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Sit-in contre Ennahar TV : l’intrigante présence de Saïd Bouteflika

Sit-in contre Ennahar TV : l’intrigante présence de Saïd Bouteflika

Le rassemblement organisé ce samedi 3 juin devant le siège de l’Autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV), à Alger, a offert une scène inédite lorsque Saïd Bouteflika s’est présenté aux côtés des citoyens.

Le frère du chef de l’État s’est en effet  déplacé pour saluer l’écrivain Rachid Boudjedra, qui a été victime d’une caméra cachée douteuse perpétrée par Ennahar TV, avant de prendre congé de l’événement sous les huées de manifestants peu contents de voir une figure centrale du pouvoir se présenter à « leur » sit-in.

La présence de Saïd Bouteflika au rassemblement de soutien à Boudjedra a pris tout le monde par surprise et a provoqué de nombreuses interrogations et spéculations quant aux intentions affichées ou présumées du conseiller du Président. Bien que personnalité publique, Saïd Bouteflika n’a pas tenu de déclaration officielle au sujet de sa présence. « C’est une ignominie ce qu’ils ont fait », a dit Saïd Bouteflika à Rachid Boudjedra durant leur rencontre. Une phrase lourde de sens pour Ennahar TV, à qui la rumeur colle une relation privilégiée avec le frère du Président.

| VOIR AUSSI : VIDÉO. ​Ce qu’a dit Saïd Bouteflika à Rachid Boudjedra

Car ces dernières années, Ennahar TV s’est élevée au rang de média le plus proéminent du paysage télévisuel algérien. Propriété d’Anis Rahmani, la chaîne a réussi à s’établir comme étant le canal de communication officieux du pouvoir, relayant des informations exclusives au sujet des plus hautes sphères de l’État, reléguant presque au second rang les canaux de communication officiels et habituels que sont l’APS et l’ENTV.

Ennahar TV s’est également distinguée de fait par une immanquable aura d’impunité. Malgré les polémiques quant à l’éthique du média, malgré les fausses informations qui se mélangeaient souvent aux vraies, malgré les multiples chasses aux sorcières lancées par la chaîne, jamais Ennahar n’a été perturbée par les autorités.

Aujourd’hui, un changement semble avoir peut-être été amorcé. Saïd Bouteflika, dont les apparitions publiques sont rarissimes, n’est pas sorti de l’ombre sans avoir eu la volonté d’adresser un message. Reste à savoir de quel message il s’agit.

Est-il apparu publiquement car sincèrement mû par l’humiliation infligée à un vieil homme, et a voulu lui faire part de sa solidarité ? Peu probable. Saïd Bouteflika aurait pu agir au même effet en rencontrant Boudjedra dans un cadre strictement privé.

Est-il apparu publiquement avec la volonté de se démarquer de cette étiquette l’associant à Ennahar aux yeux de l’opinion publique algérienne ? Peu probable également, au risque même d’engendrer l’effet inverse. Sa sortie très médiatisée a en effet toutes les chances de renforcer de manière durable ce sentiment de connivence entre les deux parties.

Et si Saïd Bouteflika a tout simplement voulu envoyer un avertissement à Ennahar TV pour que cessent, ou du moins s’atténuent, les dérives récentes et très médiatiques de la chaîne qui se répercutent inévitablement sur l’intéressé lui-même ? Une chose semble cependant à peu près sûre : les jours de la chaîne ne semblent pas comptés.

Il y a en effet pour le pouvoir des leviers bien plus efficaces qu’une sortie publique pour affecter négativement et fondamentalement un média télévisuel en Algérie. À commencer par l’état d’instabilité juridique avancé dans lequel sont soumises les chaînes de télévision, qui permet au pouvoir de fermer une chaîne sans justification et dans les plus brefs délais si tel est son désir.

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