
Si son entreprise a réussi à s’imposer dans le paysage économique en Algérie, lui, cependant, est resté discret tout au long de sa carrière.
Mohand Ait Braham, fondateur des Boissons Star, décédé lundi 1ᵉʳ septembre à Paris à l’âge de 85 ans, est l’exemple type de ceux qui ont choisi de construire une industrie loin des lumières et du tapage.
A lire aussi : Inscription à la vaccination anti-Covid : prenez rendez-vous en ligne
Très peu de choses sont connues de celui qu’on appelait affectueusement, dans son village, « Da Mohand Star ».
Né en 1940 dans le village de Maghnoune, sur les hauteurs d’Ouzellaguen (Sud-Ouest de Béjaïa), non loin du lieu historique du Congrès de la Soummam, ce montagnard a fait de l’humilité et de la modestie ses remparts contre l’adversité et les épreuves de la vie.
A lire aussi : Algérie : révélations glaçantes sur le drame du bus de Oued El Harrach
Comme beaucoup de ses contemporains nés sous le joug colonial, ce pionnier de l’industrie algérienne de l’agroalimentaire, n’a pas eu la chance de suivre de longues études.
Homme du peuple
Issu d’une famille de propriétaires terriens et ancien moudjahid, il choisit après l’indépendance de se consacrer à l’entrepreneuriat. D’abord en gérant une huilerie traditionnelle, avant de franchir un cap décisif en 1990 en fondant la société Star Boissons à Ighzer Amokrane, région à laquelle il est resté fidèle jusqu’à la fin de ses jours.
A lire aussi : Algérie : publication inédite des photos de trafiquants de drogue
L’entreprise, d’abord modeste, deviendra au fil des années un acteur incontournable de l’économie algérienne. Sa gamme s’est enrichie progressivement : sodas classiques dans les années 1990, jus à base de lait en 2001 – une innovation inédite à l’époque dans le pays – puis boissons énergisantes dès 2007.
Star s’est imposée grâce à son dynamisme et à son sens de l’innovation, en diversifiant ses formats (canettes, bouteilles en verre, PET) et en s’ouvrant à l’exportation.
Deux structures viendront renforcer l’aventure : EURL Star Ait Braham et ARL Ait Braham et Fils Boissons Star, spécialisées dans les boissons, l’eau minérale, le conditionnement, et même les emballages plastiques.
Présente dans les grands salons agroalimentaires du pays – du SIAG d’Oran à la Foire de la production algérienne à Alger –, la marque a toujours revendiqué son ancrage local et sa volonté de créer de l’emploi et de valoriser le savoir-faire.
À Ouzellaguen, l’admiration pour cet homme du peuple est unanime. « Il s’assoit avec les vieux, les gens de son âge, en regardant parfois une partie de dominos. Il discute aussi avec ses employés. Il n’aimait pas l’ostentation », témoigne un habitant du village.
Sa générosité était tout aussi reconnue : outre les soutiens financiers aux clubs sportifs, aux associations et aux comités de villages, Mohand Ait Braham a fait fabriquer des centaines de chaises floquées du logo de son entreprise, qu’il mettait gratuitement à disposition des familles pour les fêtes ou les funérailles. « Il se rend chez tout le monde, que ce soit pour des mariages ou des deuils », confie cet habitant à TSA.
C’est pourquoi sa disparition a suscité une vive émotion. Hospitalisé d’abord à Akbou, il avait été transféré en France où il s’est éteint.
L’hommage de Lounis Aït Menguellet
Le chanteur Lounis Aït Menguellet a salué « un homme d’une grande sagesse, d’une modestie exemplaire et d’une générosité sincère », ajoutant que son départ laisse « un grand vide dans nos cœurs et dans notre société ».
Le groupe Ifri a, de son côté, rappelé que « son parcours exceptionnel et son engagement ont marqué durablement le secteur, laissant derrière lui une marque forte et un héritage qui continueront de vivre ».
Père de deux enfants, dont l’aîné est décédé il y a une trentaine d’années, Da Mohand sera rapatrié jeudi et inhumé vendredi dans son village natal, auprès des siens.
Il rejoint ainsi au panthéon des entrepreneurs de la vallée de la Soummam ceux qui ont façonné l’industrie algérienne : Mohand Batouche de Général Emballage, décédé le 4 juillet 2019 à 78 ans, Lounis Hamitouche de la Laiterie Soummam mort le 19 avril 2025 à l’âge de 79 ans et Laid Ibrahim, fondateur d’Ifri, décédé vendredi 17 mai 2024 à l’âge de 85 ans.