Politique

Retour en force du hirak : et si tout était à refaire pour le pouvoir ?

Comme pour le 22 février, date charnière qui a marqué le début de la révolution populaire pour le changement, on parlera sans doute d’un avant et d’un après 20 septembre 2019.

Ce trente-et-unième vendredi, le hirak algérien a retrouvé sa vigueur des semaines mémorables de mars et avril. Et ce ne sera pas sans conséquences.

Les marées humaines qui ont déferlé sur les rues d’Alger et de toutes les villes du pays, ont, telle une crue d’automne, au moins ébranlé les plans d’un pouvoir replongé dans ses certitudes le temps d’un été où, pour diverses raisons, les Algériens ont été moins nombreux à manifester.

Il est même à se demander si elles ne les ont pas emportés et si tout n’est pas à refaire pour les tenants de la décision qui ont un peu trop vite crié victoire en engageant irréversiblement le processus de l’élection présidentielle qui devait marquer l’aboutissement de leur solution « constitutionnelle » et asseoir définitivement le fait accompli.

L’usage de l’imparfait n’est pas fortuit, car la première grosse incertitude qui découle de cette démonstration de force concerne la tenue même du scrutin du 12 décembre, maintenant que son rejet par la rue est une évidence que la propagande officielle aura du mal à nier.

Peut-on en effet envisager sérieusement l’organisation d’une élection présidentielle, de surcroît sereine et transparente, dans ces conditions, avec un peuple qui marche par millions dans les rues, nonobstant les autres formes de contestation qui pourraient naître d’ici là ?

S’il ne subsiste aucune illusion à se faire quant à la participation de la population, l’entrée en lice de candidats au moins crédibles n’est pas acquise non plus, en ce sens que ceux qui ont fait un pas vers la candidature, comme Ali Benflis, devraient longuement réfléchir après le tsunami de ce 20 septembre.

Tout comme la résolution du pouvoir d’aller vers les urnes, la décision de certains personnages de la classe politique de ne pas fermer la porte à une participation a été prise au plus fort du creux trompeur qu’a connu le hirak pendant l’été.

Un tsunami qui emporte bien des certitudes

Trompeur, car le retour en force de la mobilisation après la rentrée confirme que son recul à partir de la fin mai était dû principalement à la canicule et aux départs en vacances et non à quelque satisfaction des Algériens de la voie empruntée par le « nouveau » pouvoir, à la lassitude ou encore moins à l’espoir d’une solution miracle qui surviendra par les urnes.

Ce sont les limites de la gestion sécuritaire d’une crise politique qui ont été mises à nu par cette forte mobilisation des Algériens qui survient simultanément à une vague sans précédent d’emprisonnement de manifestants et de militants politiques et au lendemain de l’annonce d’une mesure extrême, soit la fermeture de la capitale et la saisie des véhicules transportant les manifestants.

Cette dernière menace a aussi tordu le cou à une contre-vérité, un cliché qui a grandement contribué à enfoncer les tenants de la décision dans la voie de l’impasse, celui qui veut que les manifestations à Alger soient gonflées par des contingents de citoyens acheminés à partir d’autres régions.

Au risque de se répéter, le tsunami de ce trente-et-unième vendredi a emporté bien des certitudes et mis au jour de nouvelles réalités difficiles à nier.

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