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La surliquidité n’est plus qu’un souvenir : comment les banques ont été mises en difficulté

La surliquidité n’est plus qu’un souvenir : comment les banques ont été mises en difficulté

En Algérie, la situation de surliquidité des banques publiques n’est plus qu’un souvenir. L’excès qu’on disait « structurel » de liquidité des banques algériennes est  une tendance qui s’était imposée pendant près de 15 années. L’ancien Gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Laksaci, la faisait remonter à l’année 2002.

À la belle époque des surliquidités

Cette surliquidité était alimentée, d’une part, par l’importance des dépôts du secteur des hydrocarbures. Elle était, d’autre part, le résultat de l’augmentation de la collecte de l’épargne des particuliers, qui s’est développée à un taux moyen proche des 20% par an au cours de cette période.

L’action des pouvoirs publics en vue de résorber les surliquidités du secteur bancaire avait pris depuis le début de la décennie en cours des formes multiples. C’est ainsi qu’au début de l’année 2011, l’État a donné instruction aux banques publiques de miser massivement sur la micro entreprise en finançant notamment les dispositifs Ansej et Cnac pour un montant total supérieur à 5 milliards de dollars juqu’à aujourd’hui.

Une autre mesure a également été adoptée en 2011. Elle invitait fermement les investisseurs étrangers à recourir aux banques algériennes pour le financement de leurs projets, toujours dans le but de contribuer à la transformation de l’épargne locale en investissement.

Les banques publiques au secours du Trésor

Les décisions les plus lourdes de conséquences financières ont cependant été prises dans une période encore  plus récente. Depuis le début de l’année 2012, en vue d’utiliser leurs ressources financières excédentaires, les banques commerciales publiques ont en effet été sollicitées massivement pour financer les investissements réalisés dans les infrastructures économiques et sociales en lieu et place du Trésor public qui assurait encore presque exclusivement ce rôle jusqu’à une période récente.

C’est ainsi qu’on a vu d’abord la Cnep appelée au chevet de Sonelgaz dont elle finance désormais les investissements en mobilisant ses excédents colossaux. Un autre exemple est le rôle nouveau attribué, au printemps 2013, au CPA en tant que « banque du logement ». La banque publique du Boulevard Amirouche a pris, à ce titre, la tête de financements syndiqués assurés par l’ensemble des banques d’État  au profit de la relance des programmes AADL et de logements promotionnels publics dont les montants  devraient atteindre des niveaux considérables qui sont estimés aujourd’hui  à plus de 10 milliards de dollars .

La situation s’inverse en 2015

Autre mesure destinée à résorber les liquidités bancaires en excès dans les comptes des banques : en mai 2014 , un communiqué laconique de la Banque d’Algérie  annonçait que le taux des réserves obligatoires des banques avait  été porté  à 12% . C’était la deuxième augmentation décidée par la banque centrale dans un temps relativement court, la précédente ayant eu lieu en 2012 où le taux de réserves obligatoire avait bondi à 11% contre les 6,5% en vigueur depuis 2004 .

Mais depuis le début de l’année 2015, le changement de décor est complet. L’effondrement des recettes pétrolières conjugué à l’ensemble des nouveaux emplois attribués aux ressources des banques publiques ont fini par avoir raison des surliquidités des banques qui se trouvent désormais dans la situation inverse de « besoin de liquidité ». Elles ont même commencé au printemps 2016 à rechercher des financements auprès de la Banque d’Algérie qui a dû remettre en route les instruments de réescompte dont ses services avaient presque oublié l’usage.

C’est dans ce nouveau contexte de « besoin de liquidités » pour les banques publiques qu’est intervenu, l’année dernière, le lancement de l’emprunt obligataire d’État. Les banques publiques ont été invitées en 2016 à assurer son succès en souscrivant  la plus grande partie des obligations émises par le Trésor . Un investissement qui leur a coûté selon différentes sources plus de 400 milliards de dinars (environ 4 milliards de dollars).

Dans le but d’éviter que cette nouvelle obligation imposée aux banques d’État ne compromette leur capacité de financement de l’économie, la Banque d’Algérie a dû , en mai 2016, réviser en baisse le montant des réserves obligatoires en le ramenant au taux de 8%.Ce qui a permis de libérer approximativement l’année dernière, le même montant de ressources que celui demandé aux banques au titre du financement de l’emprunt d’État.

Une mesure insuffisante en 2017

Même si les banques algériennes n’ont pas eu cette année à financer un nouvel emprunt national, le problème, c’est qu’en 2017, les contraintes de financements imposées, aux banques publiques notamment qui assurent plus de 90% des crédits à l’économie, demeurent intactes : financement obligatoire de la micro entreprise, des investissements de grandes entreprises publiques qui peuvent atteindre des montants colossaux dans le cas d’une entreprise comme Sonelgaz, ou encore des programmes de logements publics dont le niveau n’a pas été remis en cause malgré la crise financière .

Un tel niveau d’engagement du système bancaire algérien, qui était compatible avec des dépôts de Sonatrach correspondant à un baril supérieur à 100 dollars, se révèle aujourd’hui intenable  avec un baril à 50 dollars.  L’abaissement du taux des réserves obligatoires des banques, qui passera de 8% à 4% à partir de ce mardi 15 août en leur procurant une marge de manœuvre supplémentaire estimée à 4 milliards de dollars, ne constitue de toute évidence pas une mesure suffisante pour solutionner leur besoin de financement .

Elles vont donc devoir dans les mois à venir, à moins de rationner drastiquement le crédit aux entreprises privées et aux ménages, se tourner de façon croissante vers les guichets de la Banque d’Algérie pour se procurer les ressources dont elles ont besoin. Avec les risques que cela comporte en matière de croissance de la masse monétaire et d’accélération de l’inflation .

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