Ce n’est pas encore l’automne et l’Algérie enregistre déjà de graves inondations. Depuis quelques jours, de tristes nouvelles parviennent des wilayas, nombreuses à se retrouver sous les eaux après de forts orages.
Quatre morts au total
A Mila, un enfant de huit ans a perdu la vie, emporté par un oued en crue. C’est la quatrième victime des inondations depuis début septembre, après la mort de trois personnes à Tébessa et Batna, emportées par les eaux d’oueds en crue.
Mardi matin, pas de nombreuses wilayas du nord du pays se sont réveillées sur un déluge. La capitale n’est pas épargnée et les images partagées sur les réseaux sociaux par les habitants de différents quartiers de la ville laissent penser que les inondations auraient fait des victimes parmi les automobilistes si les précipitations n’étaient pas survenues à une heure où la ville dormait encore.
Les torrents d’eau dévalant les pentes des routes et autoroutes ne pouvaient pas ne pas rappeler le triste souvenir de la catastrophe de Bab el Oued.
Près de deux décennies sont passées sur ces inondations meurtrières qui avaient fait plus d’un millier de morts en quelques heures. On en parle encore à chaque inondation et on se demande si la leçon de ce drame a été retenue.
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Gestion anarchique
Car le lourd bilan humain de la catastrophe de novembre 2001 n’était pas que la conséquence d’un phénomène météorologique extrême. C’était aussi une retombée logique d’une gestion anarchique des villes, d’un laisser-aller endémique, de décisions irréfléchies et d’une impunité généralisée.
Partout et chaque année, on parle d’avaloirs bouchés, car non curés au bon moment, c’est-à-dire pendant l’été. Les réseaux d’évacuation des eaux de pluie, quand ils existent, souffrent de défaut de réalisation, d’une dimension inadaptée ou d’un manque d’entretien.
Les images des inondations de ce mardi 8 septembre montrent des places publiques submergées d’eau, des torrents dévalant les axes routiers, des habitations et commerces inondés, des murs lézardés ou détruits.
Des trémies se transforment en retenues d’eau
On retient notamment ces habituelles images de trémies qui se transforment en retenues d’eau. Le problème se trouve dans leur conception même. Situées sous le niveau des réseaux d’assainissement et d’évacuation, il est souvent impossible de les raccorder.
Au niveau de l’administration, des spécialistes soulignent la disparition des services d’entretien des routes des subdivisions des travaux publics au niveau local, les fameux « ponts et chaussées ».
Les établissements de wilayas, comme Asrout à Alger, qui ont la charge de l’entretien et du curage, ne sont pas, estime-t-on, convenablement outillés pour de telles tâches ni n’en ont l’expertise nécessaire.
Dans les zones rurales, ce sont souvent les constructions anarchiques à proximité de lits d’oueds qui causent des drames. Les fortes précipitations sont certes un phénomène naturel, habituel ou pas, mais pas les inondations et les dégâts qui s’en suivent.
Les explications du ministre des Ressources en eau
Réagissant juste après les pluies de ce mardi, le ministre des Ressources en eau a comme tenté de convaincre que ce qui s’est passé était une fatalité, chiffres à l’appui : l’équivalent d’un mois de pluie tombé en quelques heures à Alger, 20 millimètres en 15 secondes à Khenchela, 35 millimètres en moins de 20 secondes à Constantine…
C’est un phénomène météorologique exceptionnel et les avaloirs, quelle que soit leur capacité, ne pouvaient pas absorber les quantités de pluie tombées en un laps de temps réduit, a-t-il défendu.
Il y a du vrai dans l’explication, mais aussi comme un aveu que l’effort d’adaptation qu’appellent de tels changements n’a pas été fait. Il est difficile de convaincre que ce qui arrive aux trémies après chaque précipitation est normal, alors que ce n’est pas le cas.
Tebboune ordonne une enquête
En début de soirée d’hier, la présidence de la République annonçait que le président Abdelmadjid Tebboune a chargé la DGSN d’ouvrir « immédiatement » une enquête sur la hausse « anormale » du niveau d’eau dans les tunnels et les routes, après les pluies qui se sont abattues sur Alger et d’autres villes du pays.
Ces inondations à répétition, qui font suite parfois à de faibles pluies, démontrent bien qu’il y a défaillance quelque part. La vulnérabilité du pays aux caprices du ciel est telle que, depuis quelques années, la moindre perturbation fait l’objet d’un BMS (bulletin météo spécial).