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Avortement, sexualité : ces débats qui agitent le Maroc en plein Ramadan

Avortement, sexualité : ces débats qui agitent le Maroc en plein Ramadan

Entre une société civile qui aspire au changement et un establishment conservateur, le Maroc est tiraillé en plein mois de ramadan par des débats sur des questions liées aux mœurs, des relations sexuelles hors mariage à l’avortement.

L’affaire du viol d’une fillette de 11 ans par trois adultes jette son ombre sur le débat. Des associations, des féministes et  des militants des droits de l’homme ont dans le collimateur deux textes particulièrement : le Code pénal et le Code de la famille.

Au Maroc, avoir des relations sexuelles hors mariage, même quand on est adulte et consentant, est passible d’une peine allant d’un mois à une année de prison ferme. L’avortement est plus gravement puni, entre 5 et 20 ans pour le médecin et de six mois à deux ans pour sa patiente.

Même punis par la loi, l’avortement et les rapports sexuels hors mariage sont pourtant une réalité dans la société marocaine. Selon des estimations reprises par la presse marocaine, entre 600 et 800 femmes ont recours à l’avortement chaque jour.

Le chiffre parait démesuré, mais il est avancé aussi par la sociologue marocaine Sanaa El Aji El Hanafi dans une interview à Radio Canada. 25% le font sans assistance médicale, faute de moyens, et 78 femmes en meurent chaque année à cause des conditions dans lesquelles est pratiqué l’avortement clandestin.

La sévérité de la loi fait que les médecins facturent très cher le risque pris, jusqu’à l’équivalent de dirhams de 2.000 euros l’opération. Beaucoup de Marocaines avortent par ailleurs à l’étranger, dans des pays où la législation n’interdit pas l’IVG (interruption volontaire de grossesse).

La pénalisation des relations sexuelles hors mariage n’est pas toujours appliquée, mais elle pend telle une épée de Damoclès sur la tête de tous les Marocains.

Des défenseurs des droits de l’homme accusent même les services de sécurité d’utiliser cette disposition pour faire chanter journalistes indépendants et activistes.

Plusieurs journalistes sont incarcérés au Maroc pour des accusations à caractère sexuel, ce qui a valu au pays une condamnation ferme du Parlement européen en janvier dernier.

Avortement et sexualité hors-mariage : des lois contestées au Maroc  

Le principal mouvement qui mène la bataille pour changer les choses s’appelle « Hors-la-loi ».

Une manière de signifier que tout le monde est hors-la-loi puisque les faits incriminés par les textes  sont largement répandus. Une pétition est lancée pour l’amendement du code pénal. Elle est soutenue par 490 personnalités, en référence à l’article 490 pénalisant les rapports sexuels hors mariage.

Sous la pression de la société civile, le Maroc se dirige vers l’amendement des articles contestés, malgré les résistances des milieux conservateurs.

Même l’ancien Premier ministre et dirigeant du Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste), Saad Dine El Othmani, s’est dit favorable à la légalisation de l’avortement mais seulement dans certains cas précis, comme le viol ou le risque sanitaire.

Les détracteurs des textes en vigueur ont un allié au sein même du gouvernement en la personne du ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, qui assure que les nouvelles moutures sont prêtes mais qu’à chaque fois, des « imprévus » sont rencontrés.

Les interventions au Parlement de Ouahbi sont de véritables plaidoyers pour plus de libéralisation. « Je considère l’avortement comme une affaire entre le médecin et sa patiente, ça ne regarde qu’eux », a-t-il entre autres soutenu.

Les débats qui tiraillent la société et la classe politique marocaines surviennent alors que la justice vient de « rectifier » une de ses sentences, jugée très laxiste, à l’encontre de violeurs d’enfant.

Vendredi  14 avril, la Cour d’appel de Rabat a alourdi sensiblement les peines prononcées en première instance à l’encontre de trois hommes reconnus coupables du viol d’une fillette de 11 ans, suivi d’une grossesse.

Le premier verdict, entre 18 mois et 2 ans de prison, avait choqué la société civile qui s’est mobilisée pour obtenir sa révision. En appel, la justice marocaine a condamné un des accusés à 20 ans de prison ferme et les deux autres à 10 ans.

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