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Ahmed Ouyahia toujours droit dans ses bottes

Ahmed Ouyahia toujours droit dans ses bottes

Attendu par tous dans un contexte social et politique très tendu, le discours d’Ahmed Ouyahia à Biskra hier, vendredi 16 février, n’a laissé personne sur sa faim.

Certes, c’est le Secrétaire général du RND qui a parlé, mais le ton et les rhétoriques utilisées sont celles d’un Premier ministre droit dans ses bottes, décidé à maintenir le cap de l’austérité et surtout de la fermeté vis-à-vis de l’agitation du front social.

Le temps d’un meeting partisan de quarante minutes, on a retrouvé le Ouyahia des années 1990, plus soucieux de préserver la bourse de l’État que de soigner sa popularité, quitte à assumer toutes « les sales besognes ».

L’Algérie a « beaucoup gaspillé » jusque-là et il est temps que l’État, et donc le peuple, adopte un train de vie que permettent ses moyens. La situation ainsi résumée, il assène aux médecins, enseignants et autres corporations qui portent des revendications socioprofessionnelles, qu’il n’avait rien à offrir, sauf le conseil de mettre immédiatement un terme aux débrayages. C’est à prendre ou à laisser.

Dans son discours, Ouyahia n’a pas peut-être pas usé de menaces directes à l’encontre des frondeurs, mais certains mots prononcés sont plus que durs, frisant la provocation : des « pirates » qui font grève et qui dispensent  « des cours privés dans des garages à 500 dinars l’heure », « le train de l’anarchie » qui « peut nous mener à l’irréparable »…

Ce durcissement de la position du gouvernement était déjà perceptible il y a une dizaine de jours lorsque les ministres de la Santé et de l’Éducation sont allés à des mesures extrêmes en procédant à des ponctions sur les salaires des grévistes et même à des radiations définitives. Avant eux, c’était le MDN qui avait asséné ses vérités aux retraités de l’armée, les accusant de « tromper l’opinion publique ». Depuis le début de ces mouvements de protestation, presque aucune concession réelle n’a été faite aux syndicats, mis à part les quelques propositions d’aménagement du service civil, d’ailleurs toutes rejetées par les médecins résidents.

Ce week-end, le chef de l’exécutif a confirmé qu’il s’agit bien d’une stratégie concertée au niveau du gouvernement qui y voit la seule manière efficace de contenir le feu de la contestation. Le cap de la fermeté et de l’inflexibilité est définitivement pris. Et pas que, semble-t-il, vis-à-vis des seules revendications sociales.

Louisa Hanoune, qui a appelé une énième fois à l’élection d’une assemblée constituante, s’est vu rabrouée sans ménagement. Quant à son initiative, Ouyahia la qualifie de « retour à zéro ». Encore des mots durs.

Syndicats ou partis de l’opposition, le Premier ministre n’a peur de personne. Comme au poker, soit il est sûr de ses cartes, soit il bluffe.

Quoiqu’il en soit, l’équation presque insoluble de maintenir l’équilibre budgétaire dans un contexte marqué par une chute sensible des revenus pétroliers tout en s’épargnant un mécontentement social, ne lui laisse guère le choix.

 « L’Algérie connaît des difficultés financières » qui l’ont contrainte à « arrêter la construction des écoles » et à « geler des projets ». Pis, « le pays vit aujourd’hui à moitié à crédit », allusion à la planche à billets. Il le reconnaît d’ailleurs, c’est cette parade du financement non conventionnel de l’économie qui a permis au pays de tenir le coup.

Pas question donc de continuer à « gaspiller » et plus de place aux « abus », pour reprendre ses propres termes. Autrement dit, l’État ne dépensera plus aucun centime supplémentaire pour son fonctionnement, donc pas d’augmentation des salaires.

Ahmed Ouyahia sait d’expérience que la moindre concession en ces temps d’érosion du pouvoir d’achat sera un mauvais signe aux revendications mises en veilleuse et le risque d’embrasement général n’est jamais loin. Et là, il le sait aussi, toutes les postures de fermeté ne seraient d’aucune utilité.

La seule voie de sortie qui reste pour l’exécutif est de tenter d’avoir à l’usure les différents mouvements qui agitent le front social depuis plusieurs mois. Reste à savoir de quelle oreille l’entendront le Cnapeste, le Camra et les autres qui eux non plus, n’ont jusque-là pas montré le moindre signe de flexibilité.

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