L’Algérie s’attend à une production abondante et de bonne qualité de Deglet nour cette saison. Dans une palmeraie de Biskra, un ouvrier muni d’une large ceinture grimpe le long d’un palmier.
Au sommet, des régimes de dattes protégés par un film plastique orange. La récolte des dattes Deglet nour a commencé. Cette année, elle s’annonce excellente.
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Dans la palmeraie, point de nacelle élévatrice, la récolte reste traditionnelle. Arrivé au sommet, d’un geste précis, l’ouvrier sectionne la tige d’un régime et le fixe à une sangle qui permet de le faire descendre au sol.
Une fois réceptionné au pied de l’arbre, le régime est détaché et la sangle prête à nouveau. A 6 mètres de haut, sous la corolle des régimes, l’ouvrier s’est déplacé sur le côté et s’apprête à recommencer la même opération.
Au sol, un autre chantier. Les régimes de Deglet nour sont suspendus à un support métallique autour duquel des ouvriers s’affairent. D’un coup de sécateur, les branchettes de dattes sont séparées des régimes et disposées dans des caisses.
2022, un bon millésime de Deglet nour
Pour Mohamed, le propriétaire de la palmeraie, 2022 est une bonne année. Il confie à Ennahar TV : « La qualité y est et les producteurs sont satisfaits ». Soulevant une poignée de branchettes, il poursuit : « Le goût, le calibre et la couleur sont là ».
De son côté, Mohamed Amine Houhou, le directeur des services agricoles de Biskra, confie que « la wilaya compte 7,8 millions de palmiers et qu’une production abondante est attendue. Toutes variétés confondues, la récolte attendue devrait être de 7,3 millions de quintaux ».
Il confirme le maintien d’une forte demande de Deglet nour à l’exportation. La récolte de cette année devrait faire oublier celle de 2020.
Les dattes invendues de 2020
A Biskra, la récolte 2020 reste dans tous les esprits. Pour cause de pandémie liée au Covid-19 et du fait des restrictions aux déplacements, les dattes ne trouvaient pas vendeur.
A l’époque, sur le marché de gros de Sidi Ghezzal, les négociants et commerçants des grandes villes du nord et de Tunisie se faisaient rares. Cette année-là, le kilo de Deglet nour était descendu à 150 DA alors qu’il atteignait les 450 DA auparavant. Quant aux autres variétés de dattes, les producteurs affirmaient qu’elles étaient bradées.
En octobre 2020, le quotidien El Watan rapportait le désespoir des producteurs et exportateurs. A Bordj Ben Azzouz, commune au sud de Biskra, le producteur Abderrazak Dalaoui se plaignait de la faiblesse des marges bénéficiaires.
« On préfère attendre », déclarait-il. « Comment voulez-vous cueillir des fruits qui seront bradés ou voués au pourrissement ? Les clients ne viennent pas. Les ateliers de conditionnement marchent au ralenti et nous ne savons plus quoi faire de nos dattes. La situation est déplorable. »
Comme lui, beaucoup de producteurs restaient dans l’expectative et retardaient la récolte des régimes pourtant mûrs.
Se conformer aux normes internationales
Face à la pandémie, des exportateurs tels Youcef Ghemri, président de l’Association des conditionneurs et exportateurs de dattes, réclamaient une mise à niveau de la filière : « Cela doit nous inciter à travailler pour créer de véritables unités de conditionnement et d’exportation de dattes et à mettre en place une logistique et des moyens efficaces et conformes aux normes internationales. »
Il soulignait les carences de la filière algérienne des dattes : « Nous œuvrons encore avec des mentalités archaïques et des méthodes dépassées où chacun agit sans concertation avec les experts et les spécialistes en commerce international et en homologation et validation des produits finis placés sur le marché mondial. »
L’appui de l’université
La filière dattes est accompagnée dans son développement par l’Institut technique de développement de l’agronomie saharienne (ITDAS) et l’université de Biskra. Les travaux portent notamment sur la lutte contre le brunissement des dattes en chambre froide ou la mise au point de techniques permettant de valoriser les palmes sèches.
Avec cette technique, l’ITDAS voit là un moyen de satisfaire le marché local tout en créant des postes de travail. Après broyage, les palmes sèches sont entreposées quelques semaines sur des plateformes de compostage ce qui permet d’obtenir un engrais organique de bonne qualité. Un produit indispensable aux palmiers et aux cultures sous serre. De façon étonnante, le soutien public de 50 % aux engrais ne s’applique pas à cet engrais biologique.
Des travaux universitaires sur la confection d’alcool chirurgical à partir de dattes déclassées se sont récemment concrétisés avec l’entrée en service d’une unité industrielle.
Outre la possibilité d’approvisionner les centres de santé, cette activité a entraîné l’apparition de collecteurs locaux qui se chargent de vendre à cet investisseur ces dattes déclassées abandonnées dans les entrepôts et chambres froides ou aux bas des palmiers.
Une pratique qui a également pour effet d’éliminer les gîtes hivernaux des parasites des dattes et donc de limiter d’éventuels traitements chimiques. La filière dattes, une filière qui ne manque pas d’étonner par son dynamisme.