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À Alger, le mouton de l’Aïd entre 25000 et 170000 DA

À Alger, le mouton de l’Aïd entre 25000 et 170000 DA

Les prix des moutons, pour cette année, varient entre 25 000 et 170 000 DA à Alger. Il y en a en principe pour toutes les bourses.

Sauf que ceux qui affichent les 25 000 Da sont d’une très – un peu trop d’ailleurs – petite taille. Selon un éleveur installé momentanément à Cheraga, dans la banlieue Ouest d’Alger, un mouton à ce prix ne pèserait pas plus de 25 kilos, et la quantité de viande qu’on peut en tirer ne dépasserait pas les 16 Kilos.

Pour ceux dont les prix varient entre 150 000 Da et 170 000 Da, c’est une autre histoire. Leur poids peut atteindre jusqu’à 150 kilos, et la viande qu’on peut en tirer peut aller jusqu’à 110, voire 120 kilos.

Selon des éleveurs, il n’y a que l’accouplement de la brebis d’Ouled Djellal et du mouton de Djelfa qui est à même donner de pareils colosses. « C’est la meilleure race », atteste un éleveur fier de sa marchandise.

Le prestige et le désir de se distinguer jouent un rôle dans l’acquisition de ce genre de bêtes imposantes, souvent, aux longues cornes, puisque un petit calcul révèlera qu’un kilo de leur viande reviendra à plus de 1 500 Da. « Les Algériens aiment bien les moutons avec de longues cornes. Ça amuse surtout les enfants », explique le même éleveur.

« Ce sont des bœufs ! », commente un homme d’un certain âge venu s’enquérir des prix. Et d’ajouter quant aux moutons de 25 000 da : « ceux-là c’est juste pour égorger quelque chose. Sinon ce sont des chats sous forme de moutons ».

A vrai dire, ce n’est qu’à partir de 40 000 Da qu’on peut s’offrir un mouton de taille acceptable. Et si l’on va jusqu’à 55 000 Da c’est un beau bélier qu’on peut s’offrir pour le sacrifice de l’Aïd.

« C’est ce que les gens regardent le plus, assure Ismail, un revendeur. C’est loin d’être à la portée de tout le monde, mais ceux qui sont à l’aise financièrement préfèrent de loin ceux-là ».

Une augmentation de 5 000 Da

Selon les éleveurs et les revendeurs, les prix des moutons s’expliquent par la cherté des intrants de l’élevage ovin. Ainsi un quintal d’orge coûte 3 500 Da. Le maïs, quant à lui, est cédé à 3 200 Da le quintal. Une botte de foin se vend, selon les opérateurs, entre 1 000 et 1 100 Da.

« C’est tout à fait normal que les prix des moutons atteignent ces niveaux », justifient différents opérateurs. Et il faudra aussi inclure les prix des transports qui varient entre 700 Da à 1 500 Da la tête, selon bien évidement la taille.

Selon les estimations des uns et des autres, le prix ont enregistré une hausse moyenne de 5 000 Da comparativement à l’année passée. Éleveurs et intermédiaires se renvoient la balle et s’entraccusent.

Kamel, revendeur, assure ne gagner que 4 000 à 5000 Da sur la tête. « Et ce n’est pas toute la somme qui est un bénéfice, car, durant la période qui s’étale entre l’achat et la vente, le mouton ne va pas vivre uniquement d’eau », se défend Kamel. Et de conclure : « C’est du côté des éleveurs qu’il faut chercher les raisons de la flambée des prix ».

Et du côté des éleveurs, ce n’est pas les arguments qui manquent. Mohammed, originaire de Djelfa, venu vendre lui-même ses moutons à Alger, s’explique : « C’est normal qu’on gagne plus que les revendeurs. Eux (les revendeurs) ne gardent les bêtes que quelques jours, parfois même une journée. Nous, les éleveurs, nous en occupons pendant des mois et des mois. Et, soyez-en sûr, ce n’est pas un travail de tout repos ».

Spéculation et points de ventes non attractifs

Mustapha Zebdi, président de l’Association de protection et d’orientation du consommateur et son environnement (Apoce), regrette cette hausse qui, selon lui, ne trouve aucune explication « économiquement » logique.

« Cette année, il y a eu des pluies abondantes. Normalement, le prix du mouton devrait baisser. Or, c’est tout à fait le contraire auquel nous assistons. C’est une règle exceptionnellement algérienne », s’étonne-t-il.

Pour M. Zebdi, cette hausse peut être expliquée, entre autres, par le retard enregistré dans la préparation de l’Aïd. « Cette année, il y a un retard des rencontres de coordination entre les éleveurs et les autorités concernées, ce qui a fait que les vrais éleveurs n’ont pas encore commencé à exploiter les points de ventes désignées » argue-t-il.

Cette situation, explique M. Zebdi, profite aux spéculateurs qui prennent le relais, ce qui a engendré l’inattendue hausse des prix. L’étroitesse des marchés n’est pas, elle aussi, pour arranger les choses. « Les vrais éleveurs, affirme le président de l’Apoce, ont besoin de grands espaces pour s’imposer et faire que les prix baissent ».

Dans cet amalgame, l’Apoce a proposé, entre autres solutions, de travailler avec des bons de transaction commerciale. Ça permettra de remonter, en cas de besoin, au vendeur et même à l’endroit de l’élevage, notamment s’il y a problème, à l’instar de la putréfaction de la viande. « C’est une culture que nous devons inculquer aux consommateurs », conclut M. Zebdi.

Fais-le cogner !

S’agissant des points de vente dont on en a que trop parlé, beaucoup de vendeurs disent n’avoir aucune autorisation. « C’est ainsi qu’on a toujours travaillé. On loue un espace sur le bord de la route et on étale notre marchandise. Personne n’est jamais venu nous demander quoi que ce soit », raconte un éleveur qui dit ne disposer que d’une carte d’agriculteur et du certificat vétérinaire de bonne santé.

L’autre produit ovin qui se vend à des prix vertigineux est le « mouton de bagarre ». Choisi parmi les meilleures bêtes, il est destiné aux combats qui drainent de plus ne plus d’adeptes. « Moi-même, j’en ai vendu une dizaine », avoue Mohammed, un éleveur.

Mais quels sont les critères selon lesquels on les choisit ? « Il faut d’abord qu’il soit fort et costaud. Ceux qui veulent en acquérir ont tous le même langage : fais-le cogner et je te paie le prix que tu demandes. Cette année, j’en ai vendu à 350 000 Da », raconte Mohammed.

Une fois la bête acquise, on lui taille les sabots et on lui tend la toison pour qu’elle ait meilleure allure. Pour qu’elle acquiert plus de robustesse, on va jusqu’à lui injecter certains traitements. C’est en fait un pur investissement, puisque, les paris autour de la bête peuvent aller à des centaines de milliers de dinars.

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