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En France, a-t-on encore le droit de critiquer Israël ?

En France, a-t-on encore le droit de critiquer Israël ?

L’article aurait également pu s’intituler : « Peut-on émettre des critiques sur la politique israélienne sans être taxé d’antisémite ? ». Déjà suffisamment brûlant quand il s’agit d’évoquer l’islam, les musulmans et la question du terrorisme, le sujet devient bouillant à la simple évocation de l’État hébreu. Sur les ondes médiatiques, le sujet Israël semble être devenu une zone de non-droit, laissant planer le spectre des limites de la liberté d’expression à la française.

Et c’est bien là que le problème se pose. Concernant Israël, il n’y aurait pas de place au débat constructif. Spécialiste de géopolitique, Pascal Boniface est un homme dans la tourmente depuis la publication de son livre – Est-il permis de critiquer Israël ? (2003). « Je suis accusé de ce que je considère comme détestable au plus haut point », énonce-t-il dans son dernier ouvrage, intitulé lui « Antisémite », sorti il y a quelques jours à peine et dont les 3.000 premiers exemplaires viennent déjà d’être écoulés. Il y raconte comment la colère avait détruit toute possibilité de réflexion et comment le fait d’avoir été jugé publiquement comme antisémite avait eu de détestables conséquences. « De vrais antisémites m’entouraient de leur sollicitude. Je leur faisais immédiatement comprendre que je ne partageais pas leurs vues et que je refusais tout amalgame. »

Plus de débats, mais la volonté d’écraser une posture intellectuelle

Sur ces questions devenues aussi délicate qu’une opération de déminage, la France semble alors avoir succombé à une sorte de censure ne laissant plus de place ni à la diversité des pensées, ni à la nuance ou à la demi-mesure. Un délitement intellectuel qui trouverait en partie ses origines dans la construction des débats médiatiques, le foisonnement des émissions « pour ou contre » soulignant cette idée de manichéisme. Une idée qui flambait lors des attentats de Charlie Hebdo, où plus qu’une seule chose comptait : prendre position. Soit on est Charlie, soit on ne l’est pas.

Auteur de la préface du dernier livre de l’universitaire français, le sociologue Michel Wieviorka, dont les grands-parents juifs sont morts à Auschwitz, écrit ces lignes : « Oui, le débat dérape constamment en France dès qu’il est question de l’islam, des musulmans et des juifs. Oui, une violence verbale, particulièrement menaçante, peut s’exercer en France sur quiconque s’autorise à critiquer la politique de l’État hébreu. Oui, des acteurs engagés, intellectuels, militants, responsables institutionnels juifs, préfèrent la disqualification de l’adversaire politique au débat argumenté. » Ces mots tombent comme un constat glaçant.

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