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En Algérie, les violences faites aux femmes « s’apparentent parfois à de véritables tortures »

En Algérie, les violences faites aux femmes « s’apparentent parfois à de véritables tortures »

La Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) a publié, ce samedi 8 décembre, son rapport sur les droits de l’homme pour 2018. Elle y dénonce de nombreuses atteintes aux droits des personnes dites vulnérables et aux libertés fondamentales.

Les femmes et les enfants toujours vulnérables

Le rapport, dont une grande partie est consacrée aux atteintes aux droits des personnes vulnérables relève des violences et des privations de droits fondamentaux endurées par les femmes et les enfants.

Se référant aux travaux du réseau Wassila, association de défense des droits des femmes, la LADDH affirme que « les hommes croient qu’ils ont un droit de violence sur les femmes et estiment que leurs corps et leur honneur leur appartient ».

« Les violences les plus fréquentes « sont familiales et conjugales » », signale la ligue, en relevant que ces actes se déroulant au sein des familles représentent « 80% des violences aussi bien morales, économiques que physiques ». « Les homicides font bien évidemment partie de cette liste effroyable (de violence) », ajoute la Ligue.

Pour la LADDH et le réseau Wassila, les violences faites aux femmes « s’apparentent parfois à de véritables tortures », avec des « cas d’électrocution, de strangulation, de brûlures, d’utilisation d’armes pour (les) menacer ».

L’adoption en 2015 d’une loi criminalisant la violence conjugale n’a pas réglé le problème de la prise en charge des femmes victimes de violence par les autorités, d’après le rapport qui souligne néanmoins « la portée politique » de l’adoption de cette loi. « C’est la première fois que la violence conjugale est condamnée et sanctionnée », note le rapport.

La « clause de pardon », que comporte la loi compromet l’application de celle-ci, selon la LADDH pour qui relève « des cas de femmes qui étaient presque sommées de pardonner ». Une situation compliquée encore plus par les difficultés qu’ont les femmes algériennes à dénoncer les violences dont elles sont victimes.

« On conditionne cette femme pour avoir des scrupules et des réticences à dénoncer un homme de la famille ou le mari », est-il expliqué dans le rapport.

Le document dénonce également « des officiers et des agents de sécurité » qui « prennent le relais de la famille pour essayer de dissuader (la femme de porter plainte) avec un discours moralisateur ».

Les enfants sont tout aussi vulnérables selon le rapport de la LADDH. Malgré l’adoption de la loi sur la protection de l’enfant en juillet 2015 et le renforcement de son statut dans la constitution de 2016, « la situation est encore problématique », pointe le rapport. Plus de 6000 enfants ont été maltraités en 2017, selon les statistiques de la DGSN, rappelle la LADDH, en jugeant ces chiffres « alarmants ».

Les abus sexuels à l’encontre des enfants algériens sont très fréquents. Il y a eu 1100 cas enregistrés officiellement en 2017, d’après le rapport. « Il s’agit encore une fois de cas signalés à la police. Ils sont combien à en être victimes sans que leurs parents portent plainte ou ne signalent ces abus à la police ? Nettement, plus que les chiffres officiels, assurément », a affirmé Zineb Ayadi, Présidente de l’association La voix de l’enfant, citée dans le rapport.

Situation alarmante des réfugiés

La situation des réfugiés, des migrants subsahariens en particulier, « alarme » la LADDH. Les discours des autorités qui se veulent rassurants sur la question, notamment celui du ministre de l’Intérieur, « sont en contradiction avec les rapports » rédigés par les ONG et les instances internationales, selon la ligue.

Selon le rapport qui se réfère aux chiffres de l’Organisation mondiale pour les migrations, plus de 11 000 subsahariens ont été conduits à la frontière avec le Niger depuis septembre 2017. Des expulsions menées « sans distinction de nationalité » et qui ont « des conséquences désastreuses » car, elles « séparent parfois les familles et isolent les mineurs ».

« Face à la crainte d’être arrêtés, les migrants s’enferment dans leurs domiciles. Si les expulsions se poursuivent, les migrants se verront forcés à vivre cachés accentuant leur situation d’extrême vulnérabilité », souligne la ligue.

Dans ce même registre des migrations illégales, la LADDH exprime son inquiétude quant au phénomène des harragas algériens qui est, selon elle, « une conséquence des difficultés économiques et politiques que traverse l’Algérie ».

La ligue relève que les autorités italiennes ont annoncé des arrestations  » entre trois et huit Algériens en situation irrégulière chaque jour en moyenne depuis plus d’un an ». Un indice de l’importance du phénomène dont les causes ne sont pas purement sociales et économiques, pour la ligue. « Il s’agit d’un malaise social global. Ce n’est pas une histoire de pauvreté », peut-on lire dans le rapport.

« Recul en matière des droits humains »

La LADDH dénonce dans son rapport un « recul en matière des droits humains » et « une remise en cause des acquis démocratiques et sociaux arrachés par des sacrifices suprêmes des Algériennes et Algériens ».

La Ligue a rappelé son « plaidoyer en vue d’aboutir à l’amendement de la loi sur les réunions, les manifestations publiques et pacifiques ». Cette loi demeure, selon l’ONG « imprégnée par les dispositifs d’exception mis en place lors de la décennie noire pour des considérations de maintien de l’ordre et de la sécurité.

Elle demande également l’amendement de la loi de 2012 relative aux associations. La loi renforce « la domination de l’administration dans le processus de création des associations », affirme la ligue pour qui le maintien de cette loi est « un frein pour l’ensemble des acteurs de la société.

Sur la question de la liberté d’expression, la LADDH a dénoncé le pouvoir qui « s’attelle à exercer un contrôle sur les médias et les journalistes ». Cette volonté du pouvoir est confirmée par « les arrestations de journalistes et de blogueurs », par l’ONG qui cite, notamment, les exemples des procès de Merzoug Touati, Abdou Semmar et Said Chitour.

 

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