Politique

Dialogue : Smaïl Lalmas parle de « divergences au sommet de l’Etat »

Cinq jours après son retrait du panel de dialogue et de médiation, le 30 juillet, Smaïl Lalmas sort du silence et explique les raisons de son refus de poursuivre la mission.

« Lorsque le Forum de la société civile a proposé mon nom, j’ai donné mon accord de principe parce qu’ils m’ont convaincu qu’il s’agissait d’une commission à caractère indépendant. Mais j’ai conditionné ma participation par une série de mesures d’apaisement, en premier le départ du gouvernement, la libération des détenus, l’ouverture du champ médiatique. Nous avons été reçus par le chef de l’Etat par intérim qui s’est engagé à répondre favorablement à ces préalables », rappelle-t-il dans un entretien paru dans l’édition de ce dimanche 4 août du quotidien El Watan.

Mais les choses ne se sont pas passé comme prévu. Lalmas évoque d’abord ce qui lui est arrivé lors de la marche du vingt-troisième vendredi à Alger.

« J’ai subi beaucoup de pressions »

« J’avais pour visée d’expliquer aux manifestants ma démarche, la plupart de ceux qui m’ont approché ont été attentifs à mes arguments, mais au moment de repartir, trois jeunes m’ont encerclé et ont fait un tapage autour de moi. Ils m’ont demandé de dégager parce que j’ai accepté de faire partie du panel. J’ai subi beaucoup de pressions », dit-il.

Mais ce n’est pas la seule raison qui l’a poussé à écourter sa mission. Il explique : « Ce qui m’a découragé le plus, c’est le discours du chef d’état-major de l’armée et aussi les dernières décisions de Bensalah. Ce dernier nous a clairement dit que la Constitution ne lui permettait pas de limoger le Premier ministre, alors que c’est faux puisqu’il y a deux jours il a limogé le ministre de la Justice. »

« Franchement, je m’attendais à une approche différente de l’institution militaire. On s’attendait à ce que l’armée appuie le discours de la présidence et non le contraire. J’étais vraiment surpris par le ton et le contenu du discours de Gaïd Salah. Un discours qui était contre mes principes. Les préalables étaient une exigence pour la réussite du dialogue. Nous avons été très bien reçus à la présidence, nos interlocuteurs donnaient l’impression d’être conscients de la gravité de la situation et le chef de l’Etat par intérim s’était engagé à répondre favorablement à nos conditions. On sentait qu’il allait mettre le paquet pour la réussite de ce panel, mais après l’intervention du chef d’état-major, j’ai compris que le panel était mort-né et qu’il y avait de sérieux problèmes au sommet de l’Etat », ajoute l’économiste.

Lalmas va plus loin et parle de « fossé » entre la présidence et l’armée. « A mon avis, le dialogue s’impose d’abord entre les tenants du pouvoir. Entre la présidence et l’institution militaire, il y a un désaccord, il y a même un fossé (…) Le panel dirigé par Karim Younès a mis à nu les divergences existant en haut lieu », dit-il.

« Ce panel n’a aucun avenir »

Lalmas dit n’avoir aucun regret et révèle au passage que même Karim Younès qui « était lui aussi peiné par le discours de Gaïd Salah », ne l’a même pas appelé après sa démission.

Enfin, il se dit convaincu que la mission du panel va droit vers l’échec. « Ce panel n’a aucun avenir. Il est voué à l’échec. Pourquoi ? Parce que sa réussite repose sur l’adhésion populaire. Or, ce n’est pas le cas. Le dialogue doit se faire entre nous, on doit se mettre autour d’une table et tenter de rapprocher les points de vue sur les questions de la Constituante, la présidentielle… Mais sans un climat favorable et une volonté politique, on ne pourra jamais atteindre cet objectif », assure-t-il.

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