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La nouvelle « dimension stratégique risquée » du conflit en Syrie

La nouvelle « dimension stratégique risquée » du conflit en Syrie

Russes tués par la coalition dirigée par les Américains, premier affrontement direct israélo-iranien… Le conflit en Syrie a pris une « dimension stratégique risquée » qui pourrait toutefois permettre de forcer un accord de paix, selon des diplomates optimistes de l’ONU.

La semaine dernière, des frappes de la coalition ont tué cinq Russes dans l’est de la Syrie, selon Moscou. Quelques jours plus tard, Israël a perdu un avion F-16 lors de représailles contre des cibles militaires syriennes et « iraniennes » après l’interception d’un drone présumé iranien.

Paradoxalement, ces évènements graves et inédits n’ont pas suscité de fortes réactions internationales pas plus qu’une convocation en urgence du Conseil de sécurité censé garantir la paix mondiale.

« Les ingrédients pour une confrontation régionale voire internationale potentiellement majeure sont réunis aujourd’hui et le risque doit être pris très au sérieux », résume cependant pour l’AFP l’ambassadeur français à l’ONU, François Delattre.

Depuis la destruction du drone, « il n’y a pas eu d’escalade », relativise un homologue du Conseil sous couvert d’anonymat. Mais il existe désormais un « risque de confrontation directe entre Etats-Unis et Russie avec morts d’hommes à la clé », souligne un autre diplomate.

– Main russe –

Une réunion mercredi du Conseil de sécurité, d’abord publique puis à huis clos, consacrée à la Syrie a laissé transparaître un tournant. Les expressions, subtile mélange de tension et de prudence, ont convergé vers un point: chercher l’unité pour calmer le jeu.

« La paix est urgente en Syrie », a souligné l’ambassadrice américaine Nikki Haley, s’en prenant comme de coutume à l’Iran.

Bête noire de Washington, Téhéran est accusé avec ses « combattants importés du Liban, d’Irak et d’Afghanistan » d’être « engagé dans un jeu dangereux pour repousser les limites, au lieu de s’engager pour la paix de manière responsable », a-t-elle ajouté.

Interrogé par des journalistes sur le risque d’une déflagration internationale majeure, l’ambassadeur russe à l’ONU Vassily Nebenzia a souligné que l’approche de son pays était à l’opposé.

« Nous faisons tout ce que nous pouvons pour empêcher une confrontation internationale majeure en Syrie et travaillons dur à ce sujet », a-t-il assuré.

« Personne n’a fourni un effort aussi important que le nôtre pour le processus politique », a-t-il ajouté, citant les relations de Moscou avec Damas et l’opposition, les « zones de désescalade » et les négociations à Astana et Sotchi pour faciliter, selon Moscou, celles de Genève.

Selon un autre diplomate, la Russie, après son investissement militaire en Syrie, perd la main. Son influence sur Damas reste relative comme le prouve une récente mise en cause par le régime syrien du résultat de Sotchi visant à créer un comité pour modifier la Constitution. Damas refuse que sa composition soit dictée par l’ONU.

– ‘Heures sombres’ –

Moscou ne semble par ailleurs pas voir d’un très bon oeil l’Iran s’implanter en Syrie et risquer des accrochages réguliers avec Israël. Dans les réunions non publiques, la Russie, qui arrive peut-être au bout de son engagement militaire et financier, parle de sa volonté de sortir du conflit, assure n’avoir pas d’agenda caché, allant jusqu’à réclamer de l’aide aux Occidentaux pour convaincre Damas, ajoute la même source.

Une posture plutôt nouvelle après ses veto fin 2017 à des textes de l’Occident mettant à mal le régime syrien.

« Le chemin vers la paix viendra lorsque toutes les parties arrêteront de se provoquer l’une l’autre et choisiront une voie responsable », a estimé cette semaine Nikki Haley.

A cet égard, le risque de confrontation internationale majeure peut permettre un sursaut. Il « peut être un levier pour obtenir un accord de paix en Syrie, à un moment où les lignes commencent à bouger », a relevé M. Delattre.

Après sept ans d’une guerre meurtrière compliquée, impliquant de multiples acteurs régionaux et internationaux, « on est revenu aux heures les plus sombres », jugent plusieurs diplomates, égrenant la liste des zones assiégées de la Ghouta orientale, d’Idleb ou d’Afrine dans le nord du pays, cible d’une opération militaire turque contre une milice kurde alliée de Washington.

Cette opération a rendu les relations américano-turques explosives et participe à la nouvelle « dimension stratégique risquée » du conflit syrien. Les Etats-Unis et la Turquie sont deux partenaires-clés au sein de l’Otan, une alliance militaire dominée par Washington dont les intérêts sont aussi entrés en jeu dans l’évolution des rapports de force autour du conflit syrien.

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