Économie

L’Algérie consomme plus et investit moins : les tendances inquiétantes de nos importations

Les résultats du commerce extérieur pour les 9 premiers mois de l’année ont été rendus publics, dimanche 28 octobre, par les Douanes algériennes. Ils confirment la réduction sensible du déficit commercial. C’est sur cet aspect de nos échanges extérieurs que la communication officielle a choisi d’insister.
Cette bonne nouvelle s’ajoute à l’augmentation des exportations pétrolières et à celle des exportations hors hydrocarbures. Elle masque en revanche des tendances nettement plus préoccupantes qui sont liées essentiellement à l’absence de réduction significative des importations et sans doute plus encore à la composition de ces importations.

Vers un déficit commercial inférieur à 5 milliards de dollars

Commençons par les bonnes nouvelles. Au cours des 9 premiers mois de l’année 2018, le déficit commercial s’est établi 3,7 milliards de dollars. Il a été réduit de 56 % par rapport à la même période de 2017. On peut sans grand risque d’erreur s’attendre désormais à un déficit réduit à moins de 5 milliards de dollars pour l’ensemble de l’année en cours. C’est beaucoup mieux que les 11 milliards de déficit enregistrés l’année dernière ou le record de plus 17 milliards de 2016.
Depuis deux ans, un processus de rétablissement de l’équilibre de la balance commerciale est donc engagé qui enregistre des résultats significatifs grâce essentiellement à l’augmentation des recettes pétrolières. Ces dernières sont encore en hausse de près de 15 % depuis le début de l’année et ont atteint le chiffre de 28 milliards de dollars au cours des 9 premiers mois de l’année 2018.

Des exportations « hors hydrocarbures » en hausse de plus de 50 %

Toujours au chapitre des bonnes nouvelles, les exportations hors hydrocarbures sont en hausse de plus de 50 % et ont déjà franchi la barre symbolique des 2 milliards de dollars à fin septembre. Elles représentent désormais près de 7 % de nos exportations globales et on peut raisonnablement s’attendre à un chiffre proche de 3 milliards de dollars à la fin de l’année en cours.
Un bémol cependant à propos du contenu de ces exportations « hors hydrocarbures ». Les responsables de l’association des exportateurs algériens (Anexal) ne manquent pratiquement aucune occasion de souligner que la plus grande partie est en réalité constituée de dérivés des hydrocarbures comme les engrais ou les produits de la pétrochimie.
C’est encore le cas depuis le début de l’année avec des « demi – produits » qui constituent selon les Douanes algériennes près de 80 % des exportations hors hydrocarbures tandis que les exportations de produits alimentaires, qui pourraient atteindre 400 millions de dollars en fin d’année, comptent pour un peu moins de 10 %. Les exportations de biens de consommation non-alimentaires (produits électroménagers notamment) sont en hausse très sensible mais ne représentent encore que le montant peu significatif de 26 millions de dollars à fin septembre.

Les importations font de la résistance.

Dans la colonne des mauvaises nouvelles, on doit d’abord inscrire la résistance des importations qui accusent une toute petite baisse de 1,5 % en 9 mois. En dépit de la mise en place de dispositifs administratifs, très lourds, les importations ne diminuent pratiquement plus depuis 2 ans.
Le montant de 33,7 milliards de dollars enregistré à fin septembre indique que la barre des 45 milliards de dollars d’importations pourrait de nouveau être franchie en 2018. Elles avaient atteint 47 milliards de dollars en 2016 et 46 milliards en 2017.
Mais l’évolution du contenu des importations est sans doute un motif d’inquiétude plus important que leur montant. Les Douanes relèvent en effet de nouveau une hausse quasi-générale des importations de biens de consommation tandis que les importations de biens d’équipement sont encore en diminution sensible au cours des 9 premiers mois de l’année.

Biens de consommation en hausse …

Si la facture des produits alimentaires est en augmentation de seulement un peu plus de 1%, les importations des produits alimentaires à l’état brut augmente de 32%. La facture alimentaire globale est déjà proche de 8 milliards de dollars et devrait franchir largement le montant de 10 milliards en fin d’année.
De leur côté, les biens de consommation non-alimentaires ont été importés pour 6,9 milliards de dollars à fin septembre et sont en hausse de plus de 9% en un an en dépit des mesure d’interdiction qui ont frappé cette année beaucoup de ces produits à l’image notamment des téléphones portables.

…. Et biens d’équipements en baisse

C’est la tendance inverse qui est confirmée pour les produits destinés à l’investissement. Les biens d’équipements industriels ont été importés pour 9,64 milliards de dollars en 9 mois et sont en baisse de -8%. 

Les importations de biens d’équipement agricole reculent également de plus de 11%.
Cette évolution préoccupante du contenu de nos importations date déjà de plusieurs années et avait été relevé officiellement pour la première fois il y a quelques semaines par la Banque d’Algérie. 

Les chiffres mentionnés par la Banque d’Algérie sont impressionnants. Ils indiquent que les importations de biens d’équipements industriels avaient déjà baissé très sensiblement entre 2014 et 2017 en « passant de 9,22 milliards de dollars au second semestre de 2014 à 6,34 milliards au second semestre de 2017 ». Une baisse de pas moins de -31,3 % en 3 ans 

Selon la Banque d’Algérie, cette chute considérable s’est poursuivie depuis le début de l’année 2018 avec, « des importations de biens d’équipement industriels nécessaires à l’investissement qui ont encore reculé au premier semestre de 2018 de près de 14,5 %, par rapport au second semestre de 2017 ».

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