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Subventions : pourquoi l’année 2019 ne sera pas l’année des réformes

Subventions : pourquoi l’année 2019 ne sera pas l’année des réformes

Depuis quelques jours, les médias nationaux reprennent en chœur les déclarations du ministre des Finances qui évoquent une possible réforme du système de subventions « dès 2019 ».

Une liste de produits serait déjà prête dans laquelle figure au premier rang les tarifs de l’électricité et le prix des carburants et même « peut être » ceux de l’eau.

« Il est clair que cela ne peut pas continuer comme ça pour une simple question d’équité sociale.», a déclaré avec beaucoup de conviction apparente , Abderrahmane Raouya, ce lundi 2 juillet, à la Chaîne III de la radio nationale.

Pour preuve du sérieux de cette annonce, le ministre a ajouté qu’une commission travaille sur ce dossier qui s’est même faite aidée « un peu » par la Banque Mondiale.

2019, une grande année de réforme ?

À la fin de l’année dernière, de nombreux spécialistes avaient déjà été surpris par une autre annonce toujours à propos de l’année 2019. La trajectoire budgétaire annexée à la loi de finance 2018 promettait très solennellement, sans doute pour faire passer la pilule d’un gonflement considérable des dépenses publiques, « un retours à la discipline budgétaire dès 2019 avec des dépenses qui devraient être réduites à 7.500 milliards de dinars en 2019 (contre 8600 milliards de dinars prévus cette année) ».

Ce sont les dépenses d’équipement qui devraient faire les frais de cette cure d’austérité avec une réduction de 30% en 2019. Le déficit du trésor public devrait dans ces conditions disparaître presque complètement pour atteindre 55 petits milliards de dinars seulement en 2019.

Si on en croit donc les engagements du gouvernement, l’exercice 2019 s’annonce comme une grande année de réforme économique au cours de laquelle on va commencer non seulement à réaliser l’ajustement budgétaire et l’élimination des déficits attendus depuis 2014 mais également la grande « réforme de structure » du système de subventions qui domine les politiques publiques depuis plusieurs décennies.

Le scepticisme des institutions financières internationales

Ces différentes annonces ont de quoi susciter une certaine perplexité. Curieusement, les réactions les plus sceptiques ne sont pas venues jusqu’ici des médias nationaux mais plutôt des institutions financières internationales.

C’est ainsi qu’au mois d’avril dernier, la Banque Mondiale notait dans son dernier rapport consacré à l’Algérie qu’« il sera difficile pour le taux de croissance du PIB de dépasser le seuil de 2% sur la période 2019/2020, ce qui représente une progression anémique pour un pays à revenu intermédiaire comptant une très forte proportion de jeunes ».

La même institution n’hésitait pas à ajouter que les autorités algériennes auront du mal dans ce contexte à « résister à la tentation de retarder à nouveau le rééquilibrage des finances publiques » promis par le gouvernement pour l’année prochaine.

Apparemment, le contexte électoral dans lequel vont s’effectuer les prochains arbitrages économiques du gouvernement n’a pas échappé aux institutions financières internationales.

La LFC 2018 dopée par les cours pétroliers

Les prochaines échéances électorales, qui de façon évidente ne plaident pas en faveur de réformes nécessairement impopulaires, ne sont d’ailleurs désormais plus seules en cause pour inciter le gouvernement à temporiser.

Le redressement des cours pétroliers depuis le début de l’année ainsi que les perspectives dans ce domaine pour les prochains mois vont alléger fortement les contraintes qui pèsent à court terme sur les finances publiques.

Si on pouvait encore avoir des doutes sur les intentions réformatrices du gouvernement à ce sujet, la loi de finances complémentaire pour 2018 qui vient d’être adoptée par le Parlement les a certainement dissipés.

Elle donne très probablement un avant-goût de ce que seront les prochaines orientations économiques de l’Exécutif en matière budgétaire.

Avec des recettes de fiscalité pétrolière nettement plus importantes que prévu (environ 400 milliards de dinars rien qu’au premier semestre), le gouvernement aurait pu, ainsi que l’y invitait beaucoup d’experts nationaux et étrangers, décider de réviser en baisse le déficit du budget et par ricochet le niveau du recours à la planche à billets.

Et bien pas du tout. Les économies réalisées sur le financement du déficit vont être consacrées à la dotation du Fonds national de l’investissement, à hauteur de 500 milliards de dinars, et le programme de financement non conventionnel est maintenu intégralement.

Le FMI qui venait juste de conseiller au gouvernement de profiter de l’embellie du marché pétrolier pour abandonner le recours à la planche à billets dès 2018 en est pour ses frais.

La réforme des subventions toujours « à l’étude »

De façon très classique, le nouveau contexte pétrolier ne va pas seulement favoriser le maintien d’un niveau élevé de dépenses publiques, en 2019. Il va également permettre de différer les réformes de structure « promises » pour l’année prochaine.

Dans ce domaine aussi, le PLFC 2018 a donné le ton. La quasi-totalité des propositions de nouvelles taxes destinées à muscler la fiscalité ordinaire ont été abandonnées en chemin. Sans parler des éphémères projets de mise en concession des fermes d’État qui ont connu le même sort que le modeste programme de privatisation proposé par Ahmed Ouyahia en début d’année .

Pour se convaincre que l’année 2019 a toute les chances de prolonger l’exercice de surplace et de maintien du statu quo de l’économie algérienne, il suffit de prêter une oreille attentive aux dernières déclarations du ministre des Finances.

« En tout état de cause, rien ne sera fait tant qu’on ne disposera pas de l’ensemble des paramètres pour la mise en place d’un nouveau système. On ne touchera pas à la politique de subventions tant qu’on n’aura pas réglé définitivement le problème de l’identification des ménages, le montant et la manière de procéder. Cela va se faire avec l’ensemble des pouvoirs publics. Après la fin des études, on se retrouvera autour d’une table pour en rediscuter. Par la suite, une grande campagne de communication sera dirigée vers nos concitoyens pour leur expliquer comment on doit procéder. Un débat national ? Pourquoi pas ».

Rien de bien nouveau donc par rapport à ce qui est maintenant prévu de puis près de 3 ans . Ce que Raouya annonce, c’est dans le meilleur des cas un programme quinquennal. Pas un programme pour 2019.

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