Attirés par les promesses d’une « vie meilleure », de nombreux migrants déchantent très vite à leur arrivée à ce qu’ils pensaient être un Eldorado européen.
Parmi les victimes, des Maghrébins, prêts à tout pour s’installer en France. Si certains montent dans des embarcations de fortune, d’autres tombent dans le piège d’organisation qui leur promettent un travail et un titre de séjour dans l’Hexagone.
C’est le cas de l’entreprise Vitilham qui a été condamnée, ce 24 septembre 2024, pour traite d’êtres humains en Gironde, dans le Sud-Ouest de la France. Ces victimes sont des Marocains recrutés au Maroc, à qui l’on promettait titre de séjour et travail, ainsi que d’être logés et nourris en France, en contrepartie bien entendu de beaucoup d’argent.
Entre 8.000 et 13.000 euros
Selon le média français Sud-Ouest, cette entreprise, spécialisée dans la viticulture, promettait à ses victimes un contrat de travail de trois ans en France avec un salaire de 1.500 € par mois, une régularisation de leur situation administrative, avec l’obtention d’un titre de séjour, mais aussi d’un logement. Cependant, pour signer le contrat, aller en France et commencer le travail, il fallait que ces Marocains payent entre 8.000 et 13.000 €.
Hélas, en arrivant en France, ces travailleurs découvrent la dure réalité : des mauvaises conditions de travail, des logements insalubres, envahis par les rongeurs, où s’entassent plusieurs salariés par chambre. Pour seul confort, ils avaient droit à un matelas trop fin ainsi qu’à des meubles qu’ils ont eux-mêmes récupérés de la déchetterie.
Face à ces conditions, les travailleurs se retrouvent pris au piège. Selon la vice-procureure Élodie Blier, les victimes « refusent de se manifester par peur ou par honte ». Elle ajoute qu’il s’agit d’une « ubérisation » de l’activité viticole de laquelle profitent des « recruteurs peu scrupuleux ».
Des conditions de travail inacceptables
À la tête de cette entreprise, une quadragénaire marocaine, dévoile le média français. Ce mardi 24 septembre, elle a comparu devant la Justice en Gironde. Elle a fait face aux accusations portées par quatre plaignants, dont un qui est ingénieur en génie civil. « 48 autres victimes sont au cabinet, entre Libourne et Bordeaux », indique une avocate de l’une des parties civiles.
Les quatre plaignants évoquent le logement dégradé avec plusieurs travailleurs dans la même chambre, des conditions de travail très dures avec un camion de ramassage à 6 h du matin et un contremaître qui les surveillaient et qui ne manquait pas une occasion de les rappeler à l’ordre quand il jugeait que le travail n’allait pas assez vite.
Les victimes dénoncent aussi les salaires insuffisants, des heures de travail qui demeurent impayées, ainsi que des périodes de chômage alors qu’ils étaient censés être sous contrat. Mais en plus de ne pas les payer assez, l’entreprise leur soutirait de l’argent. Outre les sommes en euros qu’ils ont dû payer avant d’embarquer vers la France, ces travailleurs évoquent les 2.000 à 3.000 € qu’ils devaient payer à chaque renouvellement de titre de séjour.
Si les travailleurs essaient de se rebeller, ils se retrouvent ciblés par diverses intimidations. Deux des quatre plaignants ont d’ailleurs été victimes de « pressions » durant l’été 2024, ce qui les a amenés à être « exfiltrés » de Gironde.
La cheffe de l’entreprise condamnée par la Justice française
La mise en cause, mère de famille, se défend comme elle peut. Elle nie notamment les transactions et assure que les logements étaient conformes aux exigences fixées par la loi et que les travailleurs sont à l’origine des dégradations.
Cette Marocaine est poursuivie pour plusieurs accusations, notamment la traite d’êtres humains à l’égard de plusieurs personnes, l’emploi de salariés sans autorisation de travail, mais aussi la soumission de plusieurs personnes vulnérables ou dépendantes à des conditions d’hébergement indignes, explique Sud-Ouest.
Alors que son entreprise doit s’acquitter d’une amende de 50.000 €, l’accusée a été, quant à elle, condamnée à deux ans de prison. Elle doit également indemniser les parties civiles. Pour finir, la mise en cause a été interdite de gérer ou de diriger une entreprise.
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