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L’Arabie saoudite et les Emirats accusés de « contrer » les Révolutions arabes

L’Arabie saoudite et les Emirats accusés de « contrer » les Révolutions arabes

La Yéménite Tawakkol Karman, prix Nobel de la paix 2011, accuse ouvertement les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite d’être derrière « la contre-Révolution » dans les pays arabes, dont l’Algérie. « Ces deux pays craignent les révolutions même au Mozambique ou dans un Etat en Amérique du Sud », a-t-elle déclaré lors d’un iftar à Istanbul, en Turquie, organisé par sa fondation et la chaîne yéménite Balquis.

« Les despotes de notre monde arabe ont parié sur la destruction totale afin que les peuples abandonnent toute aspiration à la démocratie. Au moment même où ils ont cru qu’ils contrôlaient tout, un coup venu d’Algérie et du Soudan les a surpris. Aujourd’hui, ils tentent de s’ingérer dans les affaires de ces deux pays pour transformer leur printemps en automne », souligne Tawakkol Karman, citée par l’agence turque Anadolu.

En Algérie et au Soudan, les manifestations populaires pacifiques ont obligé les présidents Abdelaziz Bouteflika et Omar Al Bachir à quitter le pouvoir après plus de vingt ans de règne. « La bataille que livrent les contre-révolutions contre le Printemps arabe, mobilisant l’argent du Golfe, la complicité occidentale et les gangs locaux, ne peut qu’échouer (…) quand la jeunesse du Printemps arabe exprimait la nécessité du changement démocratique réelle, certains régimes et États dictatoriaux activaient, publiquement et secrètement, pour revenir en arrière », a-t-elle dit.

« Une idéologie machiavélique »

Tawakkol Karman n’est pas la seule à pointer du doigt ces deux pays. Cette semaine, Sébastien Boussois, chercheur en Sciences politiques à l’Université libre de Bruxelles, a, dans une tribune publiée par l’hebdomadaire français Le Point, analysé le rôle négatif des Emirats arabes unis dans la région arabe.

« Les Émirats arabes unis s’érigent aujourd’hui en médiateur idéal dans les situations de crise et appliquent le même remède partout : l’étouffement démocratique (…) La perception que l’on a des Émirats arabes unis (EAU) comme un îlot libéral au milieu de l’archipel de monarchies conservatrices du Golfe est un mythe. Dans l’ombre des gratte-ciel clinquants et d’une image soigneusement travaillée, les EAU se sont transformés ces dernières années en un État policier – un État autoritaire qui ne cherche pas seulement à renverser les acquis des révolutions arabes, mais encore plus d’imposer son idéologie en réalité plus intransigeante et machiavélique que celle du royaume saoudien sur laquelle on a tendance à se focaliser », a-t-il écrit.

Et d’ajouter : « Les Émirats ne font pas que préparer le lancement d’une sonde sur Mars : ils s’acharnent également à étendre leur influence dans le monde et à mener une campagne contre-révolutionnaire de plus en plus active et radicale. C’est le plan mis en place par Mohamed Bin Zayed, prince héritier d’Abu Dhabi, pour externaliser et « globaliser » sa doctrine sécuritaire dans tous les pays qui ont espéré la démocratisation. Cette « doctrine MBZ » a déjà transformé en partie le pays en « petite Sparte » du Golfe, certes puissante sous l’Antiquité, mais bien peu réputée pour son pacifisme ».

En février 2018, plusieurs chercheurs et politiques ont souligné « le rôle nocif » de l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis dans la « contre-Révolution », lors d’un débat organisé par le Centre des études d’Al Jazeera et le Centre des études asiatiques stratégiques à Istanbul. « Dès le premier jour, les Emirats et l’Arabie saoudite ont voulu « renverser » le printemps arabe », a relevé Aymen Nour, leader d’un parti d’opposition égyptien. Les intervenants ont cité comme exemple l’évolution violente de la situation en Libye, en Syrie et au Yémen.

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