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Face à la crise économique, l’Algérie en manque de solutions

Face à la crise économique, l’Algérie en manque de solutions

« Les réserves de devises de l’Algérie continueront d’augmenter, si les prix du pétrole restent supérieurs à la barre des 50 dollars, le prix sur lequel est basé la confection de la Loi de finances de l’année prochaine ». Ces propos ont été tenus en novembre dernier par Mohamed Loukal, en marge d’une réunion internationale à Tunis.

Mohamed Loukal était à cette époque Gouverneur de la Banque d’Algérie. La bourde avait été timidement corrigée par la Banque centrale. Mais elle illustrait le peu de maîtrise qu’avait le Gouverneur des questions économiques, particulièrement celle des mécanismes d’évolution des réserves de change, un sujet sensible et important dans le pays.

Aujourd’hui, le même Loukal est aux commandes du ministère des Finances dans le gouvernement Bedoui. C’est lui qui est actuellement en charge de plusieurs dossiers économiques et financiers : élaborer une loi de finances 2020, réduire le déficit de la balance des paiements, stopper l’érosion des réserves, trouver des solutions aux entreprises en difficulté…

Mohamed Loukal va agir dans un contexte de crise sans précédent depuis au moins 15 ans. Les caisses de l’État se vident et les cours du pétrole, principale source de revenus du pays, restent coincés autour de 60 dollars, soit le prix de référence retenu dans la Loi de finances.

Dans le gouvernement Bedoui, un deuxième ministre est en première ligne dans la gestion de la crise actuelle : Said Djellab. En charge du Commerce, il est en charge du dossier des importations et donc de la réduction du déficit de la balance commerciale.

Depuis son arrivée au gouvernement, en avril 2018, sous Ahmed Ouyahia, Djellab a multiplié les expérimentations, avec notamment la mise en place d’une liste de près de 1000 produits interdits à l’importation, remplacée par une taxe additionnelle.

Près d’un an après sa mise en place, cette « stratégie » n’a eu aucun effet sur la balance commerciale. Bien au contraire, l’Algérie a vu son déficit commercial se creuser à fin juin 2019 pour atteindre 3,18 milliards de dollars contre un déficit de 2,84 milliards à la même période en 2018. Même si les importations sont en baisse d’environ 4% au cours des 6 premiers mois de l’année, elles ont encore atteint 22,14 milliards de dollar de janvier à juin dernier. En glissement annuel, elles devraient atteindre près de 45 milliards sur l’ensemble de l’année 2019.

Said Djellab est également le principal artisan de la « stratégie nationale d’exportation » (SNE) annoncée en grande pompe depuis près d’une année par le gouvernement. On a vu le ministre se rendre dans plusieurs pays notamment la Mauritanie, à la tête de délégations de chefs d’entreprises, promettant un décollage rapide de nos importations hors hydrocarbures. Mais les derniers chiffres des Douanes font état d’une baisse de 10% de nos exportations non pétrolières, à 1,31 milliard de dollars au 1er semestre 2019. Bien sûr, le gouvernement n’a pas commenté cet échec. Il n’a pas dit comment il compte adapter sa stratégie en matière d’exportations. Peut-être a-t-il déjà abandonné l’expérience ?

« On continue encore à croire que régler le problème du déficit dépendrait seulement de la régulation des importations et leur réduction. Or, équilibrer la balance reviendrait aussi à booster la production et le volet économique, c’est-à-dire créer de la richesse et susciter l’investissement », rappelle l’économiste Smail Lalmas dans un entretien ce mercredi à TSA. « C’est bien beau de réguler et maîtriser les importations, mais d’un autre côté, il faut développer la production et la diversifier de sorte à régler le problème des importations de façon technique », ajoute-t-il.

C’est sans doute sur cet aspect que le gouvernement aura beaucoup de mal à agir. Sans légitimité populaire et dans un contexte de crise politique marqué par des poursuites judiciaires contre de nombreux chefs d’entreprises et des cadres de l’État, le gouvernement peine à convaincre les investisseurs nationaux et étrangers. Depuis le début de l’année, les investissements sont presque à l’arrêt et les banques n’accordent plus de crédits. Discrète, la nouvelle ministre de l’Industrie et des Mines, Djamila Tamazirt, n’a pas de stratégie connue. Sa seule décision a concerné la limitation des importations de kits pour le montage des véhicules.

Pour ne rien arranger, l’équipe gouvernementale est dirigée par Noureddinne Bedoui, un ancien wali dont les compétences en matière d’économie restent sommaires. D’ailleurs, hormis des généralités sur la sauvegarde des entreprises en difficulté et la limitation de l’érosion des réserves de change, le Premier ministre ne s’est pas encore exprimé sur les questions économiques.

Il n’a pas encore dit comment il compte élaborer le budget 2020 sans recourir à une utilisation massive de la planche à billets, une forte dévaluation du dinar ou un retour à l’endettement extérieur. Il est également attendu sur la question du maintien des subventions et du train de vie de l’État.

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