménéa. Récemment, il confiait à la presse qu’à ses débuts l’eau affleurait en surface. Aujourd’hui, il doit la pomper à 30 mètres de profondeur. Inquiétant pour les générations futures.

Les espoirs de l’agriculture saharienne reposent sur le postulat qu’au sud de l’Algérie, l’eau est une richesse inépuisable. Aux services de l’hydraulique d’afficher pour chaque région le niveau des nappes. Car pour atteindre un rendement de 80 quintaux de blé à l’hectare, il faut de l’eau. Beaucoup d’eau.

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