Économie

En Algérie, la filière oléicole poursuit sa modernisation

Hakim Alileche, vient de se voir décerner sa 17e médaille pour la qualité de l’huile d’olive Dahbia qu’il produit à Ain Ouessara dans la wilaya de Djelfa. Des médailles obtenues grâce à la conduite en bio de son oliveraie, un passage au moulin des olives récoltées le jour même et un conditionnement dans des bouteilles en verre.

Des pratiques qu’encourage le Pasa, un programme européen d’appui au secteur de l’agriculture en Algérie.

Ce programme est financé par l’Union européenne à raison de 5,8 millions d’euros et son Pôle Soummam est tourné vers l’oléiculture. Il est mis en œuvre par Expertise France et l’Institut national de la recherche agronomique d’Algérie. Il concerne les wilayas de Béjaïa, Bordj Bou Arréridj, Bouira, Boumerdès, Jijel, Médéa, Sétif et Tizi-Ouzou.

Des peignes vibreurs pour la récolte des olives

Pour le Pasa, l’oxydation des olives à la récolte représente un ennemi car il réduit les qualités de l’huile. Pour cela, il dispose de 60 conseillers, 40 pour vulgariser les bonnes pratiques dans les vergers et 20 dans les moulins.

La cause de l’oxydation des olives résulte de la durée entre le moment où elles sont récoltées et le moment où elles sont triturées. Dans certains cas, elles sont stockées dans des big bag de 1.000 kg durant 2 semaines, 3, 4 voire 5 semaines. Les fermentations se développent et sont la cause d’un mauvais goût de l’huile. L’idéal est de faire comme Hakim Alileche : compresser au maximum la durée entre la récolte et la trituration. Les professionnels recommandent de ne pas dépasser 48 heures.

Aussi, pour Olivier Rives, coordinateur du Pôle Soummam : « Il faut s’organiser sur terrain, s’organiser collectivement avec des coopératives ou de petites entreprises qui se créent pour la récolte avec des peignes vibreurs dont nous avons équipé nos conseillers afin qu’ils puissent faire de la démonstration ».

« Ce sont des peignes qui respectent l’olivier. Les olives tombent dans les filets qui sont récoltées et placées dans des caisses ajourées puis dans des Palox pour éviter toute forme d’oxydation », ajoute-t-il. La vitesse de récolte est ainsi multipliée par dix.

Conditionnement de l’huile d’olive : des bidons métalliques à la place du plastique

Un autre problème vient du conditionnement de l’huile d’olives. Il n’y a pas suffisamment de bouteilles de verre opaque en Algérie. Certes, il existe deux importantes unités à Oran et Chlef qui produisent des bouteilles mais pas pour l’huile d’olives.

Olivier Rives indique que : « Pour l’instant, nous ne les intéressons pas car pour les verriers nous n’avons pas des achats de bouteilles assez massifs. Il faut des commandes dépassant le million de bouteilles ».

Que ce soit en Algérie où à l’étranger comme la remise en fonctionnement d’un four peut prendre un mois, les verriers préfèrent maximiser les « runs » et confectionner de longue série par moule sur des chaînes de production qui travaillent 24 heures sur 24 heures.

À l’étranger, certaines références ne sont produites que tous les 4 à 5 mois. Par ailleurs, chaque modèle de bouteille nécessite la mise au point d’un moule spécifique dont le montant peut atteindre 60.000 euros. Seule solution, que les moulins s’associent en groupement économique pour passer de grosses commandes aux verriers locaux et avancer les fonds nécessaires.

Aussi, le Pôle Soummam s’oriente vers une alternative : des bidons métalliques. Olivier Rives confie à TSA : « Dans un premier temps, nous allons nous orienter vers les métalliers en Algérie. Ils peuvent nous produire des emballages de 25, 50, ou 75 centilitres en métal comme de petits bidons très élégants ».

Ce type de bidon devrait notamment permettre de bien valoriser des huiles premium, notamment à l’exportation où ces contenants sont très présents.

L’obsession du Pasa est de sortir du plastique même si une période de transition est nécessaire avec l’utilisation de plastique PET. Pour le Pasa, le problème vient des phtalates libérés par le plastique, et donc de « migration des phtalates dans l’huile d’olive ». En attendant la production locale de bouteilles en verre opaque, la solution passe donc par le métal et les importations de bouteilles.

L’huile tunisienne Terra Delyssa contaminée aux phtalates

C’est là un problème que connaît l’huile tunisienne Terra Delyssa, une marque aujourd’hui présente dans de nombreuses grandes surfaces en France. Elle a récemment été épinglée, ainsi qu’une vingtaine d’autres marques, par la revue 60 millions de consommateurs.

Dans son numéro du mois de mai dernier, la publication indique que sur 24 marques d’huile d’olives commercialisées en France, 23 contiennent des résidus de plastifiants dont du diéthylhexylphtalate (DEHP), une substance considérée comme cancérigène et des traces de dibutyl phtalate (DBP) classé comme perturbateur endocrinien.

Quatre des marques testées, dont Terra Delyssa, contenaient à la fois les 2 phtalates les plus problématiques. Si le label bio est une garantie de l’absence de résidus de produits phytosanitaires, concernant les plastifiants, « aucune huile n’est (…) à l’abri de ce type de contamination, bio ou conventionnelle », ajoutait la publication.

Selon la revue 60 millions de consommateurs, les contaminations pourraient être liées aux « cuves, bâches ou tuyaux utilisés lors du stockage ou du transport des huiles ».

Pour sa part, le Pasa devrait bientôt réceptionner à Takertiez près de Sidi Aïch (Bejaia), un ensemble de 4 laboratoires ultra-modernes destinés aux analyses d’huile d’olive et la recherche de l’éventuelle présence de contaminants.

Ces installations devraient être accréditées par l’organisme national de la qualification Algerac et soumises à l’agrément du Conseil oléicole international (COIL) « qui est le grand gendarme international pour la qualité de l’huile » comme le note Olivier Rives.

Peignes vibreurs, contenants en verre ou en métal, laboratoires d’analyses, la filière oléicole en Algérie poursuit sa modernisation.

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