Politique

Mobilisation générale : l’Algérie dévoile les raisons et les conditions

Dans un contexte régional et international difficile marqué par la multiplication des crises et les risques accrus de guerres, l’Algérie a franchi un premier pas vers l’adoption d’un texte régissant la mobilisation générale.

Une telle situation, décrétée en cas de risque majeur menaçant la sécurité du pays, comme la guerre, est prévue par la Constitution dans son article 99.

Le projet de loi sur la mobilisation générale a été présenté, ce mercredi 30 avril, devant la commission des affaires juridiques de l’Assemblée populaire nationale (APN) par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa qui a dévoilé les raisons et les conditions.

Passage de « l’état de paix à l’état de guerre »

Dans son intervention devant les membres de la commission, le ministre a expliqué que la mobilisation générale vise à renforcer les moyens de défense de la nation et de relever les capacités des forces armées en mettant à leur disposition tous les moyens et toutes les ressources disponibles afin de leur permettre d’assurer la défense du pays.

Le texte consiste un « ensemble des mesures à prendre pour assurer de manière plus efficace le passage des forces armées, des institutions de l’État, des organismes et des établissements nationaux, ainsi que de l’économie nationale d’un état de paix à un état de guerre, en mettant les capacités nationales au service de l’effort de la guerre », a expliqué le ministre de la Justice.

La mobilisation générale peut être décrétée dans deux cas

Le projet de loi définit deux cas où la mobilisation générale peut-être décrétée en Algérie. Le premier est quand « le pays est confronté à un péril imminent susceptible de porter atteinte à ses institutions constitutionnelles, à son indépendance ou à son intégrité territoriale ». Le second cas est une « agression effective ou imminente, conformément aux dispositions prévues par la Constitution ».

Ces dispositions permettent de mettre toutes les capacités de la nation à la disposition de l’effort de guerre, a-t-il dit.

Les différents ministères concernés auront à élaborer des plans sectoriels qui serviront à l’élaboration d’un plan global de mobilisation générale par le ministère de la Défense nationale, qui chapeaute toute l’opération.

Dans le texte élaboré par le gouvernement, plusieurs mesures concrètes sont prévues, impliquant des retombées directes sur la vie des citoyens et le fonctionnement des institutions dans le cas où la mobilisation générale est décrétée par le président de la République, après consultation des deux chambres du Parlement.

Les conséquences sur les Algériens et les ressortissants algériens

Le texte prévoit la réquisition des personnes, des biens et des services, le rappel des réservistes de l’armée, la suspension de la fin de service des personnels militaires et du départ à la retraite de certains fonctionnaires et employés civils.

Sous le régime de la mobilisation générale, la priorité dans tous les secteurs doit être donnée aux besoins des forces armées dans leur mission de défense du pays. « Les citoyens doivent répondre immédiatement à l’ordre de rappel. Ils doivent répondre sans délai à l’exécution des mesures relatives à la défense populaire, se soumettre à la réquisition, se conformer aux mesures prises par les autorités compétentes », a précisé Lotfi Boudjemaa.

En cas de mobilisation générale, les Algériens doivent « s’interdire de publier ou de partager », notamment via les moyens de technologies modernes, toutes les informations susceptibles de « porter atteinte à l’opération ou influer négativement sur la mobilisation générale », selon le ministre. « Les citoyens doivent signaler aux services de l’État la présence d’étrangers ou de personnes de pays ennemis, et tout ce qui peut contraindre la mobilisation générale », a énuméré le ministre de la Justice.

Jusqu’à 10 ans de prison pour les contrevenants

L’industrie est adaptée aux besoins de l’armée et les autorités peuvent décréter la rationalisation de la consommation de certains produits, de l’énergie et de l’eau, et interdite à l’exportation de certains produits de base.

Les autorités peuvent aussi procéder à l’expulsion des ressortissants de pays considérés comme ennemis et dont la présence sur le territoire national est jugée susceptible de constituer un danger.

Sur le volet pénal, le texte prévoit une série de dispositions prévoyant des « peines d’emprisonnement allant de deux mois à 10 ans ainsi que des amendes variant entre 20.000 et un million de DA à l’encontre de toute personne (physique ou morale) qui enfreindrait ces dispositions », a précisé le ministre.

Contexte régional et international

Lotfi Boudjemaa a ajouté que la loi sur la mobilisation générale devrait « enrichir le système législatif national, afin de permettre la prise de toutes les mesures nécessaires pour faire face à tous les risques éventuels, notamment dans le contexte géostratégique actuel aux niveaux mondial et régional, marqué par des mutations accélérées dictant de nous y adapter et de se préparer à tous les scénarios possibles ».

L’Algérie est entourée de foyers de tensions à ses frontières. En janvier dernier, le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf a alerté sur l’ampleur prise par le terrorisme dans la région du Sahel. « … Lorsque nous évoquons le terrorisme en Afrique, et plus particulièrement dans la région sahélo-saharienne, nous parlons, d’abord, de groupes terroristes lourdement armés et maîtrisant les stratégies militaires, des groupes qu’on pourrait qualifier d’+Armées terroristes+ », a-t-il dit.

En plus des groupes terroristes, cette région est devenue le terrain de jeu des puissances étrangères comme la Russie, les États-Unis et la Turquie. D’autres pays comme le Maroc, les Émirats arabes unis et Israël tentent d’étendre leur influence dans cette région où trois pays, le Mali, le Niger et le Burkina Faso, sont dirigés par des putschistes.

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