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« Il faut revoir le cahier relatif à l’importation des véhicules neufs »

« Il faut revoir le cahier relatif à l’importation des véhicules neufs »

Le président de l’Apoce, Mustapha Zebdi, aborde dans cet entretien la hausse des prix des produits de large consommation, les pratiques commerciales frauduleuses, les prix excessifs des véhicules sur le marché algérien…

Vous avez lancé une alerte quant à une hausse injustifiée des prix des produits de première nécessité. Qu’en est-il au juste et quels sont les produits touchés par cette augmentation ?

Tout à fait, c’est un constat que nous avons fait. Il est vrai que les hausses sont variables, des produits connaissent une légère hausse tandis que d’autres flambent carrément. Prenons l’exemple des pâtes dont les prix ont augmenté de 30 à 40%. Pour nous, il y a des hausses qui sont justifiées, d’autres qui ne le sont pas. Des hausses qu’on peut observer sur certains légumes. À l’Apoce, nous ne voyons aucune raison d’une hausse des prix des légumes secs. A chaque fois, on nous ressort la rengaine de la dévaluation du dinar. Par ailleurs, des commerçants sont en train de parler des effets de la LF2021 alors qu’elle n’est pas signée. Cette situation reflète l’état du commerce en Algérie qui est dominé par la spéculation et on assiste à des pratiques abusives durant cette conjoncture (sanitaire) particulière. Les victimes sont les ménages aux bas revenus. Une famille de 5 membres dépense pour 8 000 DA/mois en produits d’hygiène et de protection contre le coronavirus.  Les dépenses des ménages pour les produits essentiels grèvent leur budget. Beaucoup de commerçants ont profité de la conjoncture exceptionnelle que nous vivons pour augmenter les prix. C’est pourquoi, nous appelons depuis des années à plafonner la marge de bénéfice surtout pour les produits importants. Le marché local est anarchique où la spéculation est la règle. Moraliser ce secteur du commerce nécessite du temps mais nous n’allons pas laisser le simple consommateur souffrir.

A ce tableau noir s’ajoute le problème de l’absence de facturation, donnant lieu à des pratiques commerciales qui échappent à tout contrôle…

Cette pratique pose un problème de traçabilité. Même pour connaître où se situe la faille à l’origine de la spéculation, on trouve que les gens ne veulent pas travailler avec des bons de transactions commerciales, malgré l’existence d’un texte dont l’application qui est gelée depuis 3 ans. Personne ne veut travailler dans la transparence. D’autant que l’entrée en vigueur du paiement électronique, qui était prévue pour la fin de l’année en cours, est encore loin.

Que fait le gouvernement dans ce cas ?     

Écoutez, il y a une volonté politique pour plus de transparence et pour essayer de redresser la situation. Mais à l’échelle locale, rien ne suit. Il subsiste encore ces comportements bureaucratico-administratifs au point où l’on sent qu’il y des résistances au changement. Le discours sur le changement espéré on le voit, mais concrètement on est en train de constater les mêmes comportements bureaucratiques, et je crains qu’il y ait un long chemin à faire.

Depuis quelques temps aussi, on signale des pénuries de médicaments dans les officines. Vous-même avez tiré la sonnette d’alarme…

Nous avons effectivement constaté qu’il y a des médicaments qui sont sous pression et d’autres carrément en pénurie. On entend parler de cette histoire de vente concomitante (que certains grossistes et distributeurs imposent aux pharmaciens, ndlr), mais jusqu’à ce jour nous n’avons vu aucun pharmacien porter plainte contre un grossiste pour vente concomitante. Même les petits commerçants victimes de cette pratique sont en train d’entreprendre des démarches suite à nos conseils. Dans un secteur stratégique comme le médicament qui touche à la santé publique, ces pratiques existent sans qu’il y ait une dénonciation. Je dénonce et condamne cette situation. Car en fin de compte, c’est le malade qui paie. Nous incitons nos amis pharmaciens à dénoncer ces pratiques afin qu’elles cessent pour le bien du malade, de leur activité et de notre économie.

L’affluence dans les bureaux de poste est toujours aussi importante, malgré le contexte sanitaire lié au Covid-19, et en dépit des assurances des officiels sur la disponibilité des liquidités. Quel est votre commentaire ?     

Nous avons déjà dit que lorsqu’Algérie Poste a de l’argent elle le distribue aux citoyens. Le problème c’est qu’Algérie Poste n’a pas d’argent. Cette question dépasse cette institution. Tout le problème est dans le manque des liquidités. Algérie Poste reçoit l’argent et le distribue. Depuis le début de l’épidémie, on était les premiers à appeler les pouvoirs publics en vue de faciliter l’octroi des cartes de paiement électronique. Aujourd’hui, où en sont ces facilitations ? Si on veut résoudre le problème des liquidités, il faut promouvoir le paiement électronique, notamment auprès des personnes âgées.

On en vient à présent aux véhicules dont les prix ont flambé. Quelle est la situation ?  

On a atteint des sommets en termes de prix des véhicules avec des chiffres jamais atteints auparavant. Le prix dépend du type de véhicule, son état et l’année de fabrication, etc. Il y a une hausse considérable des prix des voitures. L’une des raisons qui peut expliquer ce phénomène c’est qu’il n’y a pas eu de véhicules neufs mis sur le marché. Les usines de montage sont à l’arrêt depuis une année. Et même l’alternative qui était celle de l’importation des véhicules de moins de 3 ans est compromise. Conséquence : un manque flagrant des véhicules et une hausse considérable des prix. J’aouterai qu’un problème de sécurité routière va se poser incessamment du fait que le parc automobile national doit être renouvelé. Si les pouvoirs publics ont l’intention de laisser les opérateurs importer les véhicules neufs et les revendre, nous pensons qu’il faut réviser le cahier de charges y afférent afin que les véhicule soient à la portée de tous les citoyens. Dans le cas contraire, nous demanderons à ce qu’on autorise l’importation des véhicules de moins 3 ans voire de moins 5 ans. C’est aussi simple que cela.

Pourquoi vous réclamez la révision du cahier de charges relatif à l’importation des véhicules neufs ?

Nous avons émis des critiques concernant la remise en cause de certains acquis par rapport au décret exécutif de 2015. Le nouveau texte est presque identique au précédent, hormis quelques modifications. Il y a certains acquis en faveur du consommateur qu’on a perdus avec le nouveau décret. Je cite un exemple. Dans le texte de 2015, une disposition stipule que si le véhicule n’est pas livré dans les délais, le client se voit indemnisé à hauteur de 10% du coût total du véhicule. Dans la nouvelle version, le client est indemnisé à 10% de l’acompte versé (la somme versée). Un autre exemple : le nouveau cahier des charges exige du concessionnaire une très grande surface (showrooms) avec l’obligation qu’elle soit son bien propre. Nous pensons que ce ne sont pas tous les concessionnaires qui pourront répondre à cette exigence. Qui va alors payer la différence ? Après tout il s’agit d’un investissement et la différence c’est le consommateur qui va la payer sachant que le véhicule coûtera plus cher. Ce sont là quelques modifications qu’on voit nécessaires pour faciliter l’acte d’importation et préserver le droit du consommateur à un prix abordable.

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