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Algérie – France : « Les demandeurs de visa ne doivent pas être pris en otage »

Algérie – France : « Les demandeurs de visa ne doivent pas être pris en otage »

Karim Bencheikh Karim Bencheikh. Facebook Officiel
Karim Bencheikh

Karim Bencheikh est candidat aux élections législatives anticipées en France dans la 9ecirconscription des Français de l’étranger qui regroupe de nombreux pays africains dont l’Algérie.

Dans cet entretien à TSA, il revient sur les enjeux de cette élection, ce que le RN veut faire des binationaux, les visas, les relations entre l’Algérie et la France, l’accord de 1968, les visas…

Quels sont les enjeux des législatives anticipées du 30 juin et du 7 juillet ?

La dissolution irresponsable décidée par le président Macron nous plonge dans une élection existentielle. L’enjeu majeur des législatives anticipées est de mettre fin au chantage permanent du camp macroniste qui brandit la menace du chaos pour se maintenir au pouvoir.

Oui, nous devons faire barrage au Rassemblement national. Et il est aussi temps de fermer la parenthèse macroniste. Emmanuel Macron n’a pas tenu sa promesse de tenir compte du vote de gauche, qui l’a porté à l’Elysée en 2017 et en 2022.

« Le Rassemblement national et ses épigones représentent un danger existentiel pour la République française »

Il a promis de faire reculer l’extrême droite mais l’a continuellement nourrie jusqu’à en faire la principale force électorale en 2024.

Avec le Nouveau Front Populaire, la gauche se donne les moyens de mener directement le combat contre l’extrême droite. Le Rassemblement national et ses épigones représentent un danger existentiel pour la République française. Mais Macron fait partie du problème politique de notre pays, pas de la solution. 

Vous vous présentez pour la 9e circonscription des Français de l’étranger. En Algérie, les Franco-Algériens n’ont pas voté massivement lors des Européennes du 9 juin. Faut-il qu’ils se mobilisent davantage cette fois et pourquoi ?

La participation de nos compatriotes aux élections françaises n’est pas toujours aisée, surtout en Algérie. Beaucoup se sentent éloignés de la vie politique française et ne se reconnaissent pas dans les débats médiatiques. Cette élection est cruciale.

Nos compatriotes français en Algérie peuvent élire un député de combat, un député d’union, qui a bâti dans cette 9e circonscription les bases de l’actuel Nouveau Front populaire.

La situation se simplifie : d’un côté, un camp de droite dominé par le Rassemblement National, allié au grand capital ; de l’autre, une gauche unie et vivante.

Le marketing macroniste ne prend plus. Après les 49.3, la casse sociale et la loi immigration,  nos compatriotes doivent se mobiliser pour tourner cette page.

Notre circonscription doit envoyer un signal fort. 7 millions de nos compatriotes installés en France sont originaires du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest.

Ce sont eux qui subiront en premier les politiques du RN. Donc oui, il faut se mobiliser dès le 25 juin pour le vote électronique et le 30 juin pour le vote à l’urne.

Vous vous êtes rendu en Tunisie, durant cette campagne. Quelles sont les attentes des Franco-Tunisiens par rapport à ces élections  ? 

En Tunisie les attentes sont claires. A Tunis, à La Marsa, à Hammamet, à Sousse,  à Bizerte, j’ai rencontré des compatriotes inquiets de la montée de l’extrême droite et de l’acharnement contre la gauche, notamment la France insoumise.

Ils sont très sensibles au drame que subissent les Palestiniens à Gaza et aux questions récurrentes telles que les bourses scolaires et les études en France. Le Nouveau Front Populaire représente un espoir pour une majorité écrasante des Français de Tunisie.

Vous avez été élu en avril 2023 comme député de la 9e circonscription dans un contexte de détérioration des relations entre l’Algérie et la France. Que faut-il faire pour  dépasser les blocages actuels ?

J’ai été élu deux fois, la première en juin 2022 et la deuxième en avril 2023. Sur la relation bilatérale France-Algérie, je crois qu’Emmanuel Macron a personnalisé à l’extrême une relation qui vit à travers les relais diplomatiques, politiques, et surtout la diaspora algérienne.

Il a beaucoup promis sans toujours apporter la clarté nécessaire, ce qui est l’attente exprimée par la partie algérienne. Surtout, il a eu, avec la légèreté que l’on connaît, des paroles malheureuses, lesquelles pèsent lourd face aux selfies et aux embrassades de façade.

L’immigration est au cœur des débats de la campagne électorale en France. Quelles sont vos propositions ? 

L’immigration n’est pas vraiment au cœur de la campagne, dominée par les mensonges et les anathèmes. Le consensus néolibéral sature l’espace médiatique, tandis que le programme économique du Nouveau Front populaire, le seul chiffré et argumenté, est diabolisé.

Je ne compte plus les débats sur la supposée dérive antisémite de la gauche. On essaierait presque de nous faire croire que l’extrême droite est devenue le chantre des valeurs républicaines alors qu’elle a passé ces deux dernières années à l’Assemblée nationale à proposer des politiques inégalitaires, racistes et xénophobes.

Je me souviendrai toujours de ce premier jour du mandat au cours duquel un député RN, président de la séance pour quelques heures, est venu partager au perchoir son souvenir ému de son combat pour l’Algérie française. Honteux !

« Utiliser les visas comme carte de chantage est une grave erreur »  

Nous voyons aujourd’hui Jordan Bardella proposer de faire des binationaux des citoyens de seconde zone en leur interdisant l’accès à nombre d’emplois.

Il propose simplement de revenir explicitement sur l’une des valeurs fondamentales de notre république, c’est-à-dire la promesse d’égalité.

Et pire encore, à travers cette mesure de nourrir la méfiance entre Français, certains étant considérés de par leurs origines comme n’étant pas « fiables ».

Pour ma part, je suis opposé à toute remise en cause des fondements de notre pacte républicain. Je défends la laïcité, le droit du sol et le droit de vote des étrangers aux élections locales.

La France est grande par ses valeurs de fraternité et son identité républicaine. Il est essentiel de rappeler que l’immigration fait partie de notre histoire et de notre richesse collective.

Et pour la politique des visas Schengen et l’accord franco-algérien de 1968 ?

J’ai toujours alerté sur les irritants dans la politique des visas. Utiliser les visas comme carte de chantage est une grave erreur.

J’ai interpellé le gouvernement sur les dangers de lier la mobilité à des questions politiques complexes, comme la coopération judiciaire et les laissez-passer consulaires.

Les demandeurs de visa, souvent des familles de Français, ne doivent pas être pris en otage. Le droit à une vie familiale est une liberté fondamentale. Le chantage au visa a laissé une blessure profonde dans les pays du Maghreb.

Sur l’accord franco-algérien de 1968, je rappelle que c’est un traité liant deux Etats qui ont une histoire tumultueuse. Toute évolution doit se faire en suivant les voies diplomatiques, parce qu’un accord peut évoluer dans le temps si les deux parties en ressentent la nécessité.

Ce n’est pas un sujet de surenchère, de chantage ou un instrument de politique intérieure. Cela mérite d’être traité avec tact et dans le respect mutuel.

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