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Un vent de révolte populaire souffle sur l’Afrique

Un vent de révolte populaire souffle sur l’Afrique

Depuis quelques mois, le continent africain est traversé par un vent de contestation populaire sans précédent.

Au Soudan, pays divisé en deux depuis 2011, les manifestations de rue durent depuis le 19 décembre 2018. Après Khartoum, les protestations se sont déplacées vers les autres villes du pays.

Au début du mouvement, les manifestants sont sortis pour protester contre une nouvelle hausse du prix du pain. Le pays connait une grave crise économique, une conséquence visible d’un embargo américain qui a duré vingt ans et de la sécession du Sud qui a gardé les trois quarts des réserves de pétrole.

Résultat, le taux d’inflation dépasse les 70 %. Les prix du médicament ont augmenté de 50 %. La livre soudanaise a été dévaluée trois fois cette année. Le pays manque de ressources en devises, malgré ses exportations agricoles à l’image la gomme arabique (le Soudan est le principal producteur mondial de cette matière épaississante nécessaire à la fabrication des sodas comme le Coca Cola ou les bonbons).

Mais l’embargo américain n’est pas la seule cause des malheurs du Soudan. Le pays, dirigé d’une main de fer par le maréchal Omar El Bachir depuis juin 1989, peine à attirer les investissements étrangers. Le chômage est très élevé et touche 20% de la population.

Rapidement, la contestation sociale a évolué en manifestations politiques pour exiger le départ du régime d’El Bachir, accusé de vouloir s’éterniser au pouvoir après le lancement par ses fidèles du Parti du Congrès de la campagne « 2020 », autrement dit une nouvelle candidature à la présidentielle en 2020. « Je demande aux jeunes de purifier leurs rangs avant qu’on leur cède le pouvoir », a lancé Omar El Bachir, selon une vidéo diffusée par la chaîne Al Araby.

Des manifestations pacifiques

Dans la vidéo, le président soudanais est apparu dansant bâton à la main, comme le veut une certaine tradition du pays, suscitant une vague d’indignation surtout que les forces anti émeutes ont fait usage d’armes à feu.

Le principal opposant, Saddek El Mahdi, leader du parti Al Oumma, a, selon Al Jazeera, dénoncé l’usage de la force ayant entraîné la mort d’une cinquantaine de manifestants. Lui-même persécuté par le régime, El Mahdi a demandé une enquête internationale sur les évènements et sur les arrestations massives des contestataires.

L’Association des professionnels du Soudan (SPA), une sorte de conglomérat de plusieurs unions professionnelles, tente d’encadrer le mouvement en remplacement des syndicats et des partis affaiblis par le pouvoir.

Sur son compte twitter, SPA, qui parle de « thawra » (Révolution), annonce la poursuite des rassemblements et des manifestations dans tout le pays en insistant sur le caractère pacifique de ces actions.

Le hashtag « Moudoun al soudan tantafidh » (Les villes du Soudan se révoltent) fait fureur sur les réseaux sociaux en fédérant tous les groupes en furie contre le régime. Aucun expert n’est en mesure de prévoir l’issue du mouvement dans un Soudan qui a connu plusieurs coups d’Etat militaires depuis son indépendance en 1956 et plusieurs cycles d’instabilité.

Au Zimbabwe, le prix du carburant attise les feux du mécontentement

Autre pays africain en proie à la contestation : le Zimbabwe. La mauvaise situation économique du pays, héritée de l’ère Robert Mugabe, a poussé également la population dans la rue.

Le soulèvement dure depuis une semaine dans un pays où le taux d’inflation s’approche de 50 %. Les prix ont explosé. Selon le site Globalpetrolprices, le litre de carburant au Zimbabwe est de 3,31 dollars. C’est le plus cher au monde !

Le pays connaît une grave pénurie de produits alimentaires. Le Congrès zimbabwéen des syndicats (ZCTU) a organisé la semaine écoulée une grève générale de trois jours, réprimée par la police. Selon l’AFP, Japhet Moyo, secrétaire général du ZCTU, a été mis aux arrêts au niveau de l’aéroport de Harare.

La féroce riposte des forces de l’ordre aux manifestations a provoqué, d’après Reuters, une douzaine de morts et des dizaines de blessés. Mais le mouvement de faiblit pas. D’autres manifestations sont prévues par Tajamuka, le mouvement qui mène la protestation.

L’armée est sortie des casernes pour se déployer dans plusieurs villes du pays. Emmerson Mnangagwa, qui a succédé à Robert Mugabe, ne sait plus comment répondre à la population au moment où les économistes craignent une nouvelle hyperinflation (comme celle de 2008) avec une monnaie sans valeur et une économie à genoux.

Le nouveau chef de l’Etat, un ancien proche de Robert Mugabe tombé en disgrâce, avait brièvement suscité l’espoir en prenant le pouvoir fin 2017. Il avait promis « un nouveau chemin » pour le pays après des années de crise économique et de répression. Mais le régime Mnangagwa « n’est pas un gouvernement réformiste, il fait usage des mêmes méthodes, de la même brutalité », estime Dewa Mavhinga, directeur régional de Human Rights Watch (HRW).

En Guinée, la cherté de la vie provoque l’irritation de la population

En Guinée, les Forces Sociales de Guinée (FSG) envisagent d’organiser une marche de colère, ce mardi 22 janvier 2019, pour dénoncer la cherté de la vie, « la corruption généralisée » et protester contre la volonté du président Alpha Condé, au pouvoir depuis 2010, d’amender la Constitution aux fins de pouvoir se représenter en 2020 pour un troisième mandat.

Les autorités ont, selon le site MosaïqueGuinee, interdit la marche en s’appuyant sur une décision du ministère de l’Intérieur datant de juillet 2018. Les FSG se disent, dans leurs déclarations, déterminées à organiser l’action de rue par tous les moyens et invitent les guinéens à « un sursaut national à travers une série de protestations ».

La presse de Conakry évoque la crainte d’affrontements dans un pays qui n’a pas les mêmes difficultés économiques que le Zimbabwe avec une croissance s’approchant des 10 % mais avec un taux de pauvreté qui reste très élevé.

En RD Congo, la situation demeure floue

En République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre), la situation demeure floue et tendue après l’élection de Félix Tshisekedi, nouveau président de la République en remplacement à Joseph Kabila, le 30 décembre 2018.

Malgré les contestations d’une partie de l’opposition et les réserves molles de l’Union africaine, la Cour constitutionnelle a confirmé les résultats du vote, dimanche 20 janvier. Martin Fayulu, candidat de la coalition Lamuka (opposition), réclame, lui aussi, sa victoire à la présidentielle et crie à la fraude.

Félix Tshisekedi devrait être investi le jeudi 24 janvier 2019 à Kinshasa, selon Jeune Afrique. Les partisans de Martin Fayulu ne comptent pas baisser les bras et accusent Félix Tshisekedi d’avoir noué « une alliance secrète » avec Joseph Kabila qui n’a décidé de se retirer de la course à la présidentielle qu’après de fortes pressions internationales, notamment américaines.

Soutenu par l’Eglise catholique, qui s’est mêlée du débat politique en désignant des observateurs électoraux, Martin Fayulu s’est déclaré « président légitime » de la RD Congo, pays miné depuis longtemps par la corruption, les luttes intestines et les rebellions à répétition qui ont fait des milliers de victimes au fil des ans et retardé considérablement le développement économique du pays.

L’économie du pays demeure en grande partie soutenue par le secteur extractif (Cobalt, cuivre, uranium, argent, zinc, diamant, tungstène, or….). La RDC exporte 75 % de ce qu’elle extrait de son sous-sol.

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