Le marché algérien du blé continue de susciter des convoitises à l’étranger. Le cabinet français Agritel spécialisé en stratégies des marchés agricoles a annoncé mardi que l’Algérie a lancé en ce début de semaine un nouvel appel d’offres pour l’achat de blé.
« C’est l’Algérie qui retiendra l’attention des opérateurs sur le marché du blé pour le début de cette semaine », a lancé Agritel.
« Plus que jamais, cette destination [l’Algérie] est essentielle à reconquérir par le blé français, en retard dans les exportations depuis le début de campagne », a rapporté lundi La France agricole lundi 11 décembre, citant le cabinet français.
L’appel d’offres de l’Office algérien des céréales (OAIC) concerne des livraisons durant les mois de février et de mars 2024. Face à la concurrence russe et les blés en provenance de la mer Noire, la filière céréale française est sous tension.
Avec 35 millions de tonnes (Mt) récoltées lors de la précédente récolte, les stocks français sont abondants. Mais les exportateurs français doivent faire face à une offre russe concurrentielle. Elle est inférieure de 30 euros la tonne par rapport à l’offre française.
Blé : la France espère mettre la main sur un appel d’offres algérien
Ces prix concurrentiels proposés par les opérateurs russes font que sur 12 Mt importées par la Chine, plus de 70 % ont été commandés auprès de Moscou. Avec 11,6 Mt importées, l’Égypte se situe derrière les achats chinois. Autant dire que comme le constate Agritel : « la dynamique export (française) n’est toujours pas au rendez-vous face à des offres russes toujours compétitives ».
Après l’Algérie, la Tunisie et le Bangladesh ont également lancé des appels d’offres. La demande internationale en blé est donc là et les opérateurs français tentent de se placer.
La Russie s’impose sur le marché mondial des céréales
En septembre dernier, l’organisme public FranceAgriMer a publié son analyse de la campagne céréalière écoulée française. La production de blé tendre a augmenté de 4 % avec 35 Mt et la filière vise l’exportation de 17 Mt, dont 7,5 Mt vers l’Union européenne.
Des chiffres qui révèlent cependant « une perte de parts de marché au profit de la Russie » qui a engrangé en 2023 une récolte exceptionnelle estimée entre 85 et 90 Mt. Une récolte qui dope ses exportations.
Pour le Conseil international des céréales, « le volume d’exportation prévu par la Russie pourrait atteindre 46,2 Mt » quand d’autres experts tablent sur 50 Mt. Des volumes qui selon Marc Zbiri de FranceAgriMer « représente 30 % du marché mondial » et qui permettent à la Russie d’avoir « le potentiel pour être présente sur le marché export de façon massive sur l’ensemble de la campagne. » De quoi réduire les espoirs des exportateurs français.
Algérie, retard des semis de céréales
En Algérie, la campagne de semis des céréales bat son plein. Lors d’une réunion de travail avec les cadres du secteur tenue le 9 décembre, le ministre de l’Agriculture et du développement rural, Youcef Cherfa, a affirmé que « toutes les conditions étaient réunies pour atteindre l’objectif visant à porter les superficies dédiées à la céréaliculture à 3 millions d’hectares, notamment après la mise à disposition par l’État des semences et des engrais », selon l’agence officielle APS.
De nombreux agriculteurs se sont plaints d’un manque de semences. Selon Amrani Nouredine de l’OAIC, quatre millions de quintaux de semences sont en cours de livraison et c’est aux commissions de wilayas d’établir des programmes de livraison en fonction de la situation de chaque exploitation. Celles ayant déjà un plus fort pourcentage de terre déjà labourée devant être servies avant les autres.
La même source indique que même si la campagne des labours-semailles de cette année a enregistré un « retard », cet objectif « ne sera pas remis en question », selon le ministre qui a donné des instructions pour rattraper le retard dans un délai d’ « un mois ».
Un retard qui s’explique par un fort retard des pluies automnales survenues fin novembre. Dans ces conditions, une majorité d’agriculteurs rechignent à semer en sec.
Pour les agriculteurs algériens, le challenge est donc de semer trois millions d’hectares de céréales en un mois. Passé la date optimale de semis, le potentiel de rendement décroît. Le challenge semble difficile à tenir.
Selon Arezki Mekliche, enseignant-chercheur au niveau de l’École Nationale Supérieure Agronomique qui a eu l’occasion de s’exprimer sur la Radio algérienne, un grand nombre de tracteurs n’ont pas la puissance nécessaire pour tirer des outils de grande largeur. Les techniques culturales simplifiées (TCS) permettraient d’accélérer la vitesse d’exécution des chantiers de semis, mais c’est une option actuellement négligée.
Les céréales restent donc toujours fortement impactées par le manque de pluies. Le retard des pluies automnales risque de handicaper le potentiel de rendement sans que soient mises en œuvre les solutions adaptées à un problème pourtant récurrent. Une situation qui contribue à pérenniser les importations.
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