L’Algérie veut booster ses exportations hors hydrocarbures, avec nouvelle stratégie basée sur trois leviers : levée des entraves bureaucratiques, mise en place des moyens logistiques et de nouvelles règles juridiques et fiscales.
Un objectif d’autant plus important que les cours du pétrole et du gaz sont volatiles. Alors que le prix du baril tourne autour de 60 dollars, le temps presse et la diversification de l’économie et des exportations devient un impératif crucial.
Au cours d’une rencontre organisée samedi 17 mai à Alger, le ministre du Commerce extérieur, Kamel Rezig, s’est engagé à lever les entraves devant les exportateurs et fixé un objectif pour l’année 2025 : 10 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures.
Exportations hors hydrocarbures, un impératif économique urgent
Comparativement à ce qui se faisait ces dernières décennies, le niveau atteint par les exportations hors hydrocarbures est appréciable, avec un pic de 7 milliards de dollars en 2022 avant de redescendre à 5 milliards. Mais ce volume représente à peine 10% du volume total des exportations algériennes qui sont dominées par les hydrocarbures et demeure en deçà des objectifs tracés.
L’Algérie compte atteindre 29 milliards de dollars d’exportations en dehors du gaz et du pétrole d’ici à 2030. Elle devra pour cela agir sur deux niveaux : d’une part, diversifier l’économie et permettre au tissu productif national de dégager des quantités à l’export, et d’autre part faciliter les opérations d’exportation par la mise en place des infrastructures nécessaires, notamment de transport et de logistique, et la simplification des procédures.
Ce dernier segment est du ressort du ministère du Commerce extérieur et de l’agence dédiée dont la création a été annoncée par le président de la République en avril dernier. Jusque-là, les exportations étaient gérées par Algex, l’agence algérienne de promotion des exportations, qui s’est emmêlée les pinceaux en s’occupant également des importations. Le chef de l’État a décrété la fin de cette agence et annoncé la création imminente de deux instances distinctes, l’une chargée des importations et l’autre dédiée aux exportations.
Nouvellement nommé à la tête du département du Commerce extérieur, Kamel Rezig a réuni les exportateurs samedi à Alger. C’est la première rencontre du genre. Le ministre s’est engagé devant les opérateurs à lever les entraves qui freinent les opérations d’exportation.
Booster les exportations et lutter contre les abus : le casse-tête
Les entraves sont essentiellement d’ordre bureaucratique. Rezig a appelé à la conjugaison des efforts des différents intervenants afin d’exploiter le plein potentiel d’exportation du pays. L’accompagnement des exportateurs se fera par l’actualisation du cadre juridique et réglementaire et la mise en place de mesures incitatives dans les domaines bancaire, fiscal, douanier et logistique, a-t-il précisé.
Présent à la rencontre, le ministre des Transports, Saïd Sayoud, a mis en exergue les efforts de son secteur pour faciliter les choses aux exportateurs, citant le passage des ports au système de fonctionnement en continu, le lancement d’appel d’offres pour acquérir de nouveaux trains de transport de marchandises et le renforcement de la flotte de cargos d’Air Algérie. A ce propos, il a indiqué que la compagnie aérienne nationale Air Algérie dispose d’un seul avion cargo et celui-ci est peu sollicité. Sayoud a annoncé qu’Air Algérie va bientôt acquérir un deuxième appareil et pourrait en affréter d’autres.
De quoi se plaignent les exportateurs algériens ?
Côté chiffres, Kamel Rezig a indiqué que l’objectif pour 2025 est d’atteindre 10 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures. Ses services ont enregistré l’existence en Algérie de 1900 à 2000 exportateurs de biens et 400 exportateurs de services. Certains ont réalisé des performances appréciables. Plus de 200 exportateurs, 146 de biens et 80 de services, ont dépassé le chiffre de 1 million de dollars d’exportation en 2024.
Ce volume devrait croître à la faveur de la tenue en Algérie de la foire commerciale intra-africaine en septembre prochain, au cours de laquelle des contrats d’une valeur totale de 44 milliards de dollars devraient être signés, dont 20% par des entreprises algériennes.
Les exportateurs algériens se plaignent essentiellement des entraves bancaires et de la réglementation très rigoureuse liée au rapatriement des devises. En cas de non rapatriement des devises liées à l’exportation, des poursuites judiciaires peuvent être engagées contre l’entreprise et son propriétaire qui risque de se retrouver en prison, même s’il a contracté les assurances nécessaires.
L’interdiction d’exporter certains produits issus de la transformation des matières premières importées limite les capacités d’exportation du pays, et prive la diaspora algérienne de la possibilité de consommer algérien.
Les exportateurs algériens se plaignent aussi de la faiblesse des frais de mission accordés par la Banque d’Algérie pour se déplacer à l’étranger et prospecter les marchés ainsi que les difficultés rencontrées pour ouvrir des bureaux de liaison dans les pays cibles.
Lors de sa dernière rencontre avec les opérateurs économiques en Avril, le président Tebboune avait déploré que l’on soit passé de la surfacturation des importations et la sous-facturation des exportations, avec toujours le même objectif pour certains opérateurs indélicats de garder le maximum de devises en dehors du pays. Entre l’impératif de booster les exportations hors hydrocarbures et celui de lutter contre les malversations pour préserver les ressources du pays, le casse-tête demeure entier.
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