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Le gouvernement renonce aux licences mais n’abandonne pas le contrôle administratif des importations

Le gouvernement renonce aux licences mais n’abandonne pas le contrôle administratif des importations

©Anis Belghoul / PPAgency
Le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi

C’est une véritable volte-face du gouvernement en matière de gestion du commerce extérieur national à laquelle on a assisté ce mardi matin. Mohamed Benmeradi, ministre du Commerce, a annoncé la suppression du système des licences dès janvier 2018 sauf pour les véhicules. « Il n’y aura pratiquement plus de licences d’importations. Nous avons décidé de renoncer carrément à ce dispositif », a expliqué M. Benmeradi lors d’une conférence de presse.

Dans le but de justifier cette décision inattendue, le ministre du Commerce a précisé que ce dispositif a « montré ses limites malgré les précautions prises par les autorités ». Mohamed Benmeradi évoque les « perturbations dans le fonctionnement de l’économie notamment en ce qui concerne les aliments de bétails et le bois ». « Des entreprises ont cessé d’activer et il y a eu également des augmentations des prix », a-t-il dit.

Une décision surprise

La décision, très radicale, du gouvernement est une véritable surprise. Au mois de mars dernier, le ministère du Commerce avait élargi sensiblement le système des licences d’importation. Parmi les nouveaux produits concernés par la liste publiée au printemps 2017 – sous le gouvernement Sellal-, on trouvait les viandes bovines fraîches ou congelées, les bananes, les pommes, le citron frais, les fromages, les tourteaux de soja ou encore le maïs. En tout, douze produits agricoles et alimentaires étaient touchés par la restriction. 

La mesure concernait aussi des produits stratégiques pour le secteur des BTP comme  le bois ou la céramique. Elle s’ajoutait aux restrictions, déjà en vigueur depuis début 2016,  pour des produits comme le rond à béton, le fil machine, le ciment gris et les véhicules de tourisme.

« Protéger les ressources en devises du pays » ?

Le principal objectif poursuivi par la mise en place du système des licences était de réduire la facture d’importation. Abdelmadjid Tebboune, à l’époque où il n’était encore que ministre du Commerce par intérim, assurait : « Nous régulons nos importations afin de protéger nos recettes en devises affectées par la diminution des cours du baril de pétrole ».

Or, depuis le début de l’année 2017, les statistiques du commerce extérieur montraient, mois après mois, l’échec des licences à réaliser un tel objectif. Les derniers résultats connus dans ce domaine affichaient une toute petite diminution de 1 % des importations au cours des 10 premiers mois de l’année.

Des  inconvénients de plus en plus nombreux

Face à l’augmentation très vive des importations enregistrée depuis le début de la décennie, le gouvernement algérien avait fait le choix, voici près de 2 ans, de recourir à des solutions administratives disponibles à court terme mais dont l’efficacité s’est révélée incertaine et les inconvénients sont apparus de plus en plus nombreux au fil du temps.

Ce sont ces inconvénients que Mohamed Benmeradi reconnaissait ce matin en parlant des « perturbations dans le fonctionnement de l’économie notamment en ce qui concerne les aliments de bétails et le bois », « des entreprises qui ont cessé d’activer » et « des augmentations des prix ».

Une mesure à « caractère bureaucratique et administratif »

La période récente avait été marquée par les réactions d’un certain nombre d’agents économiques qui ont affiché clairement leur défiance vis-à-vis des solutions administratives et plaidaient en faveur d’un traitement économique de l’envolée des importations. La plupart d’entre eux exprimaient leur scepticisme à propos des décisions administratives, licences et autres interdictions, en soulignant qu’une modulation des droits de douane et des taux de TVA seraient l’option la plus appropriée pour orienter la consommation vers la production nationale et décourager l’importation de produits de luxe ou jugés «superflus».

Ils sont aujourd’hui rejoints partiellement par le ministre du Commerce lui même qui constatait ce matin : « le dispositif des licences a été critiqué et est considéré comme pas suffisamment transparent. Il s’agit d’une mesure à caractère bureaucratique et administratif, nous avons décidé qu’il n’y aura plus de licences ».

Suspension à l’importation de près de 900 produits

Pour autant et même s’il renonce à la procédure très lourde et très  bureaucratique des licences, le gouvernement ne semble pas du tout décidé à abandonner le contrôle administratif du commerce extérieur national notamment en ce qui concerne les produits finis.

C’est ainsi que M. Benméradi annonce que « des mesures d’encadrement du commerce extérieur sont prévues en 2018, et ce, afin de protéger la production nationale et d’éviter une nouvelle envolée de la facture d’importations »

Le ministre du Commerce a ainsi évoqué une liste, qui reste à préciser et à entériner par le gouvernement, de près de 900 produits qui seront suspendus à l’importation dans laquelle figurent les fromages, les chocolats, les confitures et meubles.

« Les produits proposés à la suspension ont représenté durant les dix premiers mois de l’année près d’un milliard et demi de dollars. Nous pensons pouvoir faire des gains sur ces produits d’autant que beaucoup de producteurs nationaux demandent de protéger leur production », a-t-il assuré.

Le ministre du Commerce a également évoqué l’élargissement de la liste des marchandises à la Taxe intérieure de consommation (TIC), au taux de 30%, pour 10 familles de produits finis et l’augmentation des droits de douanes, pouvant atteindre 60%, pour 32 familles de produits finis.

45 milliards de dollars d’importations en 2017

Selon les pronostics, révisés en hausse, du ministre du Commerce, qui prévoyait encore voici quelques semaines de les ramener à 40 milliards de dollars à la fin de l’année en cours, les importations devraient atteindre à la fin 2017 plus de 45 milliards de dollars contre 46,7 milliards de dollars à fin 2016.

Pour l’année 2018, M. Benmeradi continue d’affirmer, de façon très optimiste et très peu réaliste, que la facture d’importation devrait baisser à 30 milliards de dollars.

Licences maintenues pour  les véhicules de transport de personnes

En 2018, seuls les véhicules de transport de voyageurs (voitures de tourisme et bus) resteront concernés par les licences . « Nous avons gardé les licences uniquement pour les véhicules de transport de personnes pour faire de la régulation. Un contingent est prévu et il ne sera ouvert qu’au besoin en fonction de l’évolution de la production nationale », a affirmé le ministre.

Les importations de voiture de tourisme sont le seul secteur dans lequel des économies importantes ont pu être réalisées au cours des dernières années au prix d’une réduction très sensible du nombre de véhicules importés.

C’est ainsi qu’après avoir atteint un pic supérieur à 7 milliards de dollars en 2012, la facture d’importation de véhicules avait été réduite à un peu plus de 1 milliard de dollars fin 2016 pour un contingent de véhicules importés fixé à 98.000 véhicules.

L’année 2017 a été dans ce domaine une « année blanche » : aucune licence n’ayant été délivrée aux concessionnaires automobiles agréés.

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