
L’Algérie a lancé un nouvel appel d’offres pour l’achat de 50 000 tonnes de blé tendre. Cet appel d’offres intervient après celui de la mi-octobre concernant des quantités équivalentes de blé dur.
L’appel d’offres de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) concerne l’acquisition de blé tendre destiné à la meunerie, selon l’agence Reuters qui précise que l’appel d’offres porte sur « un volume nominal de 50 000 tonnes métriques, mais l’Algérie achète fréquemment des quantités bien supérieures au volume annoncé lors de ses appels d’offres ».
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Cet appel d’offres n’est pas passé inaperçu. Le 20 octobre La Dépêche-Le Petit Meunier, une publication spécialisée française notait que : « Le retour de l’Algérie aux achats soutient les prix du blé russe ».
La campagne de semis
Sur le terrain des pluies précoces ont permis d’éviter les traditionnels retards de semis. Partout dans les wilayas, les autorités locales ont symboliquement marqué le début des opérations. Cette occasion a permis de constater un renouvellement du matériel utilisé dont des tracteurs Massey Fergusson à 4 roues motrices ou des semoirs neufs en provenance de l’unité PMAT de Sidi Bel-Abbès.
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Certains agriculteurs innovent en procédant au passage de rouleaux après celui du semoir, une opération qui permet de mieux valoriser les pluies automnales lorsqu’elles sont irrégulières.
Les services agricoles annoncent avoir mis à la disposition des agriculteurs tous les moyens nécessaires : semences certifiées, engrais, location de matériel, prêts de campagne (Rfig). Pour les agriculteurs algériens, le défi est d’arriver à emblaver le maximum d’hectares.
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L’expert agricole Mustapha Benaoui regrettait récemment sur les ondes de la Radio algérienne la perpétuation de la pratique de la jachère en Algérie. Celle-ci concerne 40% des terres céréalières qui restent non-emblavées chaque année.
Il s’inquiétait également du manque de pluie récurrent à l’ouest du pays : « nous risquons de perdre des agriculteurs ». L’année passée, à Oued Lili (Tiaret), du fait du manque de pluies, des agriculteurs n’ont encore rien récolté et lors d’une réunion de l’Union des paysans algériens (UNPA), ils se sont demandés comment rembourser leur prêt de campagne.
C’est dans ce contexte que le ministre de l’Agriculture et du développement rural, Yacine Mahdi Oualid, a annoncé une prochaine Conférence nationale avec pour but d’adopter une stratégie concernant la modernisation de l’agriculture selon le cap tracé par le président Abdelmadjid Tebboune. Cette conférence se déroulera les 27 et 28 octobre à Alger. Son principal objectif : la sécurité alimentaire durable.
L’orge, préférée au blé tendre
L’actuelle campagne de semis s’accompagne d’objectifs de la part des services agricoles que rapporte l’agence de presse APS. Dans la wilaya d’Oran, il est prévu d’ensemencer 25 000 hectares dont 5 000 de blé dur, 18 000 en orge et 500 en avoine.
Selon un responsable local, la prédominance de l’orge et l’absence de blé tendre est liée à la présence « d’une dalle calcaire » et à des pluies insuffisantes. Quant au blé dur, il devrait être installé là où l’irrigation est possible afin « d’assurer » une production ? selon la même source.
A Mascara, se sont près de 62.000 hectares qui devraient être emblavés dont plus de 28.000 en orge, près de 23.000 en blé dur, plus de 7.000 en blé tendre et 3.000 en avoine.
A Tiaret, ce sont plus de 300.000 hectares qui devraient être emblavés dont 156.000 d’orge, 130.000 de blé dur, 20.000 de blé tendre et 4.000 d’avoine.
A Constantine, région céréalière par excellence, les services agricoles prévoient d’ensemencer 91 000 hectares dont plus de 63 000 en blé dur, près de 19 000 en blé tendre, 8 000 en orge et 1 600 en avoine.
Alors que la céréale la plus consommée en Algérie est le blé tendre, cette priorité ne semble pas être celle des agriculteurs.
Une partie de l’explication réside dans le différentiel de prix entre blé dur (6 000 DA le quintal) et blé tendre (5 000 DA le quintal). Il semble que le relèvement des prix du blé tendre de 2022 n’ait pas suffit, à l’époque il est passé de 3 500 DA le quintal à 5 000 DA.
A ce différentiel de prix, selon des agriculteurs, le blé tendre souffre d’une plus grande sensibilité au manque de pluie. Au sud sous pivot d’irrigation, des agriculteurs déclarent avoir atteint des rendements de 70 quintaux en blé tendre.
Cependant, tous les investisseurs au sud ne semblent pas être convaincus et préfèrent semer du blé dur. Lors de la campagne écoulée, la coopérative des céréales et légumes secs (CCLS) d’Adrar a commercialisé 42.000 quintaux de semences de blé dur mais seulement 1 730 quintaux de blé tendre.
La préférence des agriculteurs pour le blé dur aux dépens du blé tendre s’accompagne d’une autre préférence ; celle pour l’orge. Celle-ci est achetée par les CCLS à 3 400 DA le quintal (contre 2 500 avant 2022), mais elle peut atteindre beaucoup plus lors des périodes de soudure lorsque la demande des éleveurs de moutons est plus forte.
A l’époque, concernant l’orge, Ali Kader, ancien directeur des services agricoles, faisait remarquer dans El Watan que « les agriculteurs préfèrent écouler leurs récoltes sur le marché libre avec l’accentuation de la crise de l’alimentation des cheptels ».
Alors que le Projet de loi de finances 2026 vise un objectif de production locale de 6 millions de tonnes de céréales à l’horizon 2028 (soit le double de la quantité actuelle), il semble que bon nombre d’agriculteurs se soient affranchis de leur rôle de producteur de blé tendre pour le déléguer à l’Etat, quitte à ce que cela se traduise par des importations importantes alors que l’Algérie est en passe d’assurer son autosuffisance en blé dur.