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Louh – Ouyahia : que cache cette polémique inédite ?

Louh – Ouyahia : que cache cette polémique inédite ?

Une semaine après avoir violemment chargé Ahmed Ouyahia, Tayeb Louh en rajoute une couche. Ce dimanche 11 novembre, le ministre de la Justice a tenu à apporter un démenti formel à un article de presse qui donnait le dossier clos avec la présentation d’excuses formelles de M. Louh à son chef hiérarchique direct. Autrement dit, il persiste et signe. Du jamais vu dans la communication officielle.

Rappel des faits. Lundi 5 novembre, Tayeb Louh, qui animait un meeting devant les représentants de la société civile oranaise, mène une attaque en règle contre le Premier ministre dont il rappelle les mesures impopulaires « heureusement annulées par le président Bouteflika » et remonte le temps pour déterrer un vieux dossier qu’Ahmed Ouyahia traîne tel un boulet depuis sa première expérience de chef de gouvernement : l’emprisonnement « injuste » de cadres de l’État dans les années 1990.

Ouyahia, qui a l’habitude d’essuyer des tirs amis devant lesquels il a toujours fait le dos rond, décide cette fois de réagir. Le lendemain, son parti, le RND, rétorque par un communiqué officiel et dénonce les propos du ministre de la Justice.

On croyait la polémique close, surtout que, ce dimanche 11 novembre, le quotidien arabophone El Khabar rapportait que M. Louh a présenté ses excuses au Premier ministre par le biais d’un intermédiaire qu’il a chargé de lui expliquer que ses propos tenus à Oran ne le visaient pas. Mais coup de tonnerre, dimanche en milieu d’après-midi, un communiqué du cabinet du ministre de la Justice dément tout en vrac. M. Louh n’a jamais présenté d’excuses à qui que ce soit.

On peut bien comprendre que le démenti du département de la Justice est motivé par le fait que l’article en question désignait nommément deux autres personnalités que M. Louh aurait visé par ses attaques. « Un parlementaire de la majorité présidentielle s’est rendu jeudi passé dans le bureau du Premier ministre pour accomplir une mission spéciale, qui est d’expliquer à Ahmed Ouyahia que les propos de Tayeb Louh ont été mal interprétés et visaient en fait le ministre de la Justice de l’époque, Mohamed Adami, et le conseiller du président Zeroual, Mohamed Betchine », écrit El Khabar, citant une « source proche des partis soutenant le Président Bouteflika ».

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Tayeb Louh, qu’on dit très proche du cercle présidentiel, ne pouvait laisser dire que ses propos étaient destinés à des personnalités qu’il n’avait aucun intérêt à cibler. Sa charge du lundi dernier visait bien Ahmed Ouyahia, car avant d’évoquer la fameuse opération « mains propres » du milieu des années 1990, il avait aussi parlé de « taxes qui allaient être instituées sur les documents biométriques », une disposition proposée par le gouvernement dans l’avant-projet de loi de finances complémentaire 2018, mais annulée en Conseil des ministres.

Non, l’attaque ciblait bien le Premier ministre et personne d’autre. Reste à savoir pour quel objectif. Dans un premier temps, les observateurs l’avaient interprété comme une manière d’attribuer au Président Bouteflika la paternité de la libération, qui allait intervenir le soir même, des cinq généraux-majors emprisonnés depuis le 14 octobre, sachant que Louh, tout en rappelant cet « abus » datant des années 1990, avait souligné l’engagement du chef de l’État que « cela ne se reproduirait plus ».

Mais n’y avait-il pas d’autre moyen d’attribuer à Bouteflika le beau rôle que d’offrir au monde ce triste spectacle d’un chef de gouvernement qui se fait tailler publiquement par un de ses ministres ?

Visiblement, Tayeb Louh a agi en tant que membre du cercle présidentiel et ses propos n’avaient pas d’autre but que de régler son compte à Ahmed Ouyahia. Ce dernier, aurait-il l’ambition de jouer quelques rôles dans la prochaine bataille électorale ? Compte-t-il se porter candidat ou tout au moins soutenir un plan autre que le cinquième mandat auquel il a pourtant appelé officiellement ?

Rien ne permet pour le moment d’avancer quoi que ce soit, mais cette polémique, qui n’en finit pas avec son ministre de la Justice, cache sans doute quelque chose de plus important que le souci de présenter Bouteflika comme l’ami du bon petit peuple.

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