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Le modèle d’industrialisation chinois au service de l’influence de la Chine en Afrique

Le modèle d’industrialisation chinois au service de l’influence de la Chine en Afrique

Beaucoup a été dit sur l’appétence chinoise pour les matières premières africaines et le volume d’échange économique de dizaines de milliards de dollars entre l’empire du Milieu et l’Afrique. Par contre, peu a été dit sur le rôle qu’entend jouer la Chine, et que les dirigeants africains voudraient la voir jouer, dans l’industrialisation de l’Afrique, pour qui l’expérience chinoise apparaît comme un modèle.

C’est précisément dans cette logique que s’est inscrite la récente tournée du président chinois, Xi Jinping, dans trois petits pays africains en cette fin de mois de juillet, avant le sommet des pays émergents, les BRICS, qui s’est tenu à Johannesburg en Afrique du Sud.

Cette visite du dirigeant chinois au Rwanda, au Sénégal et en île Maurice, est à contre-courant de l’idée que les Chinois s’intéressent d’abord aux matières premières de l’Afrique et à ses marchés publics dans la construction car ces pays disposent de très peu de ressources naturelles.

Bien que cette tournée entre dans le cadre du renforcement de la présence chinoise sur le plan économique en Afrique, notamment à travers l’initiative de la nouvelle route de la soie, cette visite s’inscrit aussi dans un aspect plus méconnu de la Chine en Afrique : un partenaire de l’industrialisation du continent.

Cela permet à Pékin de se faire des alliés parmi les pays africains peu propices à son partenariat basé sur la fourniture d’investissements dans les infrastructures en échange d’un accès aux matières premières.

La Chine : un modèle d’industrialisation pour l’Afrique ?

Il n’y a pas que le soutien chinois aux mouvements de libération africains, ou l’absence de passé colonial et d’ingérence chinois dans les pays africains qui expliquent la proximité entre l’Afrique et la Chine. La Chine représente aussi un exemple pour les dirigeants africains qui y voient un modèle et une trajectoire qui soient semblables à ceux de l’Afrique et qu’ils ont envie, par effet de mimétisme, de reproduire chez eux.

Il faut se rappeler qu’il y a tout juste 40 ans, la Chine était un exportateur de matières premières, envoyant du pétrole et du charbon au Japon et de l’étain aux États-Unis avant de s’industrialiser et de parvenir progressivement à devenir l’atelier du monde exportant sa production sur toute la planète.

Les pays africains, près d’un demi-siècle après les indépendances, demeurent pour la plupart d’entre eux, des exportateurs de matières premières réimportant des produits finis qui ont été fabriqués grâce à leurs propres matières premières.

Cela rend non seulement les pays africains dépendants des fluctuations des prix des matières premières mais aussi des importations pour nombre de produits qu’ils pourraient aisément fabriquer localement.

L’industrialisation est donc, pour les dirigeants africains, la prochaine étape du développement de l’Afrique, afin de parvenir à intégrer les marchés à valeur ajoutée et fournir des emplois à des millions de jeunes Africains. En cela, la Chine est le modèle le plus proche des réalités africaines.

La Chine à la rescousse des infrastructures africaines

Seulement pour arriver à s’industrialiser, l’Afrique fait face à un obstacle de taille qu’est l’infrastructure, notoirement pauvre sur le continent, avec seulement 25% de routes pavées, un manque d’infrastructures portuaires et un taux d’accès à l’électricité qui dépasse péniblement les 30% de la population.

Sur ce plan, la Chine offre aussi des solutions en investissant ou en prêtant massivement dans les infrastructures du continent qui joueront certainement un rôle important dans les économies africaines à moyen et long termes.

En plus de la création en 2015 d’un fonds d’investissement sino-africain de 10 milliards de dollars pour la coopération en matière de capacité industrielle, la Chine avait déjà consacré en 2016 plus de 33 milliards de dollars au financement de l’électricité et 41 milliards de dollars aux transports en Afrique.

De plus, les entreprises chinoises construisent des zones économiques spéciales en Afrique, créant des plateformes où les entreprises chinoises et autres peuvent se regrouper. C’est d’ailleurs pour cela que le dirigeant chinois Xi Jinping s’est rendu successivement au Sénégal, au Rwanda et en Ile Maurice.

Le Sénégal, le Rwanda et l’Ile Maurice : future plateforme industrielle

Alors que jusqu’à récemment, la Chine était un féroce concurrent pour les productions africaines, de textile notamment, les pays africains étant de grands importateurs de produits chinois, ses entreprises sont aujourd’hui un vecteur de l’industrialisation de certains pays africains.

Avec des coûts de production et des salaires en hausse en Chine, et des réglementations sur l’environnement de plus en plus sévères, les entreprises chinoises ont commencé à délocaliser leurs usines à l’étranger.

L’Afrique, avec son faible coût du travail disponible en abondance, a attiré nombre d’entreprises chinoises, surtout en Éthiopie, qui a attiré des centaines d’investissements industriels chinois.

Pour des pays comme le Sénégal, le Rwanda et l’Ile Maurice, qui ne disposent pas de matières premières, le modèle d’industrialisation éthiopien est un exemple à suivre en la matière.

Le Sénégal s’est déjà attaché les services d’une entreprise chinoise pour construire une nouvelle zone économique spéciale près de Dakar et la Chine pourrait financer la deuxième phase de la zone après la visite de Xi Jiping.

Le Rwanda, où les entreprises chinoises sont déjà bien implantées dans la construction mais aussi le textile, voudrait aussi développer la zone économique spéciale à Kigali où les usines chinoises sont très présentes.

À l’Ile Maurice, le gouvernement a commencé à négocier le premier accord de libre-échange avec la Chine en avril, cherchant pour élargir des exportations dans l’une des économies les plus diversifiées du continent.

De son côté, la Chine à travers le Sénégal, tente de s’implanter davantage en Afrique de l’Ouest où elle est moins présente qu’ailleurs sur le continent, d’autant plus que le Sénégal est la porte de l’Afrique occidentale sur l’Atlantique.

Au Rwanda, la Chine veut approfondir les relations avec un allié traditionnel qui se trouve sur la route entre l’Afrique de l’Ouest et la Corne de l’Afrique que Pékin veut relier avec une ligne ferroviaire.

L’Ile Maurice quant à elle abrite déjà une base d’écoute des communications navales dans l’océan indien qui appartient au rival indien. La Chine entend contrer l’influence grandissante de l’Inde sur l’île.

En se posant comme un partenaire de l’industrialisation de l’Afrique, la Chine étend son influence sur le continent et renforce sa position dans des pays où la formule de son partenariat « matières premières contre investissement » ne peut pas vraiment fonctionner.

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