Économie

Comment les élections algériennes profitaient aux entreprises espagnoles

L’Algérie et l’Espagne sont depuis neuf mois en crise ouverte, qui a débouché en juin dernier sur le gel du commerce entre les deux pays, sur décision d’Alger.

L’Algérie a également suspendu le traité d’amitié et de coopération avec l’Espagne, en réaction à la décision du gouvernement de Madrid d’appuyer les thèses marocaines dans le dossier du Sahara occidental.

La fermeture du marché algérien aux produits espagnols a eu de lourdes répercussions sur les entreprises de ce pays.

L’Algérie est l’un des principaux fournisseurs de l’Espagne en gaz et était avant la crise un important acheteur de ses produits industriels et agricoles.

En 2021, les exportations espagnoles vers l’Algérie s’étaient élevées à 2,7 milliards de dollars. Depuis juin dernier, les pertes des entreprises ibériques avec le marché algérien sont estimées à plus de 800 millions d’euros, selon le journal espagnol El Independiente, qui consacre un long article à la question, intitulé « radiographie du cataclysme des entreprises espagnoles punies par l’Algérie ».

Le journal rapporte qu’une vingtaine d’entreprises espagnoles ont engagé des procédures pour réclamer des dédommagements au gouvernement de Pedro Sanchez auquel elles reprochent sa décision inconsidérée de changer de position sur le dossier important et sensible du Sahara occidental.

Certaines entreprises sont complètement à l’arrêt et la faillite se profile pour elles car elles réalisent l’essentiel ou la totalité de leur chiffre d’affaires avec l’Algérie. Ces entreprises activent notamment dans les produits industriels, les technologies et les produits agroalimentaires.

Algérie – Espagne : « nostalgie » pour les années électorales

Le secteur de la céramique et des intrants pour cette industrie est l’un des plus touchés. Il y a aussi les bitumes, les équipements et alimentation pour l’aquaculture, les engins de travaux publics…

Les patrons interrogés par El Independiente évoquent avec nostalgie les années fastes de leur commerce avec l’Algérie. On y découvre un secteur totalement improbable dans lequel les espagnols faisaient des affaires juteuses. Il s’agit de celui du papier dont les chiffres explosaient à l’occasion de chaque élection algérienne.

Les entrepreneurs espagnols ont « une certaine nostalgie des années électorales en Algérie », lit-on dans l’article.

La demande algérienne de papier pour les bulletins de vote a augmenté les exportations de papier de l’Espagne qui ont atteint 171 millions d’euros il y a trois ans. Le gérant d’une entreprise dont tous les clients sont Algériens assure qu’il a perdu tous ses marchés du jour au lendemain.

Depuis, les comptes des principales papeteries espagnoles sont décimés. À titre d’illustration, en 2022, le groupe catalan de papier Miquel y Costas a engrangé 37,3 % de moins qu’en 2021, à cause du gel du commerce avec l’Algérie.

Les espagnols profitaient du fait qu’il n’y a pas d’industrie du papier en Algérie. Leurs parts de marché sont désormais reprises par des industriels français et italiens notamment.

« La situation à venir est terrible et la ruine est à l’horizon. Ce sont des entreprises qui ont d’énormes prêts auprès de banques et de fonds internationaux », s’est inquiété auprès d’El Independiente un papetier espagnol.

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