Politique

Boycott du FFS : un premier grand coup à la crédibilité de la présidentielle

Le FFS boycottera l’élection présidentielle d’avril prochain. Ce n’est ni une révolution ni même un changement de cap pour ce parti qui a zappé quasiment tous les scrutins du genre depuis l’institution du multipartisme il y a trente ans.

Même lors de l’unique présidentielle à laquelle il a participé, celle de 1999, son candidat, feu Hocine Aït Ahmed, n’était pas allé au bout puisqu’il s’était retiré à la dernière minute en compagnie de cinq autres postulants. C’est donc le contraire qui aurait étonné, mais il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une mauvaise nouvelle pour ceux au sein du pouvoir qui pourraient encore se soucier des formes.

C’est le premier grand coup porté à la crédibilité de l’élection d’avril. Quelle que soit l’option qui sera retenue par le pouvoir, la reconduction du président Bouteflika ou le parrainage d’une autre candidature issue de ses rangs, la participation d’un parti comme le FFS, qui dispose d’un ancrage dans certaines régions et qui incarne encore aux yeux de beaucoup l’opposition au système malgré les errements de ses dirigeants ces dernières années, sera toujours bonne à prendre comme feuille de vigne.

Tout comme celle du Parti des Travailleurs qui non plus ne semble pas chaud à l’idée d’apporter sa caution au scrutin, à en croire sa secrétaire générale, Louisa Hanoune, qui a déclaré le même jour qu’elle ne compte pas se présenter, ce qui serait une première depuis vingt ans.

L’autre parti de la mouvance démocratique, le RCD, devrait sans surprise opter pour le boycott au vu du discours radical qu’il développe depuis au moins l’élection de 2004 durant laquelle il avait soutenu le candidat Ali Benflis. Ce dernier, considéré comme un « poids lourd » de la scène politique, a certes laissé « toutes les portes ouvertes » mais il n’a pas encore annoncé formellement sa candidature et il est à parier qu’il ne le fera pas si le président Bouteflika entre en course. Le président de Talai El Houriat est échaudé. Il a tenté à deux reprises (2004 et 2014) de se mesurer au chef de l’État et en est sorti humilié autant de fois.

Jusque-là, seules deux candidatures « sérieuses » sont enregistrées. Elles émanent d’un nouveau venu sur la scène politique, le général-major à la retraite Ali Ghediri, et d’un parti habitué de ce genre de scrutin, le MSP qui a annoncé vendredi la candidature d’Abderrazak Makri, sans doute plus par souci de couper l’herbe sous le pied de son ancien président Bouguerra Soltani qui avait fait part de son ambition de briguer la magistrature suprême, que par réelle illusion de faire changer les choses par la voie des urnes.

Sans le FFS, le RCD et le PT pour ne citer que ceux-là, l’élection présidentielle à venir ne sera pas plus crédible que toutes celles que le pays a connues depuis 1995. Il restera la présence aux starting-blocks d’Ali Ghediri, qui développe un discours de « rupture » et de « changement », pour donner l’illusion d’une compétition démocratique, mais on ne sait encore rien des motivations réelles de sa candidature ni de sa capacité à mobiliser.

L’hirondelle ne fait pas le printemps et l’entrée en lice du général à la retraite, aussi clean et « démocrate » soit-il, risque de ne pas faire d’un scrutin fermé une grande fête de la démocratie. Car les prémices d’une énième mascarade électorale sont déjà là ne serait-ce qu’au vu du parti pris flagrant des médias lourds publics qui répercutent quotidiennement les appels à la « continuité » tout en zappant les autres candidatures annoncées, comme celle d’Ali Ghediri justement, classée dans la case du non-événement par l’ENTV, les radios et les journaux d’Etat.

Bouteflika ou un autre, le chef de l’État qui sortira des urnes au soir du 18 avril prochain traînera encore tel un boulet la réputation de président « mal élu ». Ce serait d’autant plus préjudiciable pour lui, pour le système et pour le pays que la conjoncture économique et sociale qui s’annonce dans les deux ou trois prochaines années risque d’être délicate et de nécessiter un minimum de légitimité pour celui qui aura à la gérer.

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