Politique

L’opposition face à l’épreuve de la rue

L’opposition, s’est réunie ce mercredi 13 mars, au siège d’El Adala, pour exprimer son refus des décisions du président Abdelaziz Bouteflika de prolonger le quatrième mandat et d’annuler l’élection présidentielle.

« Le pouvoir en place ne peut plus continuer à travailler en dehors de tout cadre constitutionnel et contre la volonté du peuple. Il n’est pas habilité à diriger la période de transition. Pire, son maintien en tant qu’autorité de fait constitue un danger pour la stabilité et la sécurité du pays », est-il écrit dans un communiqué, publié à l’issue de la réunion.

L’opposition a prévenu contre l’implication de l’armée dans les tiraillements politiques pour éviter de « rompre le consensus national » sur l’ANP (l’expression est une critique implicite des trois déclarations du général de corps d’armées, Ahmed Gaid Salah, chef d’état-major de l’ANP et vice-ministre de la Défense).

Tout en demandant à l’armée de rester neutre, l’opposition a accusé le pouvoir de solliciter l’appui de l’étranger pour se maintenir en « contournant le mouvement populaire pacifique ».

L’opposition appelle à « une rencontre nationale ouverte » à tous ceux qui « rejettent la voie choisie par le pouvoir ». Au-delà de la dénonciation des choix politiques faits par le pouvoir, l’opposition, qui s’est déjà réunie à quatre reprises depuis le début du mouvement populaire de contestation, donne l’impression d’avoir de la peine à accompagner la vitesse de la rue. En plus de ses tares, elle est en même temps attaquée par le pouvoir et ses relais. L’opposition se retrouve donc entre la nécessité d’accompagner et d’encadrer le mouvement populaire, et un pouvoir qui l’a toujours méprisée.

Apprendre à écouter et à débattre

Said Sadi, ancien président du RCD, a parlé de « travail de diabolisation » des « officines » qui aurait repris de plus belle ces dernières semaines.

« Ces dernières semaines, des idées sont avancées ici et là. Elles sont encore générales mais il ne faut pas bouder son plaisir quand des propositions constructives, hier encore éparses ou stigmatisées, font consensus. Apprenons à nous écouter pour débattre et faisons le point de ce qui nous rassemble », a plaidé Said Sadi.

L’opposition, qui n’a pas su maintenir en vie le processus de Mazafran, né après la présidentielle de 2014, semble avoir un rôle historique à jouer, à condition de dépasser les « petits calculs » de chefs et à transcender les divergences conceptuelles ou idéologiques.

Il s’agit de proposer une alternative politique forte et crédible face à ce que Ramtane Lamamra, vice-Premier ministre, appelle « le plan de travail de Bouteflika ».

Ce mercredi, Lamamra a appelé l’opposition au dialogue. Il est évident que le pouvoir ne peut pas mener seul la période de transition dont la durée n’est pas déterminée.

Selon la politologue Louisa Aït Hamadouche, qui était l’invitée de TSA Direct, mardi 12 mars, le mouvement de contestation contre Bouteflika doit avoir un contenu politique et dégager des interlocuteurs.

Si les slogans et les revendications sont clairs, le mouvement densifié par l’adhésion de plusieurs catégories professionnelles (avocats, juges, huissiers, notaires, enseignants, commerçants, etc) aura besoin d’un encadrement.

Un encadrement qui devra éviter le piège de la récupération politique qui est justement craint par les manifestants qui disent ne pas faire confiance à la classe politique mais qui écoutent certaines personnalités crédibles et visibles.

L’opposition, qui doit renouveler ses instruments de persuasion et rafraîchir ses idées, est mise devant un défi difficile à relever mais qui n’est pas insurmontable. Il s’agit d’élaborer un projet politique consensuel, démocratique, ouvert et performant afin d’établir un rapport de force avec le pouvoir. Reste à trouver les bonnes formules pour se mettre au même niveau des revendications populaires actuelles exprimée d’une manière pacifique.

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