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Ramadan : la flambée des prix est-elle une fatalité ?

Ramadan : la flambée des prix est-elle une fatalité ?

Comme à chaque début de ramadan, les prix de certains produits flambent. Comme chaque année aussi, les plus touchés sont les fruits et légumes et les viandes, avec une exception cette fois pour les viandes blanches, restées à des prix abordables.

Autre habitude ancrée, les promesses des responsables à l’approche du mois sacré, d’être présents pour faire face à la spéculation et de garantir la disponibilité des produits demandés.

« Les produits sont disponibles en quantités suffisantes et une hausse des prix sera injustifiée en ce mois sacré (…) Les producteurs se sont engagés à assurer la marchandise à des prix raisonnables et les inspecteurs du ministère du Commerce veilleront au respect de cet engagement sur le terrain. »

Ces propos ont été tenus à la veille du ramadan 2018 par le ministre du Commerce d’alors, Saïd Djellab. Il les a réitérés en 2019, et son successeur, Kamel Rezig, ne s’est pas empêché d’y aller de ses promesses d’abondance pour le ramadan 2020.

Rezig a promis aux Algériens de la viande bon marché, mettant lui aussi en avant l’engagement des producteurs, avec lesquels il aurait passé un deal non écrit dès son entrée en fonction : ne pas ouvrir le marché à l’importation contre l’engagement des éleveurs à maintenir les prix à un niveau abordable.

Le prix de 800 Da avancé avait paru irréaliste, mais le ministre du Commerce avait pris le risque de l’annoncer publiquement. Trois mois après, il déchante. Au premier jour du ramadan 2020, le prix des viandes rouges était en moyenne de 1600 dinars et le ministre ne cache pas sa déception.

Il se dit « trahi ». « Où sont passées les 28 millions de têtes de bétail dont les maquignons et les professionnels de cette filière ont parlé ? Où sont vos promesses de vendre cette année à des prix raisonnables ? », fulmine-t-il sur les réseaux sociaux, non sans promettre de « sévir ». Au marché de gros des fruits et légumes de Boufarik où il s’est rendu le même jour, le ministre n’a pas été moins déçu. Les prix, comme chaque année à pareille occasion, ont flambé.

Les responsables promettent depuis vingt ou trente ans des prix abordables pour le ramadan et de sévir le cas échéant. Kamel Rezig n’est pas le premier à ne pas tenir sa promesse. Il a juste fait un peu plus de bruit que les autres.

En fait, les dysfonctionnements et les dérèglements risquent d’être une fatalité tant que des réformes profondes ne sont pas engagées dans toutes les filières de production et les circuits de distribution.

En l’absence de l’obligation de facturation, les services de contrôle ne disposent d’aucun outil pour déterminer lequel des intervenants a pris une marge indécente. Le défaut de facturation est une saignée pour toute l’économie nationale. Les autres lacunes sont dans l’absence d’une véritable grande distribution et de circuits de stockage, seuls garants de la régularité de l’approvisionnement. Ce sont des mécanismes universels qui prennent en charge la régulation automatique du marché.

Pour le reste, il y a la règle tout aussi universelle de l’offre et de la demande. On l’a vu par le passé, les rares fois où la flambée des prix a été épargnée aux ménages algériens au ramadan, c’est lorsque celui-ci coïncidait avec des périodes d’abondance de la production agricole.

Il n’y a aucun mal à l’admettre : la demande sur les fruits et légumes, les viandes et d’autres produits augmente pendant le ramadan. Il s’agit donc de les rendre disponibles à longueur d’année, dans la mesure du possible, grâce à des circuits de stockage et de distribution efficaces et conformes aux standards universels.

Au lieu de compter sur la générosité et la conscience des commerçants, des agriculteurs ou des éleveurs, l’État ferait mieux d’engager une réforme globale, non seulement du secteur du commerce, mais de toute l’économie.

Tout est question de mécanismes et de régulation et non de ressources. Il suffit de se rappeler que même lors des années du pétrole cher et de l’importation sans limites, la flambée des prix n’épargnait pas les marchés algériens à chaque ramadan.

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