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Abdelkader Lamoudi : un grand homme de la révolution

Abdelkader Lamoudi : un grand homme de la révolution

« Ce que j’ai fait, je l’ai fait par conviction, en toute conscience. Je n’ai jamais accepté d’entrer dans ce système. Il y a des gens aujourd’hui qui provoquent des polémiques, ils se bouffent entre eux. Ils se chamaillent pour des intérêts, ou pour des places. Je n’ai jamais prêté attention à ces histoires. D’ailleurs, je n’ai jamais donné d’interview à personne. Les gens qui me connaissent savent ce que j’ai accompli. Ma conscience est tranquille. Le reste, c’est dérisoire. »

Ces propos sont de Abdelkader Lamoudi dans une interview accordée à El Watan il y a deux ans. Le moudjahid, décédé lundi à 95 ans, n’aimait pas les feux de la rampe. Il s’est retiré de la scène publique dès que la mission pour laquelle il s’est engagé très jeune, l’indépendance de l’Algérie, était accomplie.

Il avait pourtant des choses à raconter sur l’histoire du mouvement national qu’il a rejoint au début des années 1940, dans la région de Biskra, avant de faire partie de l’Organisation spéciale (OS), du groupe des « 22 » et bien sûr du FLN pendant la Guerre de libération.

Militant de la première heure, son engagement est sincère et son rôle est reconnu et salué par tous. « L’Algérie vient de perdre aujourd’hui un homme de la trempe de ceux qui ont inscrit en lettres d’or leurs hauts faits dans l’Histoire glorieuse de notre pays (…) Cette élite de grands hommes d’Algérie, dont Abdelkader Lamoudi, ont constitué le noyau béni du déclenchement de l’épopée de la Guerre de libération nationale », écrit le président de la République dans ses condoléances.

Né à El Oued en 1925, c’est à Biskra, où il a été camarade de classe de Larbi Ben’Mhidi, que Abdelkader Lamoudi fait ses première armes du militantisme. En 1943, il crée à El Oued la première cellule locale du PPA. En 1947, il est responsable de l’Organisation spéciale (OS) de la région d’El Oued et du sud constantinois.

Le défunt, qui a adhéré à l’organisation dès sa création, activait entre El Oued et Biskra, jusqu’à Aïn Touta à Batna. Il faisait partie des militants arrêtés le 1er novembre 1954.

Incarcéré, il fut libéré au printemps 1955. Il retourne, par la suite, à Alger en compagnie du chahid Si El-Haouès, pour tenter de s’engager dans la Guerre de libération. Il fut arrêté, encore une fois, à la fin de l’année 1955 et incarcéré à la prison de Barberousse. Après sa libération, le défunt a poursuivi son action révolutionnaire au sein des cellules du FLN jusqu’à l’indépendance en 1962.

Ses hauts faits d’armes pendant cette période, c’est l’approvisionnement de plusieurs zones de la région en armes, acheminées de Libye ou collectées dans le grand Sud algérien, à dos de chameau.

Des armes qui, plus tard, serviront au déclenchement de la lutte armée dans les Aurès. Des faits confirmés de son vivant par Hocine Aït Ahmed, responsable national de l’OS, et plusieurs autres militants. Lamoudi était aussi connu comme étant un membre du fameux groupe des « 22 ».

C’est à cause de son penchant pour l’action armée que ses anciens compagnons l’ont convié à prendre part à cette réunion où le passage à la lutte armée fut décidé. Elle a eu lieu en juin 1954 à El Madania, au cœur d’Alger.

Lamoudi était l’un des tout derniers membres des « 22 » encore en vie. Avec son décès, il ne reste plus qu’un seul : Athmane Belouizdad, frère de Mohamed Belouizdad.

Comme Lamoudi, Athmane vit aussi loin des projecteurs, ne s’exprime presque jamais publiquement au point où ceux qui ne le connaissent pas le confondent avec son frère, et ceux qui le connaissent le croient mort. La discrétion est aussi l’une des qualités de cette élite de militants qui ont préparé dans le dos des autorités coloniales l’une des plus grandes révolutions du 20e siècle. La discrétion et le sens du sacrifice.

« Je voudrais faire remarquer une dernière chose à propos des 22 : il faut se souvenir qu’en 1992, lorsque le système s’est trouvé dans l’impasse, il a fait appel à un membre des 22, en l’occurrence le frère Mohamed Boudiaf – Allah yerrahmou – pour tirer l’Algérie de la crise dans laquelle elle s’enlisait. Ils sont allés le chercher au Maroc alors qu’il était banni. C’est pour dire que les membres des 22 ont toujours répondu présents chaque fois que l’Algérie avait besoin d’eux », disait Abdelkader Lamoudi.

L’une de ses rares interviews, réalisée en 2018, donc avant le déclenchement du hirak populaire, il la clôt sur une note d’espoir : « L’Algérie se relèvera, corrigera ses erreurs et ira de l’avant. Il y aura toujours des hommes valeureux qui aiment leur pays et il y en a beaucoup et l’Algérie se hissera au rang des grandes nations, inchAllah. Le combat continue. Il ne faut pas désespérer de l’Algérie. L’Algérie a payé cher son indépendance et elle ne permettra à personne de toucher à sa souveraineté. Il y aura toujours des hommes pour la protéger et préserver son indépendance. »

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