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Gaïd-Salah plus que jamais devant une responsabilité historique

Gaïd-Salah plus que jamais devant une responsabilité historique

L’annonce de la composante du gouvernement Bedoui est le résultat d’un compromis entre le cercle présidentiel et l’armée après l’insistance de cette dernière sur l’application de l’article 102.

Si le compromis n’est pas remis en cause, le président Bouteflika va remettre sa démission et la transition pourra commencer suivant ce que dispose la Constitution, c’est-à-dire la remise du pouvoir au président du Sénat pour une période de 90 jours durant laquelle sera organisée une élection présidentielle sous la férule du gouvernement en place.

Sans doute que le chef d’état-major croit avoir fait le plus dur en obtenant le départ de Bouteflika sans avoir à sortir du cadre constitutionnel. Le clan présidentiel, lui, s’offre avec le maintien de Bedoui une garantie de sortie sans dégâts et peut-être même la possibilité de dire son mot dans les futures grandes décisions.

Mais il reste une grande inconnue, l’avis du peuple qui, après six semaines de démonstrations de force, a placé la barre des revendications très haut. Pour la rue, Bouteflika fait partie du passé et l’enjeu maintenant est de dégager tout le système et les visages qui l’incarnent.

L’application stricte de l’article 102 avec le dispositif législatif en vigueur, les institutions actuelles et surtout un gouvernement dirigé par un membre du cercle présidentiel n’offre pas une telle garantie.

En attendant les décisions qui pourraient être annoncées au courant de la semaine, la rue est sceptique et risque de le demeurer même dans le cas de réajustements de façade qu’on annonce ici et là, comme le remplacement du président du Sénat par une personnalité consensuelle.

Tout cela sent la manœuvre et le peuple risque de ne pas trop apprécier. Les premiers appels à une autre journée de grande mobilisation ont été lancés sur les réseaux sociaux dès l’annonce de la composante du nouveau gouvernement et il n’y a pas de doute que les rues de toutes les villes du pays seront de nouveau noires de monde ce vendredi si d’ici là des mesures plus « sérieuses » ne sont pas annoncées.

Le grand perdant risque d’être le chef d’état-major de l’ANP, dont les positions ont été jusque-là perçues comme étant en faveur des revendications du peuple. Beaucoup ont vu dans son coup de gueule de samedi dernier et son appel à l’application des articles 7 et 8 de la Constitution une grande victoire pour le mouvement populaire et un prélude pour la mise en œuvre d’une solution sans le système et ses relais.

Beaucoup, mais pas tout le monde. Certains ont au contraire interprété le dernier communiqué du MDN qui dénonçait une réunion de « parties connues » comme un banal épisode de la guerre des clans qui empoisonne la vie nationale depuis quelques années.

Ce dimanche, Karim Tabbou a par exemple fait part sur TSA de son scepticisme et prophétisé un arrangement entre les différents clans quand ils sentiront le danger. C’était deux heures avant la 20h de l’ENTV et l’annonce de la composante du nouveau gouvernement. La présence d’Ahmed Gaïd-Salah dans l’exécutif après le retentissant clash de samedi donne-t-elle raison au coordinateur de l’UDS ? On n’en sait rien, mais le chef de l’armée a devant lui quelques jours pour le démentir.

Son irruption brusque dans la sphère politique a suscité des espoirs qu’il n’a pas le droit de décevoir. A défaut de s’expliquer sur sa présence dans un gouvernement désigné par celui qu’il somme de démissionner, il devra être plus explicite sur la manière dont il compte obtenir l’application des articles 7 et 8 qui disposent que la souveraineté et le pouvoir constitutif appartiennent exclusivement au peuple.

Sans être des constitutionnalistes, les Algériens savent que l’application de l’article 102, dans les conditions actuelles, ne garantit rien de tel. Au contraire, la composante du nouveau gouvernement traduit la volonté du système de peser sur la transition pour se régénérer d’une manière ou d’une autre. Ahmed Gaïd-Salah est plus que jamais devant une responsabilité historique.

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