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Fatiha Benabbou : « Nul ne peut démettre le président de l’APN »

Fatiha Benabbou : « Nul ne peut démettre le président de l’APN »

Fatiha Benabbou, juriste spécialisée en droit constitutionnel, est formelle : les députés ne peuvent pas destituer le président de l’APN. « Ni la Constitution ni la loi organique (du 25 août 2016 relative à l’organisation et au fonctionnement de l’APN et du Conseil de la nation) ni le règlement intérieur ne leur donnent cette possibilité », explique-t-elle dans une déclaration à TSA.

La destitution, selon elle, est possible dans un cas précis. « C’est lorsqu’il commet un acte indigne de sa mission, mais cela concerne tous les députés, pas uniquement le président de l’APN. Cela est prévu dans l’article 124 de la Constitution ».

L’article 124 de la Constitution prévoit que le député ou Sénateur « engage sa responsabilité devant ses pairs qui peuvent révoquer son mandat s’il commet un acte indigne de sa mission ». « Le règlement intérieur de chacune des deux chambres fixe les conditions dans lesquelles un député ou un membre du Conseil de la Nation peut encourir l’exclusion. Celle-ci est prononcée, selon le cas, par l’Assemblée populaire nationale ou le Conseil de la Nation, à la majorité de ses membres sans préjudice de toutes autres poursuites de droit commun », est-il stipulé dans la même disposition.

« Le député a un mandat national »

Le règlement intérieur de l’APN, dans son article 74, prévoit la révocation d’un député « qui aurait accompli un acte indigne de son mandat » après « jugement définitif ». « La révocation du mandat est proposée par le bureau de l’Assemblée agissant à la requête de l’instance judiciaire compétente », est-il indiqué.

Selon Fatiha Benabbou, « l’acte indigne de sa mission » est établi lorsque le député commet un délit ou un crime infamant pour lequel il est jugé d’une manière définitive (épuisement de tous les recours). « Un député est élu, il ne peut pas être démis de ses fonctions. Il a un mandat national, selon l’article 122 de la Constitution (selon cet article, le mandat est renouvelable et non cumulable avec d’autres mandats ou fonctions). En théorie, nous avons deux mandats : le mandat national et le mandat impératif. Dans le mandat impératif, le député est sous la responsabilité de son mandant qui peut le démettre à tout moment lorsqu’il y a un problème. Nous n’avons pas ce type de mandat. Nous avons un mandat national qui signifie que le député est indépendant et libre par rapport à son mandant. Donc, pendant les cinq années de son élection, il n’y a aucun problème sauf s’il commet un acte indigne de sa mission », a-t-elle détaillé.

Reste une seule option, laquelle ?

Interrogée sur le cas de l’incompatibilité, prévue dans l’article 10 du règlement intérieur de l’APN, Fatiha Benabbou explique : « Si vous êtes député et que vous avez d’autres fonctions, il y a parfois incompatibilité, il faut faire un choix. Donc on n’est pas devant un cas d’incompatibilité (pour l’affaire de Said Bouhadja) », a-t-elle noté.

Fatiha Benabbou rappelle que le président de l’APN est élu pour un mandat de cinq ans. « Nul ne peut le démettre de son mandat d’autant qu’il a été élu en tant que président. Il a été élu sur la base de la confiance du parti majoritaire qui est le FLN. Il y a des changements politiques, pas juridiques ou constitutionnels, que les partis introduisent au droit parlementaire. Entre l’élu et son parti, il y a une relation de confiance. Il y a par exemple une discipline de vote qui n’est pas inscrite dans la Constitution. Le député vote selon les consignes de son parti, ce n’est pas écrit. Il y a donc une option, qui n’est pas constitutionnelle mais qui fait partie de la Real Politik, qui est le retrait de confiance du parti politique », a-t-elle analysé. Elle a rappelé qu’en 2004, Karim Younes a démissionné de son poste de président de l’APN après « un retrait de confiance » du FLN.

Les résolutions et motions sont strictement déterminées

Fatiha Benabbou note toutefois que le retrait de confiance du parti à un député ou son exclusion n’entraine pas la perte du mandat parlementaire, selon les termes de l’article 117 de la Constitution. Les députés, selon elle, n’ont aucun moyen juridique de démettre le président de l’APN.  

« Ils n’ont pas les moyens d’émettre une résolution ni les moyens d’émettre une motion. Les résolutions sont strictement déterminées dans la Constitution et dans la loi organique (de 2016) dans leur nomination, dans leur objet et dans leurs conditions. Les résolutions parlementaires sont dangereuses, elles peuvent être émises contre le président (de la République). Il en est de même pour les motions », a expliqué Fatiha Benabbou, auteure d’un ouvrage sur le droit parlementaire.

Les députés, qui contestent Said Bouhadja, ont présenté une motion de « retrait de confiance » avec des signatures. Le président de l’APN, dans une déclaration à TSA, a demandé à consulter la liste de ces signataires qui ne lui a pas été présentée.

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