Ancien président de l’APN, Abdelaziz Ziari lance un appel au président Abdelaziz Bouteflika pour la tenue d’un nouveau congrès pour résoudre les problèmes de fond du FLN.
Un nouveau mouvement de contestation commence à prendre forme au FLN pour l’organisation du Comité central dans les plus brefs délais afin d’élire un nouveau secrétaire général. Est-ce une bonne chose pour le parti ?
D’abord, je comprends parfaitement ce mécontentement des cadres du FLN qui est général et qui concerne tous les militants du parti. Nous constatons des dérives au quotidien. La dernière a été l’annonce faite par le secrétaire général concernant le bilan du crash d’un avion militaire (présence de ressortissants sahraouis dans l’avion). Chose qui relevait normalement des prérogatives du ministère de la Défense nationale. Cela dévoile un sens de responsabilités qui est défectueux. Ensuite, si cette réunion du Comité central servira à enlever un tel et ramener un autre, elle ne résoudra pas les problèmes de fond du FLN. Pour moi, elle n’aura aucun intérêt dans ces conditions.
Pourquoi ?
La crise du FLN a commencé depuis quelques années. Et l’état de déliquescence et de délabrement du parti n’est que la conséquence de l’absence de légitimité de la direction actuelle et des problèmes de fond qui n’ont pas été résolus de façon sérieuse. Ces derniers sont liés au fonctionnement du parti qui doit être démocratique. Toutes les fonctions de responsabilités doivent être électives. Quand les responsables seront dotés de toute cette légitimité démocratique, ils ne répondront que devant ceux qui les ont choisis. On pourrait ensuite se pencher sur les problèmes de fond qui concernent le pays. C’est-à-dire du programme du parti lui-même avec lequel il affrontera l’avenir et ses défis. Jusque-là et pour des raisons notamment historiques, l’évolution ne s’est pas faite dans ce sens. Aujourd’hui, soit on évolue, soit on disparait.
Comment le FLN pourrait solutionner ses problèmes de fond et évoluer dans ce sens ?
Il peut résoudre ses problèmes à travers un congrès politique comme nous le demandons depuis quelques années. Ce congrès viendrait mettre à plat tous les problèmes qui n’ont pas été résolus en particulier ceux liés à la légitimité de sa direction et à la nécessité de s’orienter vers une nouvelle étape historique afin de devenir un parti de pouvoir et non un parti du pouvoir. Il s’agit de faire un parti au sens le plus complet du terme pour aborder l’avenir. Un cycle historique s’achève avec les maquisards et les moudjahidine qui ont participé à la guerre de libération nationale et qui ont continué à assumer leurs responsabilités, jusqu’à ce jour, au niveau le plus haut au sein de l’État.
Le FLN doit être prêt à aborder le nouveau cycle en devenant un vrai parti concerné par tous les aspects de la vie économique, politique et sociale du pays. Le parti doit être une source de décisions et non une espèce de comité de soutien qui approuve ce qui se décide par ailleurs et en dehors de ses rangs. Il doit être une pépinière politique afin qu’on n’aille pas chercher les ministres dans l’administration. Personnellement, je comprends parfaitement le choix actuel quand on voit la pauvreté du débat politique et la pauvreté de la classe politique. Cette situation ne doit pas durer. Il faut trouver des solutions pour ne pas affronter des crises comme celles qu’on a connues par le passé.
Qui est le responsable de la situation dans laquelle se retrouve le parti aujourd’hui ?
Je crois que nous sommes tous responsables. Après le départ d’Abdelaziz Belkhadem, il y a eu une tentative d’aller vers cette transition. C’était l’occasion et l’opportunité de mettre à plat tous ces problèmes. Elle a été avortée. Cela dit, rien n’est trop tard. Le chef de l’État qui est président du FLN a toute l’autorité morale et politique pour exiger la préparation et l’organisation d’un congrès du FLN dans les meilleurs délais afin de permettre au parti de se mette en ordre de combat politique et d’aller vers les prochaines étapes.
Est-ce que c’est un appel au président de la République pour la tenue de ce congrès ?
Oui, c’est le souhait de la majorité des cadres et militants patriotes du FLN.
Djamel Ould Abbes a annoncé que le président de la République sera le candidat du parti en 2019. Comment interprétez-vous cette déclaration ?
Je peux vous affirmer qu’il n’est pas mandaté. Cette annonce n’étonne personne puisqu’elle est parfaitement conforme au personnage. Faisant face à des mouvements de contestation au sein du parti, le secrétaire général lance, à travers cette annonce, une sorte d’appel au secours au chef de l’État. C’est aussi simple.
Le secrétaire général du FLN a beaucoup communiqué sur l’élaboration du bilan du président. Pourquoi faire le bilan une année avant la fin du quatrième mandat ?
Je pense qu’il est nécessaire de revenir aux fondamentaux. Le chef de l’État s’est toujours présenté comme un indépendant qui a toujours eu le soutien de plusieurs partis politiques. Donc c’est le chef de l’État qui fait le bilan. D’ailleurs, il a tous les éléments à sa disposition pour le faire. Pour Djamel Ould Abbes, je pense qu’il veut donner du travail aux cadres et militants du parti après la fin des élections législatives et locales. En même temps, il s’adonne à un jeu pervers avec le secrétaire général du RND, qui est également Premier ministre, à travers une surenchère politicarde de bas étage. Il a fait du RND, qui est également un support de la politique du chef de l’État et qui a toujours été présent à ses côtés, un ennemi au sein du gouvernement.
Comment expliquez-vous cette animosité ?
Je l’explique par la compétition et la crainte de voir demain émerger un candidat (en la personne d’Ahmed Ouyahia). C’est en tous cas très malsain ce qui se fait dans ce cadre. Le pays a besoin d’une gouvernance forte et solidaire pour faire face à la situation économique et financière du pays.
Samedi, le Premier ministre a lui aussi annoncé la présentation du bilan à la fin de l’année…
C’est le responsable d’un gouvernement. Il a les outils et les éléments pour présenter le bilan.
Pourquoi cette précipitation dans l’élaboration de ce bilan par plusieurs parties ?
Il y a une mauvaise coordination et de la surenchère politicienne de partout propre à la période pré-électorale que nous vivons.
Soutiendrez-vous un cinquième mandat du président Bouteflika ?
Je vous l’ai dit et je n’ai pas changé d’avis. Si le chef de l’État qui est actuellement responsable du devenir de 45 millions d’Algériens, pour vous dire à quel point cette responsabilité est lourde, estime en son âme et conscience, avoir les moyens et la possibilité de continuer un autre mandat et qui le souhaite, je le soutiendrai.
Pour vous, la décision n’a pas encore été prise ?
Pas encore. Ce n’est pas encore évident.