En France, il devient de plus en plus difficile d’obtenir un titre de séjour. Alors que les étrangers galèrent déjà pour régulariser leur situation administrative, le 23 janvier dernier, le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a diffusé une nouvelle circulaire, en remplacement à celle de Valls, en vigueur depuis 2012, pour leur compliquer davantage l’existence.
Pour rappel, la circulaire Valls permettait de régulariser 30.000 sans-papiers chaque année, et ce, par le travail ou pour des raisons de Vie privée et familiale. Celle de Retailleau vise à revoir ce chiffre à la baisse.
La circulaire Retailleau confine les régularisations par le travail à une liste de métiers en tension et conditionne les régularisations pour des raisons de vie privée et familiale à 7 ans de présence en France (5 sous la circulaire Valls), une attestation de maîtrise de français ainsi qu’à l’absence d’une OQTF de moins de trois ans.
« Il faut travailler pour avoir un titre de séjour et un titre de séjour pour travailler »
Pour Sarah, une sans-papiers algérienne, « c’est de pire en pire pour les immigrés ». Vivant à Rouen avec son mari et ses deux enfants, cette jeune femme peine à trouver un travail, tandis que son époux, également sans-papiers, enchaine les petits boulots au noir.
Un an et demi après son arrivée en France, Sarah peine à voir le bout du tunnel. Elle confie au journal français Le Monde que les patrons ont peur de l’embaucher vu qu’elle est sans-papiers, mais qu’elle est obligée de décrocher un contrat de travail pour avoir un titre de séjour. « Je ne comprends pas, il y a une contradiction », s’étonne-t-elle.
Ahmed, franco-algérien, à la tête d’une entreprise de peinture, tente de justifier pour sa part la crainte des employeurs quand il s’agit d’embaucher un sans-papiers en France. Il confie qu’il a lui-même voulu fournir à l’un de ses employeurs les documents nécessaires pour demander une régularisation, mais qu’il redoute des sanctions administratives.
Ahmed met en avant le cas de deux entrepreneurs de son entourage, l’un marocain et l’autre turc, à qui l’on a retirer leurs titres de séjour car ils « avaient embauché des sans-papiers et fourni une attestation pour qu’ils soient régularisés ».
Titres de séjour : « On demande aux gens des parcours invraisemblables »
Emé, une femme de ménage sans-papiers, reçoit la circulaire Retailleau comme un véritable coup de massue. Elle qui attendait depuis cinq ans de déposer sa demande de régularisation, la voilà désormais obligée d’attendre deux ans de plus.
Fadela, Marocaine naturalisée française, attend quant à elle que la préfecture délivre un titre de séjour à sa maman de 84 ans tandis que Attanda, une nigériane de 30 ans, est toujours sans-papiers et vit à la rue alors qu’elle est arrivée en France depuis 8 ans.
Selon Viviane Hue, assistante sociale à la retraite et bénévole à la Cimade de Rouen, « on demande aux gens des parcours invraisemblables en leur mettant encore plus de bâtons dans les roues ». Elle souligne que la circulaire Retailleau a déjà changé les réflexes.
La bénévole indique qu’au lieu de donner les certificats de scolarisation de leurs enfants, beaucoup de sans-papiers présentent, en guise de justificatifs de leurs intégration en France, « des attestations de visites de musées et aussi des lettres de voisins pour prouver qu’ils se conduisent bien et ne font pas de bruit ».