Ambitions, intégration, diaspora : les enjeux de l’IATF 2025 pour l’Algérie
Direct Live Search
Search

IATF 2025, quels enjeux pour l’Algérie ? Le décryptage d’un économiste

L’économiste Brahim Guendouzi décrypte pour TSA les enjeux économiques de l’IATF 2025 pour l’Algérie et le continent africain.

IATF 2025, quels enjeux pour l’Algérie ? Le décryptage d’un économiste
L’Algérie a adhéré récemment (en 2025) au système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) / Source : Facebook pour TSA
Ali Idir
Durée de lecture 4 minutes de lecture
Suivez nous sur Google News
Suivez nous Google News
Temps de lecture 4 minutes de lecture
L’Algérie accueille l’Intra-African Trade Fair (IATF 2025), du 4 au 10 septembre. La cérémonie d’ouverture est prévue au Centre international des conférences (CIC) d’Alger en présence du président Abdelmadjid Tebboune et de quelques chefs d’État africains.

Dans cet entretien, l’économiste Brahim Guendouzi décrypte les enjeux de l’IATF pour l’Algérie et les défis auxquels sont confrontés les pays du continent pour développer l’intra-africain.

A lire aussi : Visas diplomatiques : l’Algérie accuse la France de « mauvaise foi »

Quels sont les enjeux économiques de l’IATF 2025 qui s’ouvre ce jeudi 4 septembre en Algérie ?

Depuis sa création en 2018, l’Intra-African Trade Fair (IATF), qui se déroule cette année à Alger du 4 au 10 septembre 2025, continue à s’inscrire directement dans la lignée des objectifs fixés par l’accord-cadre portant sur la création de la zone de libre échange du continent africain (ZLECAF) de 2018, notamment son protocole relatif sur le commerce des marchandises.

Les enjeux économiques de cette 4ᵉ édition, sont en premier lieu, la hausse attendue du nombre de contrats à signer en matière d’exportations, de partenariat et d’attractivité d’investissements directs, à hauteur de 44 milliards de dollars, dont 10 milliards de dollars escomptés pour le compte de l’Algérie, pays organisateur.

A lire aussi : Imane Khelif dément sa retraite et accuse son ex-manager de trahison

Il faut remarquer que l’IATF ne concerne pas uniquement les acteurs économiques africains, mais aussi d’autres partenaires hors continent, qui seront présents, à la recherche d’opportunités commerciales.

En second lieu, c’est le renforcement de l’industrie par la mise en valeur des ressources naturelles dont recèle le continent africain, à travers la création de chaînes de valeur régionales pour une plus grande intégration continentale.

A lire aussi : L’Algérie instaure un triple contrôle des importations

Des secteurs industriels sont d’ores et déjà privilégiés comme l’agroalimentaire, l’automobile avec « Africa Automotive Show », l’industrie pharmaceutique et les énergies renouvelables.

En troisième lieu, le défi technologique sera présent puisqu’un espace est dédié aux startups avec le lancement de projets innovants à impact continental ainsi que l’exportation des services numériques.

Enfin, il est essentiel pour les pays du continent de considérer la diaspora comme un acteur du développement économique de l’Afrique. L’initiation d’actions dans le cadre de la plateforme de l’IATF 2025 est une initiative louable, car permettant de nouer des accords de partenariat avec les diasporas académiques et professionnelles en vue de la valorisation des compétences acquises.

Quels sont les enjeux pour l’Algérie ?

Il est clair que l’organisation de l’IATF 2025 par l’Algérie soit perçue comme une opportunité stratégique pour le pays, d’une part, et aussi pour les entreprises nationales, d’autre part.

Un tel évènement, d’envergure commerciale et continentale, pourra ouvrir de nouvelles perspectives à la diversification des exportations hors hydrocarbures, grâce aux nouveaux avantages liés aux concessions tarifaires qu’accorde la ZLECAF ainsi qu’à la réduction des coûts commerciaux.

L’Algérie dispose d’arguments essentiels à l’exportation et pour le partenariat et l’investissement, comme par exemple ses richesses en ressources naturelles et énergétiques, son positionnement géostratégique, ses capacités industrielles en développement, ses produits agricoles de haute qualité et sa main d’œuvre jeune, formée et disponible.

L’IATF 2025 met en perspective un marché africain vaste permettant aux entreprises nationales d’accéder à plus de consommateurs. Aussi, sera-t-il question, à l’occasion de cette manifestation commerciale d’envergure, de la valorisation du « made in Algeria » tout en testant la compétitivité des entreprises algériennes sur le marché continental et en renforçant leur visibilité.

Il est à rappeler que l’Algérie a adhéré à la « Guided Trade Initiative » en 2024, qui regroupe aujourd’hui 23 pays africains afin de piloter les échanges préférentiels de façon maîtrisée et selon les règles d’origine de la ZLECAF, avant de les étendre aux autres États membres.

L’Algérie a adhéré récemment (en 2025) au système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS) permettant des paiements instantanés en monnaie locale entre pays africains en ex-ante, avec compensations entre Banques centrales et en devises en ex-post.

Les entreprises algériennes, particulièrement les PME, sont appelées à surmonter plusieurs obstacles structurels et opérationnels, pour pouvoir en tirer pleinement profit des possibilités qu’offre l’IATF 2025.

Elles doivent s’appuyer sur les structures d’accompagnement publiques et pouvoir accéder à des financements adaptés. Enfin, l’État algérien mobilise ses ambassades et représentations diplomatiques pour faciliter les contacts avec les partenaires africains, surtout que les plus hautes autorités du pays ont affirmé leur vision panafricaine claire, visant à faire de l’IATF 2025 un levier de diversification économique durable.

Pourquoi le commerce interafricain est faible ?

Trois chiffres reflètent la réalité africaine d’aujourd’hui. Le continent contribue uniquement pour 3 % du total des exportations mondiales de marchandises.

Le commerce intra-africain ne représente que 15 %, ce qui est très en deçà des niveaux atteints par les blocs commerciaux des autres continents.

Enfin, les exportations africaines représentent 76 % de produits primaires, ce qui dénote d’une très faible mutualisation des chaînes de valeur à l’échelle continentale.

C’est d’ailleurs en partie, l’argumentaire qui avait prévalu au moment de l’adoption des règles d’origine de la ZLECAF, dont le principal souci exprimé par les pays signataires est de renforcer la résilience économique du continent, de développer les chaînes de valeur régionales et d’améliorer la compétitivité des entreprises africaines aux niveaux continental et international, tout en favorisant le dialogue entre les secteurs public et privé.

L’Algérie affiche de grandes ambitions en Afrique, mais les moyens logistiques avec le continent restent faibles. Comment y remédier ?

Les infrastructures de transport et de communication sont cruciales pour la réussite de la ZLECAF, car elles facilitent le commerce intra-africain en réduisant les coûts d’échange, en améliorant l’accès aux marchés et en optimisant les chaînes d’approvisionnement.

La logistique s’avère être un véritable handicap en Afrique, mais aussi en Algérie. Les systèmes de transport sont souvent inadaptés ou mal connectés, ce qui augmente les coûts de transaction.

Plusieurs pays africains sont enclavés. Il y a une insuffisance de plateformes logistiques intégrées pour répondre à des flux de commerce de plus en plus importants.

Le transport terrestre est peu performant, et il y a un faible recours au transport ferroviaire. Les ports manquent de modernisation, ce qui entraîne souvent de faibles productivités, comparativement à d’autres ports en Asie ou en Europe.

Ayant pris conscience de cet obstacle, l’Algérie investi énormément dans les infrastructures de transport, en réalisant déjà la plus grande partie du tronçon de la route transsaharienne, puis les importants projets lancés ces dernières années pour la modernisation des ports, le lancement de nouvelles lignes ferroviaires, particulièrement au Sud et la connexion de la plupart des réseaux de transport.

À l’échelle africaine, des efforts sont également consentis pour mettre à niveau les plateformes logistiques, et ce, grâce à des financements assurés sur des projets d’infrastructures dans plusieurs pays par des banques comme Afreximbank, la Banque africaine de développement (BAD) ou encore la Banque mondiale.

En définitive, il y a une prise de conscience au niveau continental de l’importance stratégique que revêt la logistique dans la réussite du développement industriel, le commerce intra-africain et la mise en place des chaînes de valeur régionales. Il s’agit là d’un véritable challenge qui attend le continent africain et dont l’IATF 2025 mettra en exergue l’enjeu.

TSA +