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Face à la crise, le discours ronronnant des acteurs bancaires

Face à la crise, le discours ronronnant des acteurs bancaires

La journée technique sur la modernisation des banques, organisée mardi 19 février par l’Abef, avait plutôt bien commencé. Achour Aboud, président de l’Association des banques, soulignait d’entrée : « Toute la communauté bancaire est consciente du chemin qui reste à parcourir pour hisser le secteur aux standards internationaux ».

Selon M. Aboud, « avec une trentaine de banques et établissements financiers, employant près de 35.000 employés, le secteur bancaire et financier algérien détient un réseau commercial de plus de 1.500 agences, gère 14 millions de comptes et un encours de crédits supérieur à 10 000 milliards de dinars ».

Des crédits à l’économie concentrés sur l’énergie et l’eau

Une performance ? Le gouverneur de la Banque d’Algérie Mohamed Loukal relativise en affirmant, lors de son intervention, que le financement bancaire destiné à l’économie, même s’il a indéniablement progressé ces dernières années avec une hausse annuelle de crédits qui était encore proche de 14% en 2018, est loin d’avoir irrigué l’ensemble des secteurs de l’économie.

Les crédits à l’économie, qui ont atteint près de 50% du PIB en 2018, ont été surtout concentrés sur les secteurs de l’énergie et de l’eau, a soutenu Mohamed Loukal. « Le rôle des banques dans un financement sain et durable de l’économie nationale est plus que jamais crucial, surtout que le financement de l’économie demeure largement dominé par la dépense publique », a-t-il ajouté.

« Dans l’avenir, les financements devraient s’orienter davantage vers les industries manufacturières et les services productifs portés par les PME, à valeur ajoutée avérée », a préconisé le Gouverneur de la Banque d’Algérie qui s’est montré également très critique sur la faible capacité des banques à collecter l’épargne : « La collecte des ressources est l’un des talons d’Achille du système bancaire algérien ». Mohamed Loukal a estimé « entre 1.500 à 2.000 milliards de dinars, l’épargne hors circuit bancaire des agents économiques ».

« L’amélioration des services bancaires existants et une politique agressive d’offre de services bancaires innovants, y compris une politique de taux attrayants, permettrait certainement de drainer une grande partie de cette épargne vers le circuit bancaire », a-t-il avancé.

Cette démarche est d’autant plus nécessaire selon le gouverneur de la BA que « l’actuelle aisance en matière de liquidité bancaire n’est pas imputable aux performances des banques mais a été générée, pour l’essentiel, par le financement monétaire appelé à prendre fin dans un horizon temporaire limité ».

En revanche, le Gouverneur de la Banque d’Algérie a laissé les banquiers présents sur leur faim en déclarant, sans plus de précisions, que « la réforme de la gouvernance des banques doit, à son tour, constituer un axe majeur de la réforme bancaire escomptée, guidée par les principes d’autonomie, d’efficacité et d’obligation de performance ».

Un exercice d’autojustification de l’Abef

On a retrouvé le même ton dans l’intervention du ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, qui a lui aussi invité les banques à faire plus d’efforts pour mobiliser l’épargne.

« Il est attendu des banques une contribution qualitative par une mobilisation plus intense de l’épargne et une meilleure allocation au profit des agents économiques », a-t-il recommandé.

Les banques de la place sont ainsi invitées à améliorer la qualité de leurs services, promouvoir la couverture territoriale et diversifier davantage la gamme des produits proposés, a soutenu le ministre.

Avec de enjeux aussi clairement formulés, on s’attendait à ce que la journée d’étude de l’Abef livre quelques éléments d’information sur la stratégie des acteurs bancaires pour faire face à ces vastes défis.

Malheureusement le programme alléchant qui annonçait un débat et des communications sur « la diversification de l’offre des financements, la modernisation des systèmes d’information ainsi que l’inclusion financière » s’est transformé en exposé le plus souvent ennuyeux sur les « actions de réformes financières » entreprises et les dispositifs juridiques et institutionnels mis en place en Algérie au cours des 30 dernières années.

A l’occasion d’une journée d’étude qui a rapidement tourné à l’exercice d’autojustification, on a attendu en vain des réponses aux questionnements formulés par les responsables de la supervision du secteur eux-mêmes.

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