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Gestion de l’argent public : ce que révèle le rapport de la Cour des comptes

Gestion de l’argent public : ce que révèle le rapport de la Cour des comptes

Le dernier rapport d’appréciation de la Cour des comptes pour 2015 dont TSA détient une copie révèle de nombreux dysfonctionnements, un manque de maîtrise et de prévision de l’État dans la gestion de l’argent public.

En matière de fiscalité, l’institution revient sur le coût des exonérations accordées aux entreprises qui a atteint en 2015 « un total de 301,839 Mrds de DA ». « Ces exonérations sont réparties par nature d’impôts et taxes, comme suit : la TAP : 3.862.736.407 DA ; l’IBS : 2.114.982.278 DA ; la TVA : 289.724.759.168 DA », précise-t-elle.

« L’importance des exonérations accordées par l’administration fiscale appelle des efforts supplémentaires dans le suivi des projets d’investissement pour réduire les préjudices infligés au Trésor public », signale la Cour des comptes qui évoque notamment le « non-respect de certains promoteurs de leurs obligations ou engagements en raison de l’absence de contrôle des réalisations desdits projets d’investissement ».

Manque de coordination

Cette situation « s’est aggravée également par une défaillance dans la coordination entre les différents intervenants ; douanes, impôts, domaines et les organismes nationaux pour soutenir les investissements », selon elle. « Ce qui a amené certains investisseurs à détourner les projets de leur destination initiale et, dans certains cas, à la cession des équipements acquis dans ce cadre », assure la Cour des comptes.

Pour la Cour, les avantages fiscaux « continuent à être attribués par l’administration fiscale sans distinction entre les phases de réalisation et d’exploitation et les cas de création ou d’extension de l’activité ». « Cet état a engendré : l’octroi d’avantages indus ; l’autorisation d’exonérations, pour certains contribuables, en l’absence de décisions d’octroi de ces avantages, le défaut de procéder à des inspections sur terrain pour s’assurer du respect des investisseurs de leurs engagements », poursuit la même source.

Manque d’évaluation

Au chapitre des dépenses budgétaires, la Cour des comptes pointe encore une fois du doigt les « réajustements qui ne tiennent pas compte des besoins réels ». « La fixation des dotations budgétaires allouées à certains chapitres ne répond pas toujours à des besoins suffisamment évalués, ce qui est loin de se conformer aux prescriptions de la note d’orientation du ministère des Finances », écrit la Cour qui ajoute que cette « remarque » qui traduit « une prévision peu maîtrisée », est « illustrée par le taux de consommation relativement faible réalisé sur certains chapitres et les reliquats importants dégagés sur ceux ayant bénéficié de réajustements de crédits ».

Dépassements de crédits

La Cour des comptes signale aussi les « dépassements des crédits enregistrés au titre de l’exercice 2015″. D’un montant de 99,319 milliards de dinars, ils sont « en hausse de 111,86% par rapport à 2014 (46,794 Mrds de DA) ». «  Par ministère, les dépassements les plus marquants ont été enregistrés au niveau des ministères : de l’Aménagement du territoire, du Tourisme et de l’Artisanat (9,478 Mrds de DA), des Moudjahidine (4,010 Mrds de DA), de l’Intérieur et des Collectivités locales (4,180 Mrds de DA), des Travaux publics (2,200 Mrds de DA), de l’Habitat et de l’Hrbanisme (1,708 Mrds de DA) et au niveau du BCC (74,860 Mrds de DA) », détaille-t-elle.

Une exception devenue une règle

La Cour des comptes rappelle que ces dépassements ne sont pas interdits par la loi Ils sont « autorisés par les articles 27, 28 et 29 de la loi 84-17 ». « Il n’en demeure pas moins que la récurrence, de certains d’entre eux, est due dans plusieurs cas, au mauvais traitement des dossiers à la charge de l’administration et à l’inobservation de la réglementation relative à la comptabilité publique, notamment, l’engagement des dépenses dans la limite des crédits disponibles », relève-t-elle.

47% d’occupation des lits dans les hôpitaux

Dans le chapitre consacré aux transferts sociaux qui représentaient 9,10% du PIB en 2015 (en hausse de 6,58 % par rapport à 2014), la Cour des comptes est revenue sur les crédits accordés en « inadéquation par rapport au nombre de lits occupés ». « Le taux moyen d’occupation des lits pour les établissements publics hospitaliers (E.P.H), répartis sur le territoire national, au nombre de 200 établissements, est de 47,13%, ce qui correspond à 15.517 lits non exploités durant l’exercice 2015 sur 32.924 lits organisés », explique-t-elle.

« La répartition des crédits selon l’activité est de nature à encourager l’exploitation optimale des structures sanitaires. En rapportant les crédits octroyés au nombre de lits organisés, il ressort une disparité importante entre les crédits par lit qui varie entre 1.065.776,22 DA et 27.127.161,29 DA. Il en est de même pour le taux d’occupation de lit qui oscille entre 6,71 % et 197 % », indique-t-elle.

« L’Anem n’a pas poursuivi le paiement des salaires »

Sur le dispositif d’aide à l’insertion professionnelle (DAIP), la Cour des comptes évoque les « résultats insuffisants et objectifs non atteints », par l’Anem. « D’après la situation présentée par la Direction générale de l’Emploi et l’Insertion, le taux de placement dans le secteur économique ne représente que 22,12% du total des bénéficiaires du dispositif, à fin 2015, totalisant 555.675 dans les différentes formes de contrats. Il est constaté également que la part de vingt (20) wilayas dont 10 wilayas situées au Sud du pays n’a pas dépassé 27,15% du total des postes réalisés, ce qui équivaut à 150.905 postes pourvus », assure l’institution.

« Cet écart important entre les objectifs fixés et les réalisations est un indicateur clair de la mauvaise planification et le manque de capacité de l’Anem à atteindre les objectifs tracés, ce qui a entraîné l’accumulation d’énormes ressources financières dans les comptes de l’Anem sans exploitation. Le solde au 31/12/2015 s’élève à plus de 73 Mrds de DA du total des fonds mobilisés au cours de la même année, qui dépassent 155 Mrds de DA, y compris le solde de l’année 2014 », poursuit-elle.

La Cour des comptes affirme également que l’Anem « n’a pas poursuivi, en coordination avec les directions de l’emploi de wilaya, le payement des salaires des bénéficiaires du DAIP disposant de contrats en vigueur pour l’année 2015, et l’engagement à concrétiser les objectifs déclarés dans le plan du gouvernement de l’année 2015 ».

Des ministères qui ne déclarent pas leurs fonctionnaires

Dans son rapport, la Cour des comptes révèle un dysfonctionnement assez surprenant dans certains ministères : la non-déclaration des fonctionnaires. « L’examen du dossier portant sur les déclarations et paiements des cotisations de sécurité sociale par les ministères du Travail, la Solidarité nationale, la Jeunesse et Sport, la Communication, la Santé et les Moudjahidine, a donné lieu aux observations suivantes : non déclaration des salaires et des salariés », souligne-t-elle. « Les ministères cités plus haut n’ont pas procédé à la souscription de la déclaration annuelle des salaires et des salariés », assure-t-elle.

La Cour des comptes note aussi « le défaut de déclaration des cotisations concernant la prime de rendement et les indemnités (rappels) versées aux fonctionnaires permanents et contractuels au ministère de la Jeunesse et des Sports ». L’institution mentionne également le « non-respect des délais de déclarations des cotisations de la sécurité sociale à la CNAS ». « Au niveau du ministère de la Solidarité nationale, le retard est situé entre 01 et six (06) mois. Au ministère du Travail, les cotisations de janvier et février 2015 ont été déclarées en date du 16/04/2015, et les cotisations de mars, avril, mai et juin ont été déclarées en date du 30/07/2015. Au ministère de la Communication, les cotisations du mois d’août, septembre, octobre, novembre et décembre n’ont été déclarées qu’en fin janvier 2016 », indique-t-elle.

La Cour des comptes explique que « cette pratique peut remettre en cause l’exactitude du montant des cotisations mensuelles devant être versées à la CNAS et altère la fiabilité de sa comptabilité’.

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