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Sortie du général Ali Ghediri : une affaire éminemment politique

Sortie du général Ali Ghediri : une affaire éminemment politique

Un communiqué, un éditorial de la revue El Djeich puis un discours en vidéoconférence. Et à chaque fois, le même ton ferme et la même rhétorique crue.

Depuis que le général-major à la retraite Ali Ghediri s’est permis de rappeler à Gaid-Salah ses « responsabilités », celui-ci ne rate pas une occasion pour le remettre à sa place.

En visite à Oran ce mardi 8 janvier, le chef d’état-major de l’ANP a consacré son intervention devant les troupes de la région ouest à la sortie de Ali Ghediri.

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Dans le fond, il n’y a rien de nouveau dans le discours de M. Gaid-Salah qui n’a fait que répéter ce que le communiqué du MDN du 30 décembre et l’édito de l’organe central de l’armée avaient contenu comme rappels à l’ordre et mises en garde.

Il est encore question d’« individus et parties mus par des ambitions démesurées et animés par des intentions sournoises », « d’individus qui font prévaloir leurs intérêts personnels étriqués et leurs ambitions démesurées » « pas en rapport avec leurs véritables capacités sur plus d’un plan », d’« affabulations débridées, découlant d’un narcissisme maladif », et, bien sûr, des « cercles qui les commanditent ».

Le général de corps d’armée a aussi réitéré la menace de sévir, rappelant que « l’institution se réserve le droit de faire appliquer à l’encontre de ces individus les mesures légales appropriées ».

Plus que dans la teneur du discours, l’intérêt réside donc dans cette insistance de l’armée à désapprouver l’initiative d’un de ses retraités et à mettre en garde ceux qui seraient tentés par une déviance similaire.

Autre détail qu’on ne peut ne pas relever, l’intégralité de l’allocution du chef d’état-major, du moins telle qu’elle a été rendue publique par la DCIO (direction de la communication de l’ANP), est consacrée à ce qu’il convient désormais d’appeler « l’affaire Ali Ghediri».

Cela révèle au moins que l’affaire est prise très au sérieux et Gaid Salah le dit d’emblée dans son allocution de ce mardi en la qualifiant d’ « importante question ».

« Je tiens, à cette occasion, à rappeler voire attirer l’attention sur cette importante question où certains individus et parties mus par des ambitions démesurées et animés par des intentions sournoises ont pris l’habitude, à l’approche de l’échéance électorale présidentielle, de tenter de préjuger, sans véracité, des prises de positions de l’institution militaire vis-à-vis des élections présidentielles, et s’arrogent même le droit de parler en son nom par tous les moyens, notamment les médias », a-t-il dit.

Le chef de l’armée n’avait pas besoin de le préciser, l’affaire semble plus qu’importante pour le haut commandement de l’ANP pour rebondir dessus autant de fois en moins de dix jours.

Une insistance d’autant plus incompréhensible qu’on n’est pas devant une polémique. Depuis son interview parue dans le quotidien El Watan le 25 décembre et son appel à Gaid-Salah à « assumer ses responsabilités », le général à la retraite n’a rien dit d’autre.

Il n’a répondu ni aux qualificatifs peu glorieux dont l’a affublé, sans le citer certes, le premier communiqué du MDN, ni aux accusations qu’un autre officier à la retraite a proférées à son encontre sur une chaîne de télévision. Et on doute fort que ce soit faute de sollicitations des médias.

À sa place, ce sont des partis politiques qui se sont chargés de commenter la réaction inattendue de l’ANP. Le Parti des Travailleurs a estimé que « l’incursion du ministère de la Défense nationale à travers un communiqué étrange dans le débat politique ne fait qu’ajouter à la confusion et aux congestions déjà étouffantes », tandis que le RCD a pointé « les réactions sélectives du chef de l’état-major de l’Armée nationale populaire » qui « ne travaille pas à rassurer les citoyens sur la neutralité de l’armée vis-à-vis de tous les acteurs politiques ».

« Autant l’interpellation adressée à un officier supérieur à la retraite surprend par sa célérité et sa fermeté, autant le silence qui a accompagné un autre officier proche du cercle présidentiel interpelle », a jugé le parti de Mohcine Belabbas ce week-end.

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À ceux-là et à tous ceux qui se sont exprimés sur l’affaire ces deux dernières semaines, Gaid Salah n’a pas répondu, jugeant sans doute et à juste titre que l’ANP n’a pas à polémiquer avec des acteurs politiques, libres du reste d’avoir les avis qu’ils veulent même sur des questions qui concernent l’armée. Mais à Ali Ghediri, il a répondu trois fois plutôt qu’une.

S’il persistait encore un doute que cette affaire dépasse le manquement d’un officier à la retraite au droit de réserve imposé par la loi depuis 2016, il vient de se dissiper avec cette insistance de la haute hiérarchie à dénoncer des « cercles occultes » qui auraient « commandité » la teneur de l’interview parue dans El Watan.

N’ayons pas peur des mots, l’affaire est éminemment politique et ce sont les trois textes du MDN qui l’insinuent en la mettant à chaque fois dans le même contexte, soit « l’approche de l’élection présidentielle ». Reste à percer le grand mystère : dans quoi est mouillé le général Ghediri et quelles sont ces parties « occultes », dont Gaid Salah parle, et qui tireraient les ficelles ?

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