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Mohammed VI, un roi noctambule sur le chemin d’une abdication risquée

Mohammed VI, un roi noctambule sur le chemin d’une abdication risquée

Le royaume du Maroc ne vit pas les meilleurs jours de son existence. Aux graves difficultés économiques du pays s’ajoutent les intrigues du palais royal, la répression, les retombées de la normalisation avec Israël, la maladie du roi Mohammed VI et son éventuelle abdication en faveur de Moulay Hassan.

Le scénario d’une abdication de Mohammed VI est de plus en plus évoqué, tout en soulevant des inquiétudes en raison du caractère du prince héritier Moulay Hassan.

Absent pendant longtemps du pays, le roi Mohammed VI est rentré en mars dernier, sans toutefois y être présent réellement. Ses apparitions publiques sont toujours aussi rares que lorsqu’il partageait son temps entre la France, le Gabon et les Seychelles.

Selon nos sources, si Mohammed VI n’est pas très visible, c’est parce qu’il passe ses journées à dormir. Quand il travaille, le roi préfère le faire la nuit.

Néanmoins, assure-t-on, il consacre plus de temps à gérer ses affaires personnelles et aux divertissements qu’à la gestion des affaires du royaume, qu’il a déléguées à ses proches collaborateurs comme Fouad Ali El Himma, son principal conseiller, et Mohamed Yassine Mansouri, chef des services de renseignements extérieurs (DGED).

« Mohammed VI est devenu un noctambule. Il dort toute la journée, et reste éveillé toute la nuit. Quand il travaille, c’est pour s’occuper de ses affaires personnelles », expliquent nos sources.

Au Maroc, le roi Mohammed VI a la mainmise sur les activités économiques rentables du royaume, via la holding royale, son bras financier.

La vie privée du roi a été marquée ces dernières années par trois événements qui ont grandement influé sur la monarchie.

Sa maladie (il souffre d’arythmie cardiaque, qui a nécessité deux interventions chirurgicales, et de sarcoïdose), son divorce avec Lalla Salma et sa fréquentation des frères Azaitar, des champions d’arts martiaux germano-marocains devenus très influents au Maroc grâce à leur proximité avec Mohammed VI.

Une proximité désastreuse pour l’image de la monarchie et qui n’est pas vue d’un bon œil par la famille royale, les influents chefs des services de sécurité et tout le makhzen.

Dans une récente enquête, le journal britannique The Economist a dressé le portrait d’un roi qui n’est pas heureux dans son métier. Ni dans son mariage.

Lorsque, en 2001, il épouse Lalla Salma, c’est uniquement pour donner un héritier à la monarchie. Moulay Hassan est né en 2004 et le couple s’est séparé en 2017.

Maroc : Moulay Hassan, un prince héritier qui inquiète la famille royale

C’est vers le jeune prince que les regards sont braqués aujourd’hui alors que le roi a plus d’une raison d’abdiquer. L’éventualité est évoquée avec insistance, sauf que les choses sont plus compliquées qu’elles ne paraissent.

Aux yeux de l’entourage immédiat de Mohammed VI, Moulay Hassan a un défaut : il est resté très proche de sa mère, qui est en résidence surveillée et non morte comme l’annonce la rumeur. Or, la princesse Meryem, la sœur du roi Mohammed VI, ne s’entend pas avec Lalla Salma et c’est là que ça coince.

« Mohammed VI a d’énormes difficultés avec le prince héritier qui accorde peu de respect à son père et avec qui il communique peu », expliquent nos sources.

Les observateurs se mettent déjà à scruter la personnalité du probable futur roi, tant le scénario de l’abdication de Mohammed VI prend de l’épaisseur.

Pour ceux qui l’ont approché ou approché son entourage, Moulay Hassan est irascible et a un caractère violent. D’où des craintes exprimées tout bas quant à une exacerbation de la répression dans le cas de son accession au trône.

« Le prince héritier est violent même avec les généraux au sein du palais royal. Ses sautes d’humeur et la violence qui en découle soulèvent autant d’inquiétudes que d’interrogations sur la capacité de ce prince à prendre la suite de son père à la tête du royaume. Les appréhensions sont grandes à l’intérieur même du makhzen sur le devenir du royaume avec Moulay Hassan à sa tête : la répression sanglante pourrait engendrer un soulèvement général où l’armée sera forcée de prendre ses responsabilités », ajoutent nos sources.

Cette répression qui renvoie déjà une image éclaboussée de la monarchie, conjuguée à la dégradation de la situation sociale, placent le Maroc sur une poudrière.

Pour le moment, le Makhzen et son organisation tentaculaire contrôlent la situation.

« En plus de l’administration moderne dont est doté le royaume, le système makhzen est une sorte d’administration parallèle dont la mission est d’abord le renseignement, en particulier la surveillance des Marocains et des étrangers qui entrent et séjournent au Maroc. Ce système, de la base au sommet, fonctionne suivant un principe cardinal : celui de la délation érigée en vertu. Toute la société marocaine est embrigadée, s’il le faut par la contrainte, le chantage, les punitions, les sanctions et les privations de toutes sortes contre ceux qui oseraient résister. Tout réfractaire à devenir délateur est broyé par la machine du Makhzen », développent nos sources.

Le Makhzen permet au Palais royal de contrôler les Marocains de l’intérieur et de l’extérieur. La même organisation qui régit les Marocains au Maroc est déployée à l’étranger pour contrôler les sujets de Sa Majesté.

« Dans chaque quartier, on trouve le mkadem dont le rôle est, par exemple, de signaler l’arrivée des étrangers ou tout comportement susceptible de menacer la monarchie. Le mkadem rend compte au caïd qui, lui, contrôle un certain nombre de quartiers. Le caïd transmet ses rapports au bacha qui chapeaute cette organisation parallèle et c’est ce dernier qui transmet les rapports à la DGSN qui est dirigée par Abdellatif Hammouchi qui, à son tour, informe le Palais royal qui prend la décision finale », détaille un connaisseur du Makhzen.

Cet appareil sécuritaire conçu pour contrôler la société marocaine afin d’étouffer toute velléité de revendications, confié à des amis d’école de Mohammed VI, et les forces auxiliaires du makhzen, ne lâchent rien.

Plusieurs journalistes indépendants sont jetés en prison pour de fallacieuses accusations de crimes sexuels, ce qui a valu au Maroc une cinglante condamnation du Parlement européen en janvier dernier.

Maroc : les regards braqués vers le prince héritier

La même institution a accablé le royaume pour un autre écart de ses services, la corruption de députés européens.

Ce scandale a écorné ce qui restait de l’image du pays après celui de l’espionnage de journalistes, opposants et responsables étrangers via le logiciel israélien Pegasus. Cette affaire a eu pour conséquence une grave crise avec, au moins, un allié de la monarchie, la France.

Tout cet enchevêtrement pouvait peut-être passer sans graves conséquences sur la monarchie s’il ne survenait pas dans un contexte de crise économique et sociale aiguë.

Le Maroc est touché de plein fouet par l’inflation mondiale, portant les prix des produits alimentaires et des carburants à des niveaux jamais atteints.

Pour le moment, les services et le Makhzen, qui encadrent drastiquement la société marocaine, veillent au grain, il se susurre même que ce sont eux qui actionnent les manifestations sporadiques, dans un double objectif d’absorber la colère sociale et d’entretenir l’illusion d’un pays où le droit de manifester est respecté.

Mais jusqu’à quand pourront-ils continuer à gérer une colère sociale chaque jour exacerbée par la dégradation des conditions de vie de la population et l’aggravation des inégalités.

Le rapport mondial sur les inégalités (World Inequality Report) a fait ressortir, en mars dernier, que 10 % des Marocains s’accaparent plus de la moitié des richesses du pays.

Parmi les privilégiés se trouvent le Premier ministre, Aziz Akhannouch, dont la fortune est estimée à 1,5 milliard de dollars, et surtout le roi qui, à travers la holding royale, contrôle presque toutes les activités rentables du royaume.

En plus de la baisse du pouvoir d’achat et des inégalités, les Marocains sont outrés par la normalisation avec Israël, décidée par le roi en 2020. Bien que rejeté par l’opinion publique, le rapprochement avec Israël est présenté comme une nécessité dictée par l’intérêt national.

Une partie de l’élite marocaine ne se gêne même plus de le dire sans ambages : le Maroc a franchi le pas de la normalisation dans l’espoir de se donner un avantage militaire sur l’Algérie.

Un calcul qui risque de s’avérer désastreux puisque Israël ne fournit rien gratuitement. À chaque contrat d’armement conclu, c’est l’endettement du Maroc qui s’aggrave.

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