Société

Flambée du covid-19 en Algérie : la cote d’alerte ?

La scène se déroule à l’entrée de l’hôpital « Fabour » de Blida. Elle fait froid dans le dos. Une ambulance transportant des bouteilles d’oxygène arrive en catastrophe pour approvisionner cet hôpital en ce produit vital pour les malades covid-19.

On entend un soignant se féliciter de l’arrivé de l’oxygène à l’hôpital Fabour qui en manquait beaucoup. La gravité de la situation épidémique liée au covid-19 en Algérie est illustrée par cette vidéo qui a été largement partagée.

| Lire aussi : Flambée du covid-19, pass vaccinal : entretien avec Bekkat Berkani

Depuis début juillet, le nombre de contaminations quotidiennes au covid-19 en Algérie ne cesse d’augmenter d’une manière inquiétante. La barre des 1200 nouveaux cas a été frôlée vendredi 16 juillet. Celle des 400 a été franchie le 1er juillet.

1197 nouvelles contaminations  ont été diagnostiquées, soit un niveau jamais atteint depuis le début de l’épidémie en Algérie.

Au plus fort de la vague de l’automne dernier, l’Algérie avait enregistré 1133 nouveaux cas dans la journée du 24 novembre 2020.

Ce n’est pas tant ce chiffre de 1200 contaminations qui inquiète, puisque certains pays comptent les nouveaux malades par dizaines de milliers, mais cette tendance à la hausse qui s’inscrit dans la durée et le risque, bien réel, d’une situation incontrôlable.

L’inquiétude est nourrie par le peu de cas fait par les citoyens du respect des mesures barrières, la faible cadence de la vaccination et la non-conformité des chiffres annoncés avec la réalité du terrain.

Des spécialistes dont on ne peut douter du sérieux et de la rigueur ont expliqué que seuls les cas détectés par le test PCR dans les structures hospitalière sont pris en compte dans les bilans quotidiens, or une grande partie des malades se fait dépister par d’autres types d’examen, dont les tests sérologiques et antigéniques.

Du reste, de nombreux malades ne se font pas dépister du tout, se contentant de prendre en pharmacie le traitement anti-covid, maintenant connu de tous.

Les chiffres annoncés sont « la déclamation des cas PCR positifs notifiés. Il m’est arrivé déjà de dire qu’il y avait probablement beaucoup de cas qui échappent aux statistiques, soit parce que les gens ne faisaient pas de PCR, soit parce que les gens étaient vus dans le secteur privé et n’étaient pas comptabilisés », expliquait à la fin du mois dernier l’épidémiologiste Mohamed Belhocine, membre du Comité scientifique chargé de la lutte contre le covid-19.

Jusqu’où ira cette nouvelle vague ? Tous les scénarios demeurent possibles, répondent les spécialistes, y compris le pire. À moins d’un sursaut de conscience et d’une plus grande fermeté des autorités pour faire respecter les mesures de prévention, la situation risque de se dégrader dangereusement.

Hélas, pour le moment, l’heure ne semble pas être à la vigilance. Les images des marchés de bestiaux bondés de monde à l’approche de l’Aïd ne prêtent pas à l’optimisme.

Dans d’autres lieux publics, les mêmes comportements répréhensibles subsistent. Même si le masque de protection a fait sa réapparition avec la montée du nombre de contaminations, il n’est toujours pas porté systématiquement dans les commerces, les marchés et dans la rue.

« La population a décidé d’elle-même de la fin de l’épidémie », pour reprendre l’expression de Dr Bekkat Berkani, lui aussi membre du Comité scientifique.

Mais la population n’est pas la seule à blâmer. Les autorités aussi ne montrent pas la même fermeté qu’au début de la pandémie.

« Il y a un certain laxisme de la part des autorités quant à appliquer la loi. Quand on voit un transport public passer devant l’autorité publique avec aucun passager qui porte le masque y compris le chauffeur, là il y a un problème d’application de la loi », regrette Bekkat Berkani.

La situation est grave, mais pas désespérée

Or, non seulement le covid n’est pas derrière nous, mais il est encore plus dangereux avec cette nouvelle souche plus virulente et plus contagieuse qu’on appelle le variant Delta.

Un seul malade peut contaminer huit personnes, mettait en garde récemment le professeur Faouzi Derar, directeur de l’Institut Pasteur d’Algérie. Dans les structures hospitalières, on frime la saturation.

Les services d’autres pathologies sont dédiés au traitement du covid, l’oxygène vient parfois à manquer.

Tous les ingrédients sont-ils donc réunis pour une explosion exponentielle ? Cela semble être le cas, mais la situation n’est pas désespérée. Il y a en effet des motifs de croire que le scénario d’une dégradation incontrôlable de la situation n’est pas une fatalité.

Il y a d’abord la vaccination, qui n’a pas encore atteint le rythme souhaité mais qui avance à une meilleure cadence que celle des premiers mois de son lancement.

Le vaccin est disponible et les citoyens sont de moins en moins réticents à se faire vacciner. Dans certains centres de vaccination d’Alger, il faut se présenter très tôt le matin pour avoir sa dose. À ce rythme, une partie non négligeable de la population sera vaccinée dans les prochains mois, d’autant que le problème d’approvisionnement en doses ne semble plus se poser.

Il y a lieu aussi d’espérer un meilleur respect des mesures barrières dès maintenant et plus de fermeté des autorités dans l’application de la loi. Les Algériens l’avaient bien fait au début de la pandémie, permettant d’enregistrer une situation des plus stables au monde, il n’y a pas de raison qu’ils ne le fassent pas maintenant que la situation s’est mise à se dégrader dangereusement.

 

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