Économie

Le blé en hausse, le pétrole en baisse : deux mauvaises nouvelles pour l’Algérie

Les prix du blé ne cessent pas d’enregistrer des records consécutifs sur les marchés internationaux. Pour l’Algérie, l’un des plus importateurs au monde avec 7 à 8 millions de tonnes par an, cette nouvelle, conjuguée à la baisse des cours de pétrole, est loin d’être bonne.

Le 18 novembre, le blé meunier a dépassé pour la première fois la barre des 300 dollars la tonne. En août, il valait 250 dollars. Sur une année, les prix ont presque doublé.

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Une semaine après avoir franchi le seuil des 300 dollars, cette céréale est encore allée plus haut. Jeudi 25 novembre, la tonne s’est négociée à 307 dollars sur la place boursière Euronext.

Les analystes sont unanimes : jamais le blé n’a atteint de tels plafonds et des répercussions ne sont pas à exclure sur les pays importateurs, comme la Turquie, l’Égypte, l’Algérie et le Nigeria, dépendant de l’étranger à hauteur respectivement de 50, 62, 66 et 100 % de leurs besoins.

Un expert de la société de gestion des risques des marchés agricoles, Agritel, cité par Ouest-France, explique que les États qui en ont les moyens, dont l’Algérie, multiplient les achats de précaution et constituent des stocks, ce qui n’est pas le cas de pays comme la Tunisie, le Maroc ou le Liban. Le Yémen et l’Afghanistan connaissent déjà des pénuries.

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Mais si la tendance perdure, même les pays pétroliers finiront par avoir des difficultés à s’approvisionner, d’autant plus que les cours de pétrole ont pris cette semaine une courbe contraire. Le baril de Brent de la mer du Nord, prix de référence pour le Sahara Blend algérien, a clôturé mardi 30 novembre au-dessous de 70 dollars. Même si ce mercredi matin, les cours sont repartis à la hausse, mais la baisse est conséquente sur cinq séances  (16- %).

Lors de la crise de 2008, les prix de blé avaient atteint 290 euros la tonne, mais ils étaient descendus à 120 euros en quelques mois grâce à l’augmentation des surfaces cultivées de 15 % et des rendements de 8 % ainsi qu’à la récession qu’avait connue l’économie mondiale.

Une aubaine pour accélérer la réforme de l’agriculture ?

Mais pour 2022, les prévisions d’extension des surfaces sont de 1 % seulement. De plus, les quantités de céréales destinées à la production de carburants augmentent et le marché est fortement déséquilibré avec seulement 10 pays exportateurs pour 200 importateurs.

Aussi, deux gros exportateurs envisagent des mesures qui compliqueraient encore la situation : la Russie compte fixer des quotas à l’exportation pour lutter contre l’inflation des produits alimentaires en interne et l’Union européenne limite son potentiel à cause de ses engagements à réduire les pesticides et les engrais dans l’agriculture.

Tous ces facteurs font dire à l’analyste d’Agritel que « le blé à 200 €, c’est du passé. La norme, ce sera le cours à 300 € ». Pour l’Algérie, la nouvelle situation impactera directement sa facture alimentaire, estimée à environ 8 à 10 milliards de dollars par an.

Le pays est l’un des plus gros importateurs mondiaux de céréales, pour lesquelles elle consacre chaque année 2,5 milliards de dollars. Il importe aussi pour 1,2 milliards de dollars de poudre de lait ainsi que d’autres produits  (café, sucres, huiles brutes, viandes…). Or tous ces produits sont touchés par la flambée des prix sur les marchés internationaux.

L’indice de l’Organisation mondiale pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), constitué justement des céréales, du lait, des viandes et des sucres, a atteint en octobre dernier des niveaux jamais vus depuis dix ans, enregistrant une hausse de 30 % sur une année.

Une telle situation, conjuguée à la baisse des prix du brut, pourrait contrarier les objectifs de l’Algérie à continuer à réduire sa facture d’importation (ramenée de 60 milliards de dollars en 2014 à 30 milliards cette année) et à retrouver l’équilibre de sa balance des paiements. Elle pourrait aussi accélérer les réformes structurelles maintes fois ajournées et la relance véritable du secteur agricole, au très fort potentiel.

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