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Transition démocratique en Algérie : pourquoi les futurs dirigeants n’auront pas la tâche très difficile

Transition démocratique en Algérie : pourquoi les futurs dirigeants n’auront pas la tâche très difficile

Le soulèvement populaire en Algérie a connu son quatrième vendredi avec encore plus de mobilisation et de détermination. D’ores et déjà des scénarios sont évoqués ici et là pour l’après changement de système, principale revendication de la rue.

Parmi les plus redoutés, celui de voir le nouveau pouvoir issu des urnes échouer à satisfaire les revendications socio-économiques de la population et devoir par conséquent faire face dès le départ à la colère de larges franges de la société. Un peu comme cela s’était passé en Tunisie au lendemain de la révolution qui a mis fin au règne de Benali en 2011.

Pourtant, comme les scénarios syrien et libyen, brandis comme un épouvantail dès le début du mouvement, la situation connue par nos voisins tunisiens n’a que très peu de chances, sinon aucune, de se reproduire en Algérie si le système actuel venait à passer la main. Explication.

En décembre 2010, c’est le sort tragique d’un marchand ambulant qui a mis le feu aux poudres en Tunisie. L’immolation par le feu de Mohamed El Bouazizi dans la ville de Sidi Bouzid a mis au jour la grande détresse sociale d’une grande partie de la population tunisienne, laminée essentiellement pas le chômage, et concomitamment, les abus de la police du régime.

La Tunisie de Ben Ali n’était pas un exemple de démocratie ni ne vivait dans une opulence économique. C’est la signification du drame de Sidi Bouzid, qui a eu une réplique absolument similaire au Maroc en 2016, lorsqu’un autre marchand ambulant est mort à El Hoceima, broyé dans une benne à ordures où la police venait de jeter sa cargaison de sardines. Là aussi l’étincelle a donné lieu à un brasier qui, cependant, n’aura pas la même ampleur ni les mêmes conséquences.

En Algérie, les mouvements sociaux se comptaient par milliers ces dernières années mais aucun n’a débouché sur un soulèvement populaire généralisé. Des drames, il y en a eu aussi, comme des suicides et la fin tragique de nombreux harragas. Il y a eu peut-être une sédimentation des colères et des frustrations, mais le mouvement que connaît le pays depuis près d’un mois a pour étincelle la décision d’un président malade et âgé de briguer un cinquième mandat. Le mouvement est éminemment d’essence politique, par son amorce et ses revendications. En un mot, on n’assiste pas à des émeutes du pain en Algérie. Au contraire, tous les mouvements sociaux qui défrayaient la chronique ces derniers mois, comme ceux des enseignants ou des retraités de l’armée, ont été mis en veille depuis le début de la contestation du cinquième mandat.

La situation sociale de l’Algérie n’est pas un exemple d’opulence, mais s’il y a eu des expressions de colère par le passé c’était aussi à cause des agissements du pouvoir et de sa clientèle qui se faisaient au grand jour : mauvaise gestion, corruption, blocage de l’investissement productif…

Si une nouvelle équipe dirigeante, démocratiquement élue, devrait prendre en main les choses dans les prochains mois ou semaines, elle aura droit à sa période de grâce. Mieux, elle héritera d’une situation financière et économique loin d’être désespérée. Les Algériens se sont peut-être soulevés au bon moment. En tout cas avant qu’il ne soit trop tard.

Les deux principaux indicateurs sont encore au vert, soit les réserves de change qui s’élèvent, malgré leur forte érosion, à 80 milliards de dollars- un matelas dont disposent très peu de pays- et le pétrole, avec 67 dollars le baril, est à près de 20 dollars de plus que le prix de référence retenu dans la loi de finances de l’exercice en cours. En cas de changement, les Algériens maintiendraient au pire leur niveau de vie actuel pendant au moins une année ou deux. Aussi, le futur gouvernement, rien qu’en rompant avec les pratiques actuelles, soit le clientélisme, la corruption, le gaspillage, la surfacturation, l’informel et le transfert illégal de devises, s’offrira une ample marge de manœuvre.

Mais l’atout majeur de l’Algérie demeure le potentiel d’investissement non exploité par le fait de l’incroyable incurie du pouvoir actuel qui a tout fermé. Dans l’agriculture, le tourisme et surtout l’industrie, des dizaines de projets d’envergure n’attendent que le feu vert pour se mettre en place.

Pour certains projets, les machines sont même prêtes et attendent leur dédouanement depuis de longs mois. Il suffit d’une décision administrative pour que des dizaines d’usines d’opérateurs qui ne sont dans les bonnes grâces des décideurs actuels, entrent en production et contribuent à la baisse du chômage et à la hausse du PIB. Il n’y a aucune raison de ne pas le croire, Issad Rebrab a par exemple fait des projections de 15 milliards de dollars d’exportations annuelles pour ses unités de fabrication de membranes.

Quoi qu’il en soit, l’investissement ne se portera que mieux avec la levée des blocages actuels, d’autant plus que beaucoup de secteurs, presque vierges, ont une grande marge de progression, et beaucoup d’infrastructures ont été réalisées durant les années du pétrole cher.

Les belles images de pacifisme et de civisme qu’on a vu lors des manifestations et qui ont fait le tour du monde, devraient aussi contribuer à améliorer l’attractivité du marché algérien, mais aussi de la destination Algérie pour les touristes. L’Algérie a tous les atouts pour devenir le dragon de l’Afrique en très peu d’années.

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