Consommation

Prix du mouton de l’Aïd : la fièvre aphteuse, une aubaine pour les spéculateurs

Si dans beaucoup de pays, à l’instar de l’Amérique du Nord, l’Amérique centrale, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon ainsi que la plupart des pays européens, la fièvre aphteuse a été complètement vaincue, en Algérie, elle continue à faire autant de mal que de peur. Elle est même devenue récurrente et revient annuellement – ou presque – frapper à nos portes.

Dans ce climat de psychose, éleveurs et consommateurs, d’un côté, et la tutelle, d’un autre, se renvoient la balle. Le ministère, évoquant des causes climatiques, explique la propagation de l’épidémie par le non-respect des règles de sécurité et d’hygiène définies par les spécialistes ainsi que le déplacement illicite du cheptel.

Mais pour Mustapha Zebdi, président de l’Association de protection et orientation du consommateur et son environnement (Apoce), l’une des raisons qui favorisent la propagation de la fièvre aphteuse est que les moyens préventifs mis en œuvre ne sont pas à la hauteur du défi. « La démarche est là. Elle est bien définie. Mais son lancement prend souvent du retard », explique-t-il.

Le trafic qui se tient à la frontière est ne serait pas innocent dans la menace qui pèse sur le cheptel national, somme toute, maigre : près de 19 millions de bovins dont 971.500 vaches laitières et à plus de 28 millions d’ovins dont 17,7 millions de brebis. « Il faut remédier à ce trafic si l’on veut combattre la fièvre aphteuse », plaide M. Zebdi.

Plaidoyer pour une base de données

L’une des mesures prises cette année par le ministère pour contrecarrer la propagation de la fièvre aphteuse est la fermeture de nombreux marchés à bestiaux, et ce à quelques jours de l’Aïd El Adha. Une mesure « préventive » qui n’est pas à arranger ni les éleveurs ni les foyers algériens.

Pour l’Apoce, au lieu de prendre des mesures aussi extrêmes qui pénalisent plus d’un, la tutelle aurait dû opter pour la constitution d’une sorte de base de données nationale à même de permettre un suivi continuel de l’état de santé du cheptel. L’une des procédures que l’Apoce propose est de contraindre les vendeurs à délivrer des bons de transactions où il sera, entre autres, mentionnés le nom du vendeur ainsi que la date de la transaction. Cela permettra de tracer le chemin parcouru par les bêtes et, de là, une meilleure localisation des foyers épidémiques.

L’autre visée d’une base de données nationale bien constituée et continuellement mise à jour est de repérer les éleveurs qui font appel à une utilisation excessive des compléments alimentaires. Rappelons que l’excès en la matière, selon les spécialistes, accélère la putréfaction des viandes.

Un argument pour la spéculation à la veille de l’Aïd

Créer la rareté là où elle n’est pas, la fièvre aphteuse et la rapidité avec laquelle la viande peut être putréfiée constituent des arguments assez forts pour les spéculateurs pour convaincre de la hausse des prix. La fermeture des marchés qui ne seront rouverts qu’après la fin de la compagne de vaccination n’a pas manqué de jeter de l’huile sur le feu. On parle déjà d’une hausse vertigineuse des prix. La même bête qui se vendait, il y a quelques jours, à 40 000 Dinars est aujourd’hui à 60 000 Da.

Pour l’Apoce, qui réfute toute rareté, cela est aussi dû au fait que les éleveurs ne s’impliquent pas directement dans la vente, notamment dans les grandes villes où les autorités n’aménagent pas des espaces adéquats. « Un marché de 20 mètres sur 20 mètres est loin d’arranger les grands éleveurs », s’insurge M. Zebdi. Cet état des faits encourage l’intervention des intermédiaires qui ont tout le loisir de vendre aux prix qui leurs conviennent.

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