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L’Algérie pourrait revenir à l’importation du concentré de tomate

L’Algérie pourrait revenir à l’importation du concentré de tomate

Les nuages sombres s’accumulent au-dessus de la filière algérienne de la tomate. Les agriculteurs vivent des moments difficiles et l’Algérie pourrait revenir à l’importation du concentré de tomate.

Mostefa Mazouzi, le patron de la filière tomate en Algérie, n’en démord pas. Alors que depuis 4 années, plus un seul kilo de concentré de tomate ne soit importé, il y a aujourd’hui un risque de désengagement des producteurs locaux. Depuis plusieurs mois, il multiplie les mises en garde.

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Aujourd’hui, la tomate est présente en quantité et accessible à toutes les bourses en Algérie. Elle est présente tous les mois de l’année grâce à l’apport de 22 wilayas du pays.

Des tomates présentent toute l’année 2023

Le président du Conseil national interprofessionnel de la tomate (CNIFT) Mostefa Mazouzi aime rappeler la stratégie de cet organisme : le développement de nouveaux pôles de production telles les wilayas nouvellement productrices : Souk Ahras, Oum el Bouaghi, Khenchela, Tébessa qui rejoignent celles plus anciennes de Guelma, Annaba, El Tarf et Skikda.

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La production de ces nouvelles wilayas rejoint celle d’Oued Souf et d’In Salah, Adrar, Ménéa, Maghnia, Aïn Témouchent, Tlemcen jusqu’à l’est avec Tébessa, Souk Ahras et le sud. « On a bouclé la boucle avec une production qui a lieu dans le temps et dans l’espace, de janvier à décembre », confie-t-il à la Chaîne Al Iktissadia.

Augmentation croissante de la production

Quand on demande à Mostefa Mazouzi où en est la production nationale de tomate, il répond : « Une progression ininterrompue avec 18 millions de quintaux en 2019 puis une progression les années suivantes : avec 22 millions pour la campagne 2020 et jusqu’à 25 millions en 2021. »

La campagne de 2022 a cependant connu une chute de la production. Il a manqué 5 millions de quintaux. La cause est à rechercher dans la baisse des surfaces, ce qui inquiète le président de la filière algérienne de la tomate.

Il alerte sur « une hémorragie du nombre de producteurs » et va jusqu’à envisager une « fuite » des producteurs pour les prochaines campagnes.

Baisse probable de la production algérienne de tomate

Pour la prochaine campagne, Mostefa Mazouzi est pessimiste. « Sans exagérer, pour donner un chiffre précis, le risque de baisse de la production est de 20 %. Je parle de production et non pas de rendement », confie-il à Ennahar TV.

Il développe : « L’année passée, il y avait 3.600 producteurs de tomates sous contrat qui ont travaillé 27.000 hectares. Cette année, c’est à peine si on devrait atteindre le chiffre de 2.500 producteurs qui vont travailler 22.000 ha avec une production de 18 millions de quintaux. Une moitié va à la consommation de tomate fraîche et l’autre à la tomate de conserve. Ce chiffre est à comparer avec les 12 millions de quintaux reçues par les conserveries durant la campagne passée. »

L’éternel retard de paiement des agriculteurs

La cause de cette baisse de la production algérienne de la tomate ? L’éternel problème du retard des paiements de la marchandise livrée par les agriculteurs aux conserveries. Alors que pour des tomates livrées aux conserveries en juillet, le délai de paiement acceptable est septembre ou octobre. Actuellement, les retards atteignent 9 mois, voire une année.

Quelque peu amer, il s’interroge sur les conséquences de ce retard : « Cela risque de nous ramener à l’importation du double et triple concentré de tomates d’origine chinoise. En toute sincérité, la filière est en danger ». Mais confiant, il reprend : « Cela, nous ne l’accepterons jamais ! »

Quand on lui demande la position de la tutelle, il précise que le ministère concerné a apporté des corrections. Aujourd’hui, les primes ne sont plus versées par les conserveries mais par l’Office national interprofessionnel des légumes et des viandes (ONILEV). L’informatisation des procédures est en cours et une partie des primes a pu être versée.

Soutien du prix des engrais, un geste bien accueilli

La récente décision des pouvoirs publics de soutenir le prix des engrais à hauteur de 50 % du prix a été particulièrement apprécié par la profession. « C’est important, tout le monde est content », se réjouit Mostefa Mazouzi.

Cependant, un autre problème subsiste : le prix payé aux producteurs ainsi que le montant des primes. Le patron de la filière tomate prend alors sa calculatrice et aligne les chiffres. Le coût de cession de la tomate aux conserveries se situe entre 12 à 13 DA le kilo. A cela s’ajoute une prime d’Etat de 4 DA, soit un total de 17 DA. Une autre prime de 1,5 DA par kilo réceptionné est destinée aux conserveries.

Avec les prix actuels, « on ne s’en sort pas »

L’agriculteur fait face à des frais de culture de 1,25 million de dinars par hectare. Pour un rendement moyen de 600 quintaux par hectare, le coût ramené au kilo est de 21 DA. Les 17 DA par kilo de tomate payés au producteur ne suffisent donc pas à couvrir les charges. Il faudrait pour cela des rendements de 1.000 à 1.200 quintaux par hectare pour que la culture de la tomate soit rentable au prix de 17 dinars le kilo.

Les prix actuels ne couvrent pas le coût de revient à la parcelle, même en tenant compte de la prime de 4 DA. Il termine sa démonstration par ce verdict : « Avec les prix actuels, on ne s’en sort pas. »

« Nous n’avons plus besoin des primes, mais… »

Lorsqu’on lui demande comment faire, sa réponse est étonnante : « Ils peuvent enlever la prime, là n’est pas le problème. » Réponse étonnante a priori. Mostefa Mazouzi demande par contre la révision du prix de cession des tomates aux conserveries : « Avec un prix plus fort. »

Il réclame une agriculture contractuelle selon laquelle « le fellah s’entend avec le conservateur et signe un contrat. A la livraison de la récolte, le conservateur donne au fellah ce qui lui revient. »

Interrogé sur le prix de cession des tomates, il envisage de nouveaux prix : « Je t’amène mes tomates, paye moi 20 ou 22 DA le kilo ou ce qu’il faut. » Quant au soutien de la filière, il doit se faire entre l’Etat et la conserverie : « Ce qui me concerne c’est le fellah, il travaille aussi doit-il être rémunéré. »

Conserveries, des conditions difficiles

Un autre problème concerne plus particulièrement les conserveries. Plusieurs d’entre elles doivent rembourser leur crédit auprès de la BADR. Or, certaines sont en retard et huit d’entre elles risquent même des saisies pour non-paiement de leur échéances. Huit unités de transformation avec une capacité de transformation de 16 000  tonnes/jour soit plus de 40 % des capacités nationales.

Cap vers la tomate séchée

Interrogé sur les importations du concentré de tomate, Mostefa Mazouzi confie à la Chaîne El Iktissadia : « Je vous confirme leur arrêt depuis 4 ans. Pas un seul kilo de concentré de tomate n’a été importé. On peut rester ainsi. Le ministère de l’Agriculture a compris et nous ont aidés. On espère qu’ils revoient le niveau du soutien des prix.»

En tant que patron de la filière, Mostefa Mazouzi voit plus loin et vise le développement de la production de la tomate séchée : « C’est très important. On est en train de booster les fellahs. S’il leur reste un peu de tomates en fin de campagne, on leur conseille de les sécher. La tomate séchée est très demandée en Europe et en Afrique.»

Le CNIFT, un interlocuteur aujourd’hui reconnu

A l’adresse des producteurs algériens de tomates, Mostefa Mazouzi lance : « Il ne faut pas baisser les bras. »

Avec son Conseil, la filière est aujourd’hui un interlocuteur reconnu des pouvoirs publics. Il a su être présent tout au long de la campagne passée lorsqu’à Aïn Defla l’eau a failli manquer sur 1 000 hectares ou à Annaba dans le cas d’agriculteurs sans carte de fellah. Des situations que la filière a pu résoudre avec le staff du ministère de l’Agriculture, un ministère « à l’écoute ». Être un interlocuteur reconnu vis-à-vis des pouvoirs publics, un atout pour la filière.

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